Chapitre 6 : Orland Gaffia

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Le marché de Xpars, habituellement animé, baignait dans un calme inhabituel. Les échos de la guerre qui ébranlait Mesilfa semblaient avoir refroidi l’ardeur des habitants, désormais hantés par la crainte des brigands et des créatures nocturnes qui faisaient disparaître leurs semblables. La misère, elle aussi, s’insinuait dans les rues comme un brouillard insidieux.

Mélanie, cependant, se frayait un chemin parmi les étals clairsemés. Les commérages sur un dragon aperçu dans le ciel ne manquaient pas d’attiser sa curiosité. Après quelques détours, elle retrouva son complice. L’échange fut bref : elle lui confia la bourse, lourde des pièces d’or du château, qu’il avait sollicitée pour ses emplettes. Leur conversation, ponctuée de regards méfiants, se perdit rapidement dans le murmure du vent.

Orland Gaffia, surnommé l’As du mystère pour sa maîtrise de l’occulte, était une figure connue à Xpars. Il y venait chercher des composants exotiques, des trésors d’ailleurs, convoités par les connaisseurs. Son secret, bien gardé, restait inviolé, même si parfois, il percevait le poids des regards, lourds de mépris ou de suspicion. Peut-être pressentaient-ils, sans vraiment savoir, la vérité de son être. Préférant l’ombre à la lumière, il effectuait ses achats à l’aube, quand les rues appartenaient encore aux ombres et que les curieux dormaient encore.

— Mélanie, ton retard est inhabituel, dit Orland avec une pointe d’impatience dans la voix. Mais ta diligence pour protéger le jeune neveu de mon ami n’a pas échappé à ma gratitude, ajouta-t-il, adoucissant ses mots d’un soupir reconnaissant.

Mélanie ne cessait de s’émerveiller devant les capacités d’Orland. Une fois de plus, il démontrait sa force et son acuité d’esprit. Mystiquement enchaîné à son domaine, il avait la faculté de détecter chaque murmure, chaque frémissement qui s’y produisait. La récente agitation des gardes, qui placardaient les murs d’affiches à l’effigie de Madrec et fouillaient les recoins à la recherche du fameux monstre des bois volant, le troublait profondément. Cette frénésie rappelait les heures sombres des chasses aux sorcières, un frisson glacé dans le dos de la liberté. D’un ton grave, il confia à Mélanie qu’il était temps de quitter ces lieux, avant que la suspicion ne se tourne vers eux.

Une fois devant le château , Orland effleura son amulette qui s’embrasa d’une lueur vive, provoquant une réaction en chaîne : les portes s’animaient, s’ouvrant pour les engloutir dans un tourbillon de lumière. Le domaine, tel un être vivant, se scella et s’éleva, s’arrachant à la terre pour fendre les cieux à une allure vertigineuse.

À l’intérieur, Mélanie essuya les critiques de ses convives.

— Eh bien ma chère, on dirait que nos invités ne sont pas habitués à une telle réception, taquina-t-il. Je me présente, je suis Orland Gaffia, le maître de ce château. Quant à vous, nul besoin de formalités, je connais déjà vos identités.

La surprise de Madrec était palpable lorsqu’il se retrouva face à l’homme qu’il avait inlassablement recherché. Il lui confia les tumultes qui avaient secoué Cosuria. Il évoqua également son oncle et l’importance cruciale de leur rencontre. Orland, l'écoutant attentivement, lui fit la promesse que là où ils allaient, des êtres comme Samellia et lui trouveraient non seulement un refuge, mais aussi leur véritable vocation.

Le château de la paix, dans un souffle de magie, conclut son périple aérien et se matérialisa au cœur d’une vaste place. Comme surgissant d’un autre monde, une structure enchantée en forme de langue se déploya, les guidant dans un glissement fluide avant de les déposer délicatement sur les pavés de la réalité.

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