Vivre le jour pour survivre à la nuit

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 Joe rentra ensuite et déposa les plateaux repas des deux artistes sur leur tablette respective. L'air inquiet, il questionna silencieusement Jason quant à l'état d'angoisse dans lequel Scott s'était retrouvé. Jason lui fit comprendre qu'il lui expliquerait plus tard, ne voulant pas faire repartir la crise de son homme. L'infirmier acquiesça et quitta la chambre en silence. Jason se releva et réussit à se libérer de l'emprise de Scott autour de sa main pour refaire le tour du lit et se rasseoir de l'autre côté afin d'avoir accès à son plateau.

Avec tout ça, je n'avais même pas remarqué que tu n'étais plus en fauteuil, désolé, commenta subitement Scott.

C'est rien, ma kiné m'a dit qu'il fallait que je me déplace le plus possible debout mais sans trop forcer, j'ai l'impression d'être un petit vieux tellement mes jambes tremblent quand je suis debout, sourit Jason.

C'est normal ça, il faut que tu te remuscle, tes jambes n'ont pas porté ton poids aussi longtemps depuis un petit moment.

Jason était rassuré de voir son compagnon reprendre contenance après tant d'émotions. Il grignota quelques mets présents sur son plateau sans grand appétit. L'inquiétude lui nouait l'estomac. Ils continuèrent tous deux de discuter pour éloigner les mauvaises pensées. Ce n'est qu'en début d'après-midi qu'un kinésithérapeute spécialisé en respiration vint rencontrer Scott. Ils allaient travailler ensemble pendant les prochaines semaines pour l'aider à retrouver une respiration optimale et faire en sorte que Scott puisse voir le moindre changement dans sa respiration qui pourrait annoncer le moindre problème. Jason en profita pour s'éclipser, sachant que son amant n'était pas seul dans la chambre. Il arpentait les couloirs à la recherche de Joe. Il était la figure la plus amicale du service et le seul qu'il souhaitait voir à cet instant précis. Il le trouva en salle de pause, occupé à discuter avec d'autres personnes du service qu'il ne voyait que très peu. Ne voulant pas le déranger, Jason s'assit sur une chaise dans le couloir et attendit que son ami ne soit plus occupé pour se montrer.

- Jason ! Viens, installe-toi, sourit-il. Tu veux un café ?

- Oh mon dieu oui ! A défaut de pouvoir fumer j'aurais au moins une dose de caféine, rit-il.

Mais son rire sonnait terriblement faux et Joe le comprit rapidement lorsqu'une larme roula sur la joue de son patient. Il ferma la porte pour leur offrir plus de tranquillité et s'installa à ses côtés.

Tu veux en parler ?

Les larmes de Jason redoublèrent à cette simple question. Son corps était secoué par les sanglots qu'il avait retenus tout le temps où il était resté à rassurer son amant.

On a eu la visite de l'avocat que nos managers ont engagé tout à l'heure, commença-t-il, la voix chevrotante. Il était là pour nous communiquer la date du procès et nous donner des infos sur le dossier et... Et il nous a annoncé que Jim, notre.. notre assaillant, était libéré sous contrôle judiciaire, acheva-t-il en pleurant de plus belle.

Choqué par la nouvelle, Joe passa sa main dans le dos de Jason pour lui montrer son soutien et le laissa pleurer autant qu'il en ressentait le besoin. Il était rassuré de voir son ami évacuer ses émotions plutôt que de les refouler comme il essayait toujours de le faire. Peu à peu, Jason se calma, reprenant doucement une respiration normale.

L'avocat a dit que son état psychologique ne collait pas avec une mise en détention provisoire, cette putain de blague, murmura-t-il. C'était de loin l'information qui le mettait le plus en colère. Tu sais ce que c'est le pire ? C'est que je sais qu'il est mentalement instable. Mais j'arrive pas à me faire au fait qu'il soit dehors au moment où on parle. Il n'a qu'à aller signer un papier qui prouve qu'il n'a pas quitté la ville tous les matins et derrière il peut faire ce qu'il veut ! Et nous on est là, coincé ici à essayer d'aller mieux, ça me fout en rogne. Et voir Scott souffrir autant de cette nouvelle, ça me tue, je ne l'avais jamais vu comme ça, termina Jason en se frottant le visage, dans l'espoir vain d'effacer toute trace de larmes.

On vit la nuit pour mourir un jourOù les histoires vivent. Découvrez maintenant