Quai n°77 Bis [TMNT fiction]

51. Bis

Maître Splinter avait validé l'opération.

Habillée d'un survêtement noir pour se fondre dans la nuit, Léa suivait April, Casey et Mikey dans les galeries souterraines. Derrière eux, ceux qu'ils appelaient les mutanimaux tentaient de rester discrets malgré leur apparence peu conventionnelle. Si Lili avait bien compris, le gecko qui accompagnait Leatherhead s'appelait Mondo. En revanche, elle ne se souvenait plus du nom du singe volant ni de celui du grand mutant visqueux.

Elle plissa les yeux pour se concentrer sur ce qu'il y avait devant elle. D'après le plan du réseau, le tunnel qui passait juste sous le dojo était hors d'accès : en réalité, il était solidement gardé par des sentinelles et des caméras de surveillance. Lorsqu'ils arrivèrent à proximité, April rattrapa Léa qui n'avait pas vu la bifurcation et la fit s'accroupir à côté d'elle. Casey fit de même avec Michelangelo, le visage dissimulé derrière un masque.

- C'est le moment de vérifier que l'appli de Donnie fonctionne. » Murmura April en la cherchant dans son téléphone.

Elle cliqua sur l'icône d'une caméra et sélectionna les appareils électroniques qui les entouraient. Bientôt, les petits yeux ronds des caméras du tunnels se figèrent, victimes du piratage informatique.

- Super. » Souffla April, soulagée. « Elles vont continuer de voir ce qu'elles ont filmé il y a cinq minutes. On a un peu de temps avant que les agents qui surveillent les écrans ne s'en rendent compte. Vous vous souvenez du plan ? »

- On s'infiltre dans le laboratoire jusqu'au couloir B. » Récita Léa fièrement. « Là, je fais diversion pour vous permettre d'entrer, vous vous positionnez devant les cellules de Léo et Donnie et, dès que la panne commence, vous les libérez. »

- Et nous on reste faire le guet parce qu'on ne peut pas entrer tant qu'il y a le courant. » Grommela Mikey en faisant la moue.

Deux heures auparavant, Marc avait envoyé le reste des instructions à Léa : trois uniformes les attendaient dans les vestiaires proches de la gare, dans lesquels les agents remettaient leur tenue civile avant de remonter à la surface. Normalement, il y avait aussi des casques pour cacher leurs visages. La seule difficulté résidait dans le parcours qu'ils auraient à faire entre le quai et ces vestiaires. Léa se secoua un peu pour se donner du courage.

- On y va ? » Demanda-t-elle à voix basse.

April hocha la tête et fit signe à Casey d'avancer, pliée en deux pour rester discrète. Lili la suivit après avoir cogné son poing contre celui de Mikey ; elle sentait son cœur battre la chamade alors qu'ils n'étaient même pas encore sur le quai. Devant elle, Casey lui jeta un regard appuyé. Le message était clair : pas de gaffe. L'adolescente se fit toute petite lorsqu'ils arrivèrent à la limite du quai.

Silencieusement, April leur indiqua les tuyaux qui passaient au-dessus avant de sauter, faisant légèrement résonner la structure. Casey s'élança à sa suite, suivit par Léa qui serait tombée sur le quai si son aîné ne l'avait pas rattrapée par le col. Agacé, il la hissa à côté de lui et lui fit comprendre qu'il l'avait à l'œil. Léa fit un sourire tordu avant de ramper à leur suite.

Quelques mètres plus tard, ils attendaient au-dessus des vestiaires. Une dizaine d'agents en sortaient, sûrement pour partir en patrouille nocturne : le trio s'engouffra dans les cabines dès qu'une accalmie se présenta.

Lili souleva la combinaison avec appréhension. Elle avait attendu des mois pour avoir le droit de la revêtir, et elle allait le faire dans le dos de son professeur. Mais c'était pour la bonne cause. La petite lycéenne secoua la tête puis enfila l'uniforme sans plus attendre, flottant un peu dedans. Heureusement, le casque était adapté à sa tête : elle en baissa la visière rapidement avant de sortir de la cabine, le cœur battant. Comme il n'y avait que deux autres agents dans les vestiaires, elle devina que c'était April et Casey, mais ce n'était pas important. À partir de ce moment-là, ils avaient convenu qu'ils se sépareraient, Léa d'un côté et eux de l'autre. Elle n'avait pas besoin de savoir où ils étaient pour faire ce qu'elle avait à faire.

Raidie par la peur, l'adolescente sortit de l'endroit et se dirigea vers le hall d'un pas mécanique, bientôt entourée par des dizaines d'agents. Elle déglutit péniblement avec l'impression que n'importe qui pouvait la reconnaître. Pourtant, elle traversa le hall central sans encombre avant d'atteindre les deux agents de sécurité.

Elle inspira profondément pour se donner du courage. C'était le moment. L'horloge de la gare indiquait 22h10.

Elle marcha d'un pas déterminé vers le couloir B, aussitôt bloquée parles gardes. Elle se glissa sur le côté pour réitérer, leur tourna autour, partit vers le couloir A pour faire de même avec les autres agents. Quand ils furent tous les quatre concentrée sur elle, Lili se mit à sauter sur place et à forcer le passage en donnant des tapes aux agents. Comme elle était toute seule, ils ne prirent pas la peine d'appeler du renfort ; ils se contentèrent de la maîtriser à quatre pour lui enlever son casque. Léa fit une grimace.

- Oh non, ma couverture ! » Se plaignit-elle tandis qu'elle voyait du coin de l'œil Casey et April se faufiler dans le couloir B. « Je m'entraîne pour les infiltrations. » Reprit-elle en souriant aux agents. « Alors, c'était comment ? Je vous ai mis en difficulté ? »

- Où as-tu eu cet uniforme ? » Gronda l'un des gardes. « Ce n'est pas un jeu. »

- Je suis très sérieuse, je m'entraîne dur pour être agent comme vous. » Affirma Léa en fronçant les sourcils. « Laissez-moi vous montrer ce que je sais faire. »

- On travaille, petite. »

- Juste une minute. » Supplia-t-elle avec de grands yeux.

Comme ils l'encerclaient, ils la lâchèrent avec lassitude et la regardèrent gesticuler avec un brin d'amusement. Elle avait décidément de la chance que la plupart des agents de la Ligue soit des pères de famille... Cela ne dura qu'une trentaine de seconde avant que l'un des gardes ne l'entraîne vers les bureaux pour faire son compte-rendu, mais cela avait suffit pour que Casey et April soit assez loin dans le couloir pour être hors de vue. Lili l'observa par-dessus son épaule en espérant de tout cœur qu'ils réussiraient la mission. C'était à eux de jouer, maintenant.

**

April s'éloigna de Casey pour chercher Donatello, inquiète à l'idée qu'il ne soit blessé. Elle tâcha d'ignorer le regard noir que lui jeta le jeune policier quand elle trouva enfin la bonne cellule.

- Donnie. » Chuchota-t-elle en toquant doucement contre la vitre.

Comme il était tout au fond, elle ne voyait que sa silhouette. Il fallu quelques minutes avant que le mutant ne se décide à approcher de la porte ; la lumière révéla des traits tirés malgré son masque.

- April ? » Réalisa-t-il avec étonnement. « Qu'est-ce que tu fais là ? »

- À ton avis, nigaud ? » Rétorqua-t-elle avec un sourire en coin. « On vient vous sortir de là ! »

- Mikey et Raph sont là ? » S'inquiéta aussitôt Donnie en tentant de regarder dans le couloir.

April secoua la tête et lui indiqua Casey du pouce, qui attendait un peu plus loin devant une autre cellule. Donnie dû s'écraser contre la vitre pour l'apercevoir.

- Je suis content de vous voir. » Soupira-t-il enfin en reculant. « Ça commençait à être long. »

- Tu es blessé ? »

- Pas gravement. » Assura-t-il. « Mais mon matériel me manque ! »

La jeune femme jeta un coup d'œil vers sa carapace. Effectivement, les agents avaient pris soin de lui retirer tout son attirail :il n'avait même plus ses lunettes.

- On va vous sortir de là. » Assura April. « Tiens bon. »

Elle posa sa main contre la vitre, le regard plongé dans celui de Donnie. Il l'observa en retour avec une certaine surprise, rougit un peu puis posa sa main au même endroit que la sienne, le sourire aux lèvres. Ils se regardèrent un instant avant que le sifflement agacé de Casey ne les interrompe. « On est en mission » lut April sur ses lèvres alors qu'il articulait dans leur direction en faisant de grands gestes. La jeune femme secoua la tête. La discussion qu'il avait eu trois heures auparavant n'avait visiblement pas suffit. Peu importe. Là n'était pas la question.

Il fallait d'abord qu'ils sortent de là.