Chapitre 9 - Lui

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On s'observe en silence, on s'apprivoise. Harper est méfiante, je peux le comprendre. Elle est bien plus jolie que dans mes souvenirs, c'est pas normal ça! 

— Agent Brankst, hein?

— A ce qu'il paraît ... Je suis désolé.

— Pourquoi?

— Pour ce que je t'ai fait subir dans mon appartement. 

— Il y en a eue beaucoup? Des femmes attachées à ton radiateur, ajoute t elle face à mon air interrogatif. 

— Tu es jalouse?, je ricane avant de soupirer. Tous les dommages collatéraux ont été remis entre les mains de la DEA, c'était la mission de Valmir, s'assurer qu'aucun innocent ne périsse dans ce carnage.

— Alors pourquoi moi?

— Parce que la plus grosse livraison de l'année arrivait, parce que prendre contact avec Larry, mon supérieur, aurait été beaucoup trop risqué. Je n'ai pas pu lui communiquer le lieu et la date exact de livraison alors ton joli visage était le cadet de mes soucis. C'est horrible, je le sais bien. Mais si je t'avais remis à Larry je risquais de compromettre 3 ans et demi de mission, c'était inconcevable. J'ai travaillé dur pour arriver à intégrer ce cartel et j'ai passé les 3 dernières années loin de ma famille sans savoir s'ils allaient bien, alors tout foutre en l'air pour toi...

— Je comprends.

— Vraiment?

— Ce n'était pas si terrible que ça. Enfin, tu es un peu bizarre comme mec mais j'imagine que j'aurai pu tomber sur bien pire. Tu as quand même tiré à 2 cm de ma cuisse.

— Tu m'as réveillé en hurlant pour une putain d'araignée, je râle. Et c'est toi qui a essayé de m'étrangler, je lui rappelle.

Elle sourit, amusée, ce qui me fait lever les yeux au ciel. 

— Comment tu as su qui j'étais?

— J'ai étudié chaque Cartel en relation avec celui de Razine pendant 6 mois, nuit et jour. Je connais le nom et le visage de chacun des membres et de leurs victimes. Tu étais jeune ... ton visage me disait quelque chose mais je n'arrivais pas à remettre un nom sur toi jusqu'à ce que tu me le donnes. Les pièces du puzzle se sont vite emboitées. Et si tu me racontais ta version de l'histoire? Tu es morte à l'âge de 19 ans d'après ton dossier. Je te trouve plutôt bien conservée pour une momie.

— Comme tu le sais déjà, mon père était l'un des informateurs de la DEA. Quand Walsh l'a appris, il a mis sa tête à prix. La DEA n'a rien fait pour le protéger et il est mort sous mes yeux. Après avoir assisté à son assassinat j'ai intégré le dispositif de protection des témoins. Le problème c'est que j'étais mineur au moment du procès Walsh, je n'ai donc pas été entendu. Jusqu'au réexamen de son procès 3 ans plus tard à mes 18 ans. Même si mon visage et mon nom n'ont pas été cités, il savait très bien qui l'avait vu ce jour là. L'année qui a suivi a été un vrai calvaire. Même depuis sa prison, il a réussi à me faire vivre un enfer. On déménageait tous les mois après chacun de leurs assauts. Ils me trouvaient, comme si les agents du dispositif de sécurité n'étaient rien d'autre que des alarmes lui annonçant avec précision où je me trouvais. Alors à mes 19 ans, j'ai fait croire à ma mort en volant un corps calciné à la morgue. J'ai mis le feu à notre planque du moment et j'ai fui. Depuis 5 ans, je change d'identité tous les 6 mois environ et il n'a jamais réussi à retrouver ma trace.

— Tu as conscience qu'à l'heure actuelle il est déjà au courant que tu es toujours vivante et dans les parages?

— Je vais disparaître à nouveau. Je voulais juste ... comprendre.

— Comprendre quoi?

— Rien ... peu importe.

Elle baisse la tête et fixe ses pieds, les néons me dévoilent quelque chose que je n'avais pas remarqué dans l'entrepôt. Du bout des doigts je caresse sa pommette rougie. 

— Qui a fait ça?

— Valmir.

L'espace d'une seconde, j'ai un doute et je ne suis plus sûr de rien.

— Il ne t'a pas ...

— Il m'a frappé devant les russes parce que je me suis débattue lorsqu'il m'a emmené dans la chambre. Ensuite, une fois loin d'eux il m'a promis qu'il ne me toucherait pas mais je devais faire semblant. Alors j'ai hurlé et pleuré. Les russes étaient satisfait de ce qu'ils avaient entendu et Poutine a prétexté que l'heure de ton arrivée approchait pour partir et ne pas les laisser m'approcher. Il est doué quand il s'agit de persuader quelqu'un d'abandonner son objectif premier, constate t elle avec un sourire en coin. Je vais y aller, tu as besoin de te reposer.

Elle se lève mais j'accroche son poignet. Son regard se pose sur mes doigts autour de son bras avant de remonter vers moi.

— Tu crois que si la situation avait été différente, on aurait...

— Ne pose pas de question dont tu ne veux pas connaître la réponse... Théo...

Elle murmure mon prénom comme si c'était un secret et disparaît comme un mirage sorti tout droit de mon imagination.  

Le chirurgien vient m'expliquer que je vais devoir me tenir à l'écart du terrain pour les 6 mois à venir si je veux retrouver une mobilité complète et totale. Si l'idée de rester à la maison à rien faire me répulse, ce n'est pas le cas de ma mère qui semble avoir reçu un cadeau de Noël en avance. Mon père est un peu plus compréhensif, ancien flic, il sait ce que cette annonce signifie pour moi et je sais que je vais pouvoir compter sur lui pour me soutenir. Valmir quant à lui pourra reprendre du service dans moins de 3 mois. Blessé à la cuisse, il s'en sort avec un meilleur pronostic et moins de rééducation.

DERRIERE LE MIROIROù les histoires vivent. Découvrez maintenant