Chapitre 12 - Elle

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— Emma? Il y a un client pour toi.

— Tout de suite Dan. 

Quand je retourne vers le client qui m'attend, je me fige. Roux et barbu, un cliché ambulant. Lorsqu'il tourne la tête vers le bar, je vois le trèfle tatoué dans son cou et mon sang se glace. Sans attendre, je rejoints l'arrière du bar, récupère mes affaires à la hâte et m'enfuit en courant. Je ne m'arrête qu'une fois dans ma chambre de motel. Ma valise est prête en moins de dix minutes. Je prends la route, sans but précis et me débarrasse de mes papiers d'identité et de mon téléphone, j'en achèterai un prépayé à la prochaine station. Dans ma boîte à gants, je cherche un nouveau passeport. Je serai donc désormais Nelia Harrys. 

5 ans que j'ai l'habitude de changé de vie au minimum 2 fois par an et c'est la première fois que je vois un Irlandais. Ca ne peut pas être une coïncidence. Les russes ont dû comprendre qui j'étais et se sont empressés de livrer l'information à Walsh, je ne vois pas d'autre explication. 

Je roule depuis un moment déjà et le pick up derrière moi ne semble pas décider à changer de direction. Je décide de tourner en rond dans la ville pour vérifier ma théorie, une fois de retour à la case départ, le véhicule noir aux vitres teintées est toujours derrière moi, je n'ai plus aucun doute. 

J'accélère, slalome entre les véhicules puis ralentie. Pris de court, mon poursuivant laisse un peu de distance entre nous jusqu'à ce que je m'engage dans une ruelle d'où je sais qu'un accès à un parking souterrain va me permettre de ressortir de l'autre côté du quartier. Je ne vais pas avoir beaucoup de temps mais cela devrait pouvoir me permettre de les distancer. 

Une fois dans le souterrain, j'accélère pour rejoindre la sortie au plus vite. Je manque de renverser des piétons mais c'est clairement eux ou moi alors on verra plus tard pour la culpabilité. Lorsque mon pare choc retrouve la lumière du soleil, je déboule au milieu de la circulation sous les klaxons excédés des usagers. Je ne ralentie pas avant d'avoir atteint la sortie de la ville. Lancée à pleine vitesse, je vérifie à plusieurs reprises dans mon dos. J'ai réussi à les semer et m'arrête lorsque je repère un motel miteux. Dans la nuit, j'échange mes plaques d'immatriculations avec celle d'un véhicule sur le parking. Le lendemain matin, je suis repartie avant le lever du soleil. 

Je roule comme ça pendant des jours sans savoir où aller. Quand le panneau Tucson apparaît, je sais que mon inconscient me ramène près de lui parce que j'ai peur pour la première fois depuis 5 ans. Il est ma seule chance de survie. Je me gare devant les bureaux de la DEA. A l'accueil, on me refuse l'accès, évidemment. Je demande à parler à l'agent Brankst mais on me répond qu'il est absent alors j'attends. Mon montre m'indique que je suis assise ici depuis 8 heures et 37 minutes quand j'aperçois le quinquagénaire qui dirigeait l'assaut à l'entrepôt des russes. Je lui fais de grands gestes derrière la vitre et il fronce les sourcils en m'apercevant avant de se souvenir de moi. Il franchit la sécurité et me rejoint dans le hall.

— Mlle Stone, que me vaut cette honneur?

— Bonjour ... euh ... Larry. Je... enfaite je cherche l'agent Brankst.

— Brankst? Et pourquoi donc? 

— Je ... j'ai besoin de son aide.

Il m'observe d'un œil critique tout en hochant la tête.  

— Si vous veniez m'en dire un peu plus dans mon bureau, m'invite t il d'un signe de la main.

— Euh ... non, merci.

— Non? Pourquoi être venue dans ce cas?

— Je veux voir Théo Brankst.

— Il n'est pas là.

— S'il vous plaît, j'ai vraiment besoin de le voir.

— Je ne peux rien pour vous Mlle Stone. 

Il fait demi tour et s'apprête à retourner vers son bureau quand il se tourne vers moi et ajoute :

— Il ne reviendra pas avant un moment, il est inutile que vous restiez ici.

Je passe le reste de la journée à faire des recherches sur l'agent Théo Brankst. Il n'existe nul part, évidemment. Par contre je trouve tous les états de service du sergent Evan Brankst. Je clique sur la photo du policier. Elle semble dater un peu mais je reconnais les traits de Théo. Peut être son père, si j'ai de la chance. Je trouve rapidement leur adresse et me rend à leur domicile. Garée à une centaine de mètre de leur demeure, je fais le tour par l'arrière pour observer le côté terrasse. Une femme d'une soixantaine d'année sirote un cocktail en savourant les derniers rayons du soleil. Son mari et son fils ne sont pas là, quelle poisse. Rester dans cette ville cette nuit ne me rassure pas, pas sans protection. Après une grosse demi heure à l'observer, je dois me rendre à l'évidence, il n'est pas là. Je soupire et me redresse pour rejoindre ma voiture. Je tombe nez à nez avec une version vieillis de Théo qui me scrute les bras croisés sur la poitrine. J'étouffe un cri de surprise dans ma main. Il lève un sourcil avant de me considérer d'un œil critique et secouer la tête.

— Qu'est ce que vous faîtes là? me demande t il dans un murmure.

— Je... je cherche Théo, je lui avoue.

— Il n'est pas là!

— J'ai remarqué, je rétorque sèchement ce qui ne lui plaît pas. 

— Qu'est ce que vous lui voulez?

— J'ai besoin de son aide. 

— C'est vous qui étiez à l'hôpital?

Je hoche la tête, les joues rouges. Il sort une carte de sa poche et griffonne quelque chose au dos avant de me la tendre. J'y découvre une adresse.

— Merci M. Brankst.

— La prochaine fois que vous cherchez quelque chose, ou quelqu'un, ici, il y a une sonnette à droite du portail, c'est très pratique vous verrez, raille t il avant de me planter là. 

DERRIERE LE MIROIROù les histoires vivent. Découvrez maintenant