Culpabilité

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Cela fait maintenant une semaine que le souvenir de Paola étendue par terre me hante. Une semaine que je fais cauchemars sur cauchemars me réveillant en sueur et affolée de me faire tuer par Fabio.

Malgré ma vengeance assouvie, je ne me sens pas mieux ni physiquement et encore moins moralement. Les coups et blessures qui ont marqué mon corps sont encore douloureux. A notre retour, Ezio a insisté pour que je vois directement le médecin et le gynécologue. Après que le médecin m'ait soigné, nous avons procédé à une échographie de contrôle pour vérifier la santé du bébé. A la suite de l'examen, le praticien nous a rassuré sur son état de santé, il est fort et s'accroche bien mais il a également pu voir sans hésitation que nous attendions un petit garçon. Ezio était aux anges. Même si je sais qu'il n'avait pas de préférences, un premier né masculin pour reprendre le flambeau reste une très grande fierté. Le gynécologue m'a cependant recommandé de rester un bon mois alitée pour ne pas risquer la fausse couche et laisser le temps de repos nécessaire à mon corps pour se rétablir. Je ne peux rien prendre à cause de la grossesse comme antidouleur efficace mais cela me convient car je sens le besoin de ressentir la douleur pour me punir de ne pas avoir réussi à sauver Paola. C'est par ma faute qu'elle s'est retrouvée mêlée à tout ça et par ma faute qu'elle est morte. Je ne parviendrai jamais à effacer cette culpabilité qui me ronge et à me pardonner de l'avoir laissée tomber. Je m'afflige donc ce châtiment au plus grand désarroi d'Ezio qui fait tout pour me réconforter et me soulager de ma peine.

Seul Ezio me tient compagnie, Andy et Andrea ont bien essayé de venir mais je les repoussais à chaque fois, voulant rester seule et silencieuse. Mes pensées sont envahies par les dernières paroles de Paola, mille questions tournent dans ma tête.

Allant un peu mieux aujourd'hui, je décide de prendre une douche et de rejoindre Ezio dans son bureau.

— Bonjour Ezio. salué-je faiblement.

Il me regarde surpris.

— May ? Qu'est-ce que tu fais debout ?!

— Je me sens mieux aujourd'hui et j'avais envie de prendre l'air.

Il s'écarte de son bureau et vient devant moi.

— Que tu te sentes mieux ou non, tu dois rester alitée, c'est ordre du médecin. C'est pour la santé du bébé May.

— Je sais mais juste quelques heures ne vont pas lui faire de mal. J'aimerais rendre visite au père de Paola.

— Tu veux faire quoi ?!

Les yeux d'Ezio se voilent de colère.

— Je n'ai pas pu assister à son enterrement ni à celui de Salva, laisse-moi au moins aller présenter mes condoléances à son père.

— May, tu n'es en rien responsable de la mort de Paola. Elle nous a aidé en connaissance de cause, elle avait conscience des risques qu'elle encourait. Ne te sens pas obligée d'aller voir son père parce que tu culpabilises.

—Je ne veux pas aller voir son père par obligation mais parce que j'en ai besoin. Il faut que j'aille le voir pour avancer.

Il me regarde sceptique, ne croyant pas une seconde à mon explication ni au fait que j'arriverai à avancer après ça. Sur ce dernier point je ne crois pas moi-même que j'arriverai à aller de l'avant après une simple visite chez son père mais j'ai envie d'espérer.

— Accompagne-moi si ça peut te rassurer mais j'irai dans tous les cas.

Il soupire et réfléchis pendant quelques secondes puis il passe devant moi et ouvre la porte.

— Allons-y mais ensuite je veux que tu restes alitée comme prévu okay ?

— Oui de toute manière je n'aurai pas d'autres raisons d'en sortir. admis-je souriante et contente qu'il ait accepté.

Nous prenons la route en direction du manoir Bartoni. Nous arrivons rapidement à destination. Revoir le manoir me renvoie à la première fois où nous étions venus ce qui me rend nostalgique et accroît ma culpabilité. Une fois garés, nous toquons à la porte d'entrée. La même domestique que la fois précédente nous ouvre la porte avec une mine triste et absente. Dès qu'elle nous voit, ses joues s'empourprent de fureur et ses yeux nous foudroient.

— Vous, comment osez-vous vous présenter ici ?! crache-t-elle en me fixant.

— Je, je suis venue présenter mes condoléances à Don Bartoni. expliqué-je émue aux larmes.

Je sens Ezio se raidir à mes côtés et placer sa main au creux de mes reins en signe de soutien.

— Vous avez un sacré culot de venir jusqu'ici pour...

Elle n'a pas le temps de finir sa phrase qu'une voix rauque et sans chaleur se fait entendre.

— Régina qui est-ce ?

La réponse se faisant attendre, nous voyons Sergio apparaître dans l'encadrement de la porte. Il reste impassible à notre vue et se ferme instantanément.

— Don Bartoni, je sais que ma présence est loin d'être tolérée en ces murs et c'est totalement compréhensible mais je tenais...

— Vous teniez à quoi ? A me présenter des condoléances qui n'auraient pas été nécessaires si vous n'aviez pas été là ? Vous vous trouvez légitime de vous venger parce que vous coucher avec un fils Madini ? Vous vous sentez intouchable ? Intrépide ? Vous êtes tellement insignifiante et faible que vous êtes venue demander de l'aide à ma pauvre petite fille qui, trop généreuse, vous a suivi. Je n'ai nul besoin de condoléances de la part de quelqu'un qui ne vaut rien et qu'il faut fuir comme la peste. Sans vous le monde serait meilleur, nous étions tous heureux avant que vous ne débarquiez avec vos grands airs et votre ambition de vengeance dont vous n'étiez même pas à la hauteur.

Ezio ne lui laisse pas le temps de continuer.

— Sachez monsieur que votre fille était loin d'être heureuse sous votre toit. Vous ne le saviez peut-être pas mais elle vous cachait sa vraie vie. Cette vie où elle était heureuse, joyeuse, où elle n'avait pas votre pression sur les épaules et où elle n'avait pas besoin de se cacher. Votre fille était épanouie dans les bras de femmes et même si vous l'aviez deviné jamais vous ne l'auriez accepté pour qui elle était. Alors avant de donner des leçons aux autres, réfléchissez bien à votre propre vie et vos propres choix. Paola a fait ses choix de vie et les a assumer jusqu'au bout seulement pas avec vous. Vous ne connaîtrez jamais la vraie Paola et vu votre méchanceté je pense que c'était pour le mieux. C'était son choix de nous venir en aide. Oui nous lui avons demandé mais jamais ne l'avons forcé. Elle savait pourquoi elle le faisait et ce qu'elle pouvait y perdre. Votre fille était courageuse et téméraire. Si vous voulez déverser votre colère et pointer du doigt des personnes non responsables pour la mort de votre fille grand bien vous fasse mais je vous interdis de parler comme vous l'avez fait à ma femme ou de la tenir responsable de choses dont elle n'est pas. Remettez-vous en question avant d'aboyer sur des personnes aux intentions honorables parce que si je me souviens bien, vous vous êtes tellement montré froid, distant et vicieux ces dernières années que beaucoup vous ont tourné le dos, or ma famille dont May, ne vous a jamais jugé et vous ai venu en aide. Depuis la mort de Paola je crois savoir que personne n'est venu vous rendre visite ou vous présenter ses condoléances à part ma femme malgré sa culpabilité et sa honte. Elle a su se rabaisser et mettre ses sentiments de côté pour venir à vous alors que vous ne méritez que votre malheur.

Sur ces mots, Ezio me prend la main et nous rejoignons la voiture. Une fois installés, je prends Ezio dans mes bras et le serre fort.

— Merci infiniment pour avoir pris ma défense devant Sergio. Je ne suis pas sûre que je le méritais mais merci.

Nous nous écartons l'un de l'autre et il prend ma joue dans sa main.

— Personne n'a à te manquer de respect ou remettre en cause la légitimité de tes choix ou de ta présence. Ce n'est qu'un pauvre connard aigri.

— Il est triste et en colère. Je le comprends. Il est toujours plus facile de s'en prendre aux survivants plutôt qu'aux morts. Je ne peux pas lui en vouloir pour ce qu'il m'a dit même si ces mots ont été durs.

— Il ne mérite quand même pas ta sagesse.

Je hausse les épaules et lui souris tendrement. Nous nous embrassons puis rentrons à la maison.

Le Phénix - Consumation [TOME 1]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant