Chapitre 9

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Le reste de la traversée de la montagne se passa dans un calme troublant. Nous n'étions pas poursuivi à proprement parler, plutôt comme surveillé. Nous ne pouvions avancer sans avoir cette étrange impression que des dizaines d'yeux nous suivaient. Nous étions muré dans un silence pesant, ne rendant notre procession que plus inquiétante. J'étais pourtant rassurée par la chaleur de Kian. Nous montions le même cheval et il me serrait contre lui en tenant les rênes. Par moment, quand un bruit le faisait sursauter, il me serrait un peu plus fort. Je me faisais petite pour le gêner le moins possible. En oubliant le contexte dans lequel nous nous trouvions, j'appréciais la balade. La forêt me terrorisait mais je ne pouvais qu'admirer sa beauté sournoise. Elle paraissait si belle de dehors, comment de tels monstres pouvaient ils se cacher à l'intérieur ?

Nous étions enfin passés de l'autre côté. Sans vraiment le ressentir, nous étions maintenant à Itéria. Je ne sais pas vraiment à quoi je m'attendais. A un grand changement peut-être. Pourtant, tout était resté pareil, les mêmes arbres et les mêmes montagnes. Rien de bien différent. J'en étais même plus choquée... Je baissais le regard. Kian avait toujours les mains crispées sur les rênes, alors même que nous étions sorti de la forêt depuis un moment déjà. Je retrouvais avec bonheur les champs calmes et plats. Je posais doucement mes mains sur les siennes. Il sursauta avant de se rassainir. Il relâchait enfin ses nerfs après une semaine de pression constante. Il se rapprocha de moi et me chuchota à l'oreille :

- C'est bientôt fini. On sera bientôt tous en sécurité.

Il ne le vit pas mais je souriais. J'étais persuadée que rien de pire ne pouvait arriver alors... Je ne pouvais qu'être heureuse d'être presque arrivée. Enfin presque... Il restait plusieurs semaines de route mais d'après les dires de Kian, tout serait facile, l'étape la plus compliquée était le passage de la chaîne d'Oklio. La route fut douce et calme. J'étais bercé par le doux son des oiseaux et les mouvements réguliers du cheval. Je finis par m'endormir. Je manquais terriblement de sommeil et ce repos me fit le plus grand bien. Enfin, je me sentais assez rassurée pour dormir.

Quand j'ouvris les yeux, nous étions arrêtés. J'étais assise sur un rondin de bois, la tête posée sur l'épaule de Kian. Il discutait avec le sénéchal et l'un des généraux. Ils parlaient d'escale, de repos. Le prince leur expliquait qu'ils ne pouvaient pas prendre plus de retard, le roi allait s'inquiéter et cela pouvait à tout moment déclencher de nouveau affrontement. Je ne comprenais pas très bien ce qu'ils racontaient, j'étais encore perdu dans mon semi-sommeille. Je me forçais à me concentrer, mais mes paupières étaient trop lourdes et se fermèrent d'elles même. Je m'endormis de nouveau avec pour fond sonore la discussion des Itériens. Je sursautais quand je sentis que je ne touchais plus terre. J'avais l'impression de n'avoir fermé les yeux que quelques minutes mais, visiblement, la discussion était finie. J'ouvris les yeux et rougis en découvrant que Kian me portait. Je cachais mon visage entre mes mains alors que le jeune homme comprenant que je m'étais réveillé, s'excusait. Je ne pus que lui grommeler à travers mes mains que ce n'était pas grave. Il rit. Cela faisait un moment que je ne l'avais pas entendu rire. C'était discret mais c'était sincère. Je rougis encore plus, il riait de moi, pas en mal mais cela me gênait encore plus. Il m'assit sur son cheval et attendit que je me sois bien placé pour monter à son tour. Dans un élan souple, il monta, entourant mon corps de ses bras pour attraper les rênes. Mon cœur battait plus fort, j'espérais que personne ne pouvait l'entendre. Mon dieu... Que m'arrivait-il donc ?

Après quelques heures de trajet, nous arrivâmes en vue d'un village. On ralentit. C'était étrange, de là ou nous étions, nous n'entendions aucun bruit. Comme si le village était abandonné. Un cavalier vint à notre hauteur et chuchota à Kian :

- C'est le village d'Eriso.

Un silence lui répondit. Je ne pouvais pas voir le visage du prince mais au vu de la réaction de son interlocuteur, cela ne lui faisait pas vraiment plaisir. Qu'avait donc ce village ? Kian annonça :

Les roses sont en feuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant