𝐁𝐄𝐓𝐖𝐄𝐄𝐍 𝐓𝐇𝐄 𝐋𝐈𝐍𝐄𝐒 ; 𝑎 𝑠𝑜𝑛𝑔 𝑓𝑜𝑟 𝑎𝑛 𝑜𝑡𝘩𝑒𝑟

✦ C H A P I T R E • D I X - N E U F

MARIBEL'S POV

Alors que Spencer ajuste les derniers détails des équipements, je prends place devant le micro, derrière la vitre. Mes mains tremblent encore légèrement. Ce frisson, ce trouble qui semble désormais faire partie de moi, comme une ombre que je ne peux dissiper à chaque fois que j'entre dans cette salle d'enregistrement. Mais quelque chose a changé. Ce tremblement que j'ai si longtemps vécu comme un obstacle, devient peu à peu une force. Ce stress familier, ce vieil ennemi qui, autrefois, me submergeait, a arrêté d'être une simple menace. Aujourd'hui, il me pousse. Et au lieu de le combattre, je l'accueille.

Les mots que je vais chanter sont les miens, et pourtant, ils semblent soudainement plus lourds, chargés d'une intensité que je ne reconnais pas. « Is It Love ? » n'est plus seulement une chanson. C'est comme si elle avait pris racine en moi, imprégnant chaque pensée, chaque sensation, jusqu'à se fondre dans mes propres émotions. Et c'est troublant. Perturbant, même.  Ce n'est plus simplement ma voix qui s'apprête à sortir du micro, c'est une part de mon âme, un morceau de moi-même que je ne contrôle plus tout à fait.

Je lance un regard furtif vers Spencer à travers la vitre, cherchant un appui dans sa présence silencieuse mais puissante. Il est concentré, les yeux fixés sur le tableau de commandes, absorbé par son rôle. Pourtant, je sens qu'il perçoit mon hésitation, cette tempête intérieure qui s'agite en moi. Il m'encourage, et cela suffit pour que je trouve la force d'avancer.

– Prête ? me demande Spencer à travers le micro, sa voix douce, teintée d'une familiarité qui m'apaise toujours.

Avec toi, toujours, oui.

Je hoche simplement la tête, incapable de formuler quoi que ce soit d'autre. Spencer appuie sur le bouton, et les premières notes de la piste d'accompagnement emplissent la pièce, se diffusant avec cette chaleur familière que je ressens à chaque fois. Je ferme les yeux, cherchant à m'abandonner aux vibrations qui se fondent en moi. Mon cœur se synchronise avec la mélodie, comme si cette chanson était une partie de moi. Mais mes pensées se bousculent, s'entrechoquent. Comment transmettre tout ce que je sens, cette tempête d'émotions et de doutes qui m'envahit ? Comment traduire en mots ce mélange de fragilité et de désir brûlant de réussir ?

Quand je commence à chanter, ma voix est fragile, presque vacillante. Ce premier instant, juste après que la première note ne franchisse mes lèvres, est toujours le plus difficile. C'est là que les doutes se faufilent, comme des ombres que je ne parviens jamais totalement à chasser. Je m'interroge, me demande si je suis à la hauteur, si ma voix saura porter la profondeur de ce que je ressens. Mais à travers la vitre, les yeux de Spencer sont ancrés dans les miens, pleins de cette certitude inébranlable qu'il a toujours. Ce regard me rappelle qu'il croit en moi, qu'il voit en moi une force que je peine parfois à saisir.

Je laisse la musique m'entraîner un peu plus loin, comme une vague qui me submerge. Chaque mot coule de mes lèvres, empreint d'une sincérité brute, comme une confession que je ne pourrais jamais admettre en dehors de cette pièce. Je me sens vulnérable, exposée, mais étrangement forte en même temps, comme si chanter me permettait de toucher quelque chose de plus grand que moi.

Et puis, sans prévention, la musique s'arrête brusquement, me laissant suspendue dans cet instant. Spencer se lève, et je le regarde traverser la pièce pour me rejoindre, sentant mon cœur battre un peu plus vite. Il y a quelque chose dans son expression – une inquiétude discrète, une douceur contenue, mais aussi cette intensité qui me fait comprendre que chaque note, chaque mot, résonne en lui autant qu'en moi.

– T'es sûre que ça va, Bella ? me demande-t-il doucement, son regard scrutant chaque recoin de mon visage. J'ai l'impression que tu as un peu le souffle court.