𝐁𝐄𝐓𝐖𝐄𝐄𝐍 𝐓𝐇𝐄 𝐋𝐈𝐍𝐄𝐒 ; 𝑎 𝑠𝑜𝑛𝑔 𝑓𝑜𝑟 𝑎𝑛 𝑜𝑡𝘩𝑒𝑟

✦ C H A P I T R E • S E P T

MARIBEL'S POV

Je cligne des yeux à plusieurs reprises, essayant de dissiper le léger picotement qui persiste. Mes paupières sont lourdes, mais le sommeil me fuit obstinément. Le chant des oiseaux, à peine perceptible à travers les fenêtres fermées, me rappelle que le monde continue de tourner, même si la lumière du jour peine encore à percer. On pourrait penser qu'il est trop tôt pour se lever à une heure où beaucoup encore se refusent à quitter la chaleur de leur lit.

Les couvertures m'enveloppent dans un cocon de chaleur réconfortante, me protégeant du froid matinal. Pourtant, malgré tous mes efforts pour retrouver le sommeil, il semble me glisser entre les doigts. Je soupire doucement, me retournant pour attraper mon portable. Il n'est même pas encore huit heures. Se lever si tôt un dimanche devrait être interdit.

Résignée, je m'étire, sentant mes muscles encore endoloris se détendre peu à peu. L'appartement est plongé dans un silence apaisant, seulement troublé par le léger bourdonnement du frigo. Je finis par me redresser et m'asseoir au bord du lit, mes pieds glissant automatiquement dans mes chaussons, marquant le début d'une journée inattendue. À peine debout, mes pensées affluent déjà, envahissant mon esprit comme une vague déferlante.

Je repense à mon après-midi avec Spencer, vendredi. Hier, j'étais absorbée par le travail, mais à chaque pause, les souvenirs de nos moments passés ensemble me revenaient en tête, flottant comme des bulles de savon éclatantes. Je me dirige vers la fenêtre, écartant légèrement le rideau pour observer la rue mouillée en contrebas.

Mes pensées reviennent à lui, et ce qui m'a le plus marqué, c'est ce petit tic qu'il a. Il joue souvent avec son piercing, un geste presque inconscient qui semble rythmer ses pensées. C'est étrange, mais plus je l'observe, plus je trouve cela... fascinant ? Chez n'importe qui d'autre, j'aurais probablement trouvé ça gênant, mais avec lui, mon regard est invariablement attiré par ce mouvement, même si je le trouve un peu singulier.

Il y a quelque chose de captivant dans cette habitude, une sorte de fenêtre discrète sur son monde intérieur. Chaque fois qu'il touche son piercing, c'est comme s'il laissait entrevoir un fragment de ses pensées et de ses émotions. Ce geste anodin semble raconter une histoire, révéler une part de lui-même qu'il ne partage pas consciemment. Peut-être est-ce une manière pour lui de se rassurer, de trouver un point d'ancrage dans une conversation. Ou peut-être cherche-t-il simplement à combler les silences avec un geste familier.

Il y a dans ses gestes une sincérité désarmante, une vulnérabilité qui me touche profondément. Cette honnêteté, cette transparence, c'est peut-être ce qui rend ce tic si charmant, si difficile à ignorer.

Au fond, c'est cette authenticité qui me plaît chez lui, cette manière de dévoiler une part de lui-même sans même s'en rendre compte.

Les rues sont désertes, à peine perturbées par le passage sporadique de quelques voitures. La ville est encore plongée dans le sommeil, chaque maison abritant des vies encore enveloppées dans la chaleur de la nuit. Pourtant, me voilà déjà réveillée, l'esprit en ébullition, incapable de s'apaiser. Je ne suis pas certaine d'apprécier cette agitation incessante, mais c'est ainsi : mon cerveau ne trouve jamais de repos. Je me résigne donc à savourer la tranquillité de Wausau avant que le monde ne devienne trop bruyant, trop exigeant.

Ce moment, où je me sens seule au monde, est à la fois apaisant et troublant. Le silence de la ville endormie m'offre une certaine forme de réconfort, une pause bienvenue, comme si je pouvais enfin respirer, libérée de la pression constante des attentes extérieures. Il y a quelque chose de presque sacré dans cette quiétude, une sorte de privilège rare réservé à ceux qui, comme moi, sont éveillés aux heures les plus calmes de la journée.