Nous marchons, les uns aux côtés des autres, comme une famille. Enfin, presque !
Ces rues sont encore plus horribles que celles de notre arrivée. La nuit tombée y joue pour beaucoup. La lueur de la lune et de quelques lanternes éclairent faiblement le sol et les nombreux visages que nous croisons. La foule est aussi dense qu'en journée. Cependant, les gens crient, chantent et se battent plus. Les commerces sont toutefois bien différents des commerces diurnes. Des chariotes font office de restaurants. Les mets sont directement cuits devant les clients. Ces derniers repartent avec leurs plats dans un petit sac. Des vendeurs proposent leurs produits directement dans la rue, sous leur manteau ou dans une petite ruelle écartée. L'un d'eux m'approche :
— Bijour Madmoiselle ! Tu veux un Chianor pas cher ? Comme neuf ! Cent cinquante doros seulement.
— Bonjour. Excusez-moi mais je ne sais pas ce qu'est un Chianor !
— OKAY, Madmoiselle veut négocier. Alors je peux te laisser ces magnifiques bijoux d'oreilles en or massif véritable avec le sac pour cinquante doros de plus.
Il expose dans sa main de petites pierres dorées, avec de magnifiques gravures. Elles sont trop belles.
— Wouaouw ! Comme ça brille !
J'avance ma main vers ces merveilles quand Peet saisit mon bras, me pousse derrière lui et rétorque :
— Laisse tomber amateur ! Nous ne voulons pas de tes pacotilles recouvertes de peinture dorée. Va arnaquer quelqu'un d'autre, OK ?
— Occupe-toi de tes affaires, blaireau ! C'est à la dame que j'cause !
Aïto vient se positionner juste derrière moi et Peet. Son ombre recouvre totalement notre petit vendeur de nuit.
— Ok, j'vous laisse à vos affaires. Les clients sont toujours rois quand ils ne sont pas pigeons !
Il s'en va comme il est venu, mystérieusement.
— Je les trouvais très beaux ces bijoux ! affirmé-je pour sa défense.
— Tu n'aurais peut-être pas dis pareil de ses bijoux de famille ! ricane Peet.
— Ah bon, tu crois qu'il vend les bijoux de sa famille ? C'est triste ! S'il en est là, c'est peut-être qu'il en a besoin. Il doit être dans une mauvaise situation et si nous avions acheté ces belles boucles, nous l'aurions aidé dans un sens !
— Rah, les gonzesses ! Prête à tout pour des bijoux ! Allez, suivez-moi. Je vous emmène dans mon endroit favori. Il y a de quoi se restaurer, se désaltérer et s'amuser !
Il donne un coup de coude à Aïto qui reste sérieux.
— Rooh, allez, quoi ! Je suis sûr que cela fait longtemps que tu ne t'es pas détendu mon pote !
Après un râle de notre ami, nous nous dirigeons vers une porte rouge où un serpent est dessiné dessus. Une petite trappe s'ouvre et un homme dit :
— Mot de passe !
— Paye tes dettes ou perd la tête ! jubile Peet.
La porte s'ouvre alors et une musique assourdissante en sort.
Je me tiens les oreilles et lance :
— Mais qu'est-ce que c'est que ça ?
— La vraie vie, ma belle ! hurle Peet joyeusement en nous poussant tous à l'intérieur.
Il fait très sombre. Des lumières rouges, bleues et jaunes vacillent dans toute la pièce. Le centre de celle-ci est bondé de danseurs qui se trémoussent. Des couples se frottent sensuellement alors que des groupes d'amis, certainement, sautent dans tous les sens en se bousculant.
Un bar, qui occupe trois des quatre murs, est animé par des danseuses qui se tiennent debout dessus, pendant que les serveurs et serveuses courent et hurlent pour prendre les commandes.
— Oh, nom de... ! je n'ose le dire. Mais où sommes-nous ?
— QUOI ? aboie Peet.
— Mais c'est quoi cet endroit ? je monte le niveau afin qu'il m'entende.
— Cela s'appelle un CLUB ! On vient ici pour se détendre, boire un coup entre amis, s'amuser et danser. Alors détends-toi et profite !
Il pose ses mains sur mes hanches et me fais balancer de droite à gauche. Je le repousse. Je n'ai jamais dansé devant des gens. Il m'arrivait souvent de me défouler seule dans le champ, à la musique du vent, mais cela s'arrête ici.
Aïto nous fait signe de monter.
Nous empruntons des escaliers, tout à fait basique, pour atteindre une salle plus petite, moins bruyante, où des tables sont disposées.
La chaleur du bois des chaises vient réchauffer les parties de ma peau que ma robe ne couvre pas.
Mon regard n'arrive pas à se fixer. Il est sans arrêt attiré par des passants ou une lumière, ou bien des cris. Peet a raison, cela devient enivrant. Peut-être que si nous avions ce genre de club sur notre île, alors les jeunes pourraient s'amuser entre eux au lieu de travailler.
— Alors, vous buvez quoi, les novices ? Je ne parle pas pour toi Aïto, cela va sans dire !
— Oh, hum, de l'eau, s'il te plaît !
Peet reste inerte suite à ma réponse. Aïto pouffe de rire.
— Alors, non, je suis désolé Princesse, mais ici on boit tout sauf de l'eau. Je te commanderai un truc pour nana. Bière pour mon ami ! Et la Petite Beauté désire ?
Neira mime la boisson qu'elle souhaite. Elle a l'air de cueillir des fruits et de les écraser violemment. Sûrement un jus de fruit.
— Un vin raffiné pour une beauté sublime ! il ponctue son compliment d'un clin d'œil et redescend jusqu'au bar.
Son absence paraît longue d'un coup. Quand je fixe Aïto, il détourne le regard, évitant ainsi de me parler. Neira est sous le charme de Peet, ses pensées doivent toutes converger en ce sens.
Peet apparaît à nouveau. Neira sourit bêtement. Je ne comprends pas ce qu'elle lui trouve.
Il pose deux gobelets en bois énormes, un face à Aïto, l'autre pour lui-même. Bonsoir la politesse ! On ne se sert jamais avant ses invités. Puis il repart et revient dans la foulée avec un joli verre rond sur un fin pied en verre bleu. Le liquide qui le rempli est rouge écarlate. Il pose ce dernier devant Neira. Puis il dépose enfin le mien. Le récipient est en verre aussi. Il a une forme de huit sur un tout petit pied. Une petite ombrelle le protège mais le plus bizarre reste la couleur de ma boisson : elle est de plusieurs teintes. Plutôt rouge en haut, elle devient orange au milieu et se termine en jaune. Elle ressemble à un coucher de soleil. Je laisse échapper un petit sourire que Peet ne manque pas :
— Voilà, tu aimes seulement au visuel ! C'est bien un truc de gonzesse !
Alors que tous avalent leur première gorgée sans crainte, je commence par sentir la mixture. Aucune odeur ne m'est familière. Je trempe ma lèvre supérieure. Au contact du liquide, un léger frisson me parcourt. Les quelques gouttes avalées m'ont l'air agréable, alors j'ingurgite une gorgée plus conséquente mais quelque chose de très fort me fait avaler de travers. Je tousse, essayant de ne pas cracher sur Peet qui me fait face. Il s'en aperçoit :
— Ola, Princesse, mollo sur la boisson. Ça se sirote ! Pas de cul sec avec ça !
— Sirote ?
— Oui, avec la pa-paille,..., le truc long en forme de tube qui se trouve dedans. Tu aspires et le jus monte !! Enfin, tu vois quoi !
Il rit bêtement. Je n'ai pas compris sa remarque, mais visiblement Aïto oui, et cela ne lui a pas beaucoup plu puisqu'il lui met une baffe derrière la tête.
— Quoi ? Avant tu rigolais à ce genre d'humour !
Nous sommes interrompus par une voix qui s'élève dans notre direction :
— PEET L'arnaque ! Te revoilà !
Il se retourne pour voir qui l'interpelle. Son visage se durcit alors.
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L'Odyssée de Néphaé
Fantasy"Je m'appelle Néphaé et j'ai 16 ans. Je suis encore bien naïve mais je me pose des tas de questions depuis toujours, surtout depuis que j'ai appris que je suis adoptée. Mon seul but maintenant est de retrouver mes parents biologiques. Je me suis lan...