Chapitre 7

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Luna, 14 ans.

Lilly me parle mais je n'entends pas vraiment sa voix. Mes pensées sont encore chamboulées par la décision de mes parents et du lycée de Coubleau. Je viens à peine de faire ma rentrée en première année au lycée qu'on me transfert dans un autre établissement. A la rentrée des vacances de novembre, je vais devoir tout recommencer depuis le début. J'avais pourtant pris mes marques...

Certes je restais la plupart du temps seule ou confinée dans l'immense bibliothèque mais j'avais pris mon rythme. J'avais dû quitter Lilly en quittant le collège de Solanches et maintenant je devais quitter mon frère en quittant le lycée. Tout ça parce qu'on gâche mon haut potentiel en me laissant pourrir dans un lycée « normal »? Papa a essayé de me rassurer en me disant que Saint-Anne est un établissement honorable qui pourra enfin répondre à mes attentes... Il ne comprend pas que mes attentes sont de vivre simplement et tranquillement. Mon frère n'est pas encore au courant. Bien évidemment, j'en ai parlé à Lilly à la minute où j'avais quitté le bureau du principal. Selon elle, c'est une occasion en or de ne plus m'ennuyer en cours. Elle comprend cependant que je n'aime pas que l'on chamboule mes habitudes et que l'inconnu m'effraie. Je n'ai pas craint sa réaction puisque nous avions déjà été séparé scolairement parlant...

Je ne sais pas comment va réagir mon frère quand je lui apprendrais que j'irais étudier ailleurs, loin de lui. Saint-Anne est à une heure de Solanches mais mes parents m'ont soufflé qu'il n'y aurait aucun mal à ce que je sois en internat pour profiter des activités extra-scolaires proposées. Par curiosité j'ai regardé les différents clubs et mon regard s'est attardé sur un club de théâtre. Le programme parlait de sorties pour assister à des représentations, d'études de textes et d'autres choses qui me faisaient rêver. Il y avait également un club de lecture qui proposait régulièrement des rencontres avec des maisons d'édition ou des auteur.e.s.

Mon cœur flanchait. C'était égoïste de ma part de désirer rester dans cet établissement et abandonner ma famille et mes amis. Pourtant, plus le temps passait, plus je m'imaginais assister à ces clubs... le problème c'est que ces clubs se font dans les soirées, quand le bus scolaire ne passe plus bien évidemment. Hors de question qu'on vienne me chercher tous les soirs à pas d'heure pour mes caprices. L'internat semblait une bonne alternative.

« Lu ?

La voix de Lilly me sort de mes doutes et je me rends compte qu'elle m'a posé une question que je n'ai pas écoutée. Elle me fixe et comprend que j'étais perdue dans mes pensées.

_ Pour la soirée ce soir ! Elle reprend avec un sourire surexcité. Qu'est-ce que tu en dis ?

Nous sommes en camp de vacances. Habituellement, nous n'y allons qu'en été puisque les activités proposées sont plus intéressantes mais Lilly était forcée d'y aller alors je l'ai accompagné. Et puisque j'avais décidé d'y aller, mon frère m'avait accompagné. Il avait même convaincu Eden de venir. Le groupe infernal...

Depuis quelques mois, Lilly est devenue très populaire. Son corps a beaucoup changé pendant les vacances d'été et sa beauté n'est pas passée inaperçue à la rentrée en septembre. Son corps est plus élancé et les formes de ses seins et de ses hanches plus prononcées. Son visage d'ange a laissé place au visage de la tentation luxuriante. Consciente de sa beauté, elle en joue énormément et aimerait que je suive le mouvement. Hors de question. Si je ne savais pas cela normal, j'aurais honte de l'évolution de mon corps. J'ai dû jeter tous mes jeans à cause de mes hanches volumineuses et je suis obligée maintenant d'acheter des soutiens-gorges. Adieu brassières confortables et discrètes, bonjour armatures douloureuses et poitrine compressée dans un étau de tissus. Sans déconner ! J'ai découvert qu'on pouvait transpirer sous les seins ! Comme si avoir ses règles n'était pas suffisant, il fallait qu'on nous rajoute ça avec les crises d'hormones, les cuisses qui brûlent quand elles se frottent et le dictat sexiste qui nous impose àde nous épiler parce que « Bouh des poils sur les jambes d'une femme c'est dégoutant. Alors que monsieur, lui, peut ressembler à un grizzly recouvert de dreadlocks fait ses propres poils, c'est normal ? »

La couleur que je haisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant