Chapitre 5

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Eden, 16 ans.

Dans la salle du réfectoire, je déguste mon petit déjeuner, un sourire en coin. Lilly vient de nous rejoindre avec son plateau et Alex cherche sa sœur dans la file d'attente. Son regard se dirige vers moi, intrigué. Il demande à Lilly si Luna arrive mais la seule réponse qu'il obtient est un haussement d'épaules. Heureux de ma ruse, je croque dans mon croissant à pleine dent.

Nous sommes en camp de vacances. La petite ville de Solanches propose un centre pour les enfants de la ville pendant les vacances d'été permettant aux parents de travailler sans se soucier de leur progéniture. C'est la première fois que je côtoie ce genre d'association. Pour finir le mois d'août, on nous a emmené dans un camp en plein milieu de la forêt où un lac se trouve à quelques minutes de nos chalets. Il s'agit d'un séjour de deux semaines où nous pouvons faire de l'accrobranche, du sport, aller nager dans le lac et plein d'autres activités. Les animateurs sont cools. Le seul point négatif est le couvre-feu... surtout pour des ados comme Alex et moi dont le regard s'attarde désormais sur les formes de nos comparses féminines. Pourtant ce soir, une fête se tiendra vers l'étang. Notre camp se trouve seulement à vingt-cinq minutes d'une ville avec un lycée tenant un internat. Ils nous ont invités à leur fête pendant qu'on faisait les courses dans la superette du coin. Alex a fait passer le mot à tous les plus de quinze ans. Il a repéré deux filles sublimes dans le groupe des hôtes dans le magasin et on a bien l'intention de s'amuser. Ce dernier continue de s'agiter sur son banc à la recherche de sa frangine.

Elle ne risque pas de venir. Pas après le coup que je lui ai fait ce matin... un simple remerciement pour avoir mis du slime avec du colorant blanc dans toutes mes chaussettes propres. Tout le monde a pensé que j'avais utilisé mes chaussettes dans un autre but que de les porter au pied... surtout quand certaines étaient également remplies de nouilles cuites. Par manque de temps je n'ai pas pu trouver quelque chose d'aussi ingénieux qu'elle mais le résultat sera une réussite. Hier soir, alors qu'elle était en train de nager avec Lilly et son frère avant le rassemblement pour l'appel, je me suis faufilée dans son chalet pour introduire de la farine dans son sèche-cheveux et mettre un peu de javel dans son shampoing pour décolorer sa tignasse brune.

Ça fait un an que notre guerre est déclarée. Depuis le jour où j'ai rencontré ses parents en fait. J'avais envie de voir ses réactions que je trouvais hilarantes. Ce que je ne savais pas à l'époque, c'est qu'elle allait me rendre coup pour coup. Finalement, elle a rendu le jeu encore plus intéressant. Cette gamine a une imagination débordante ! Juste pour ça, je la respecte énormément même si je ne compte pas le lui dire.

« Qu'est-ce que tu as encore fait ? Me demande Alex en voyant mon excitation débordante.

Alors que je m'apprête à lui expliquer, je remarque une longue et sublime tignasse bouclée entrée dans la pièce. Je cligne des yeux pour être sûr que ce ne soit pas une hallucination. Le rire que j'entends me prouve qu'elle est bien réelle. Elle prend son plateau comme s'il ne lui était rien arrivé, se sert et s'assoit pile en face de moi, le sourire pliant ses joues rondes. Elle n'envisage même pas de me regarder et parle avec Lilly comme si je n'existais pas. Je l'analyse essayant de trouver un résidu granuleux de farine ou la moindre trace d'une décoloration mais rien. Ses cheveux sont parfaits comme à leur habitude et son visage ne semble pas le moins du monde irrité.

_ T'étais où ? Alex lui demande, les sourcils froncés.

Luna le regarde, hausse simplement les épaules avant de répondre avec nonchalance.

_ Je prenais juste une douche. »

Son frère semble s'accommoder de sa réponse mais pas moi. Quelque chose n'est pas normal. Toujours choqué par son comportement, je continue de l'observer mettre de la gelée de coing sur sa tartine beurrée et je distingue l'esquisse d'un sourire en coin sur son visage. Mes yeux s'arrondissent quand elle croque à pleine dent sa tartine en rivant son regard dans le mien. Pour ne pas être compris des autres, Luna et Alex parlent en espagnol. Avec moi, il n'y a pas besoin de mots... Les regards que nous échangeons suffisent et à cet instant, je sais qu'elle sait. Seulement elle sait aussi que je ne sais pas ce qu'elle sait et ça me rend dingue. J'ouvre la bouche mais aucun son ne sort quand soudainement une fille entre en hurlant. Le sourire de la peste devant moi s'intensifie alors que ses sourcils se réhaussent de défis. J'ose poser un regard derrière elle et je comprends.

La couleur que je haisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant