Luna.
En plein footing, je me concentre sur mes foulées dans le quartier Janin à trente minutes de chez moi. C'est un circuit que j'ai l'habitude de faire. L'avantage c'est que le quartier possède un parc sportif pas très loin où il m'arrive de courir de temps en temps. Je regarde le ciel parfaitement dégagé et me dit que je peux justement m'y rendre. Ça sera un bon moyen d'évacuer toute la tension depuis vendredi.
Après l'aveu de mon frère vendredi soir, j'ai passé ma nuit à ressasser le fait qu'Eden avait gardé contact avec tous ses amis sauf moi. Inutile de préciser que le lendemain, j'étais d'une humeur massacrante. Alex a cru que j'allais l'éviscérer avec un stylo à plume parce qu'il riait trop fort en regardant ses vidéos Tik Tok débiles à côté de moi. Pendant que je corrigeais des copies. Par ailleurs, je n'arrivais pas à manger ... jusqu'au samedi soir où l'instinct de survie – et surtout ma gourmandise – ont repris le dessus. J'ai dû m'enfiler une plâtrée de pâte sous l'œil méfiant de mon frère et amusé de ma meilleure amie. Seulement, me noyer dans mon travail ou dans la bouffe n'est pas une solution.
Courir m'aide à penser à autre chose, délier la tension de mes muscles. Pour moi, la fatigue physique entraîne la fatigue mentale. C'est ce don j'ai besoin... Car je ne veux pas penser à demain, à lundi quand je vais retourner au lycée et revoir Eden.
Vendredi soir, la première émotion qui m'est venue était bien évidemment la colère. C'est toujours celle-ci qui apparaît en premier puis au fur et à mesure j'ai ressenti une profonde tristesse. Ces deux émotions mélangées ont finalement ouvert quelque chose que je ne pensais pas ressentir : la déception. Il était difficile de me faire ressentir une telle chose... Avec le temps j'ai appris à ne rien attendre des gens. Si j'ai des attentes, je les remplirais moi-même. Même mes relations amoureuses passées ne m'ont jamais déçues. J'en étais désintéressée mais jamais plus. Un ex qui m'a trompé ? Tant pis j'avais toujours insisté pour qu'on mette la capote donc je ne risquais pas de chopper un truc. Une amie qui a dévoilé mon secret ? Elle a simplement disparu de ma vie et une vérité avait simplement été révélée. Mon frère qui me cache une vérité pendant dix ans sur le garçon que je pensais être un rival ? Pardonnable. Ce fameux rival qui disparait en refusant de me parler ? Décevant.
En repensant à ça, je me rends compte que j'ai accéléré dans ma course et que je ressemble à une poule sous amphétamines qui tente de fuir le renard qui la course pour la bouffer. Je décide de ralentir pour finalement m'arrêter. Mon cœur s'affole et ma respiration est si courte que ma poitrine convulse à chaque respiration. Les mains sur les hanches, je me concentre sur ma respiration en marchant doucement... Calmée, je regarde autour de moi et me rend compte que j'ai traversé le parc sportif pour me retrouver dans un quartier que je ne connais pas vraiment. Je suis à une heure et demie de chez moi et je me demande si j'aurai l'énergie de faire le trajet inverse. Je déambule pourtant dans la rue en inspectant le coin. De toute évidence, je suis tombée dans un quartier plus professionnel : des immeubles, des immeubles, des banques, des fast-foods, des centres commerciaux et encore des immeubles. Les rues sont assaillies par les passants et ce simple fait me donne l'envie de rebrousser chemin.
Je m'apprête à retourner dans le parc quand le bruit d'un moteur retentit avec fracas. Ce grondement me fige et mon système nerveux m'envoie des alertes. Je sens mes yeux s'écarquiller alors qu'un frisson d'horreur me parcourt la nuque. Des sueurs froides dévalent le long de mon dos et je sens la force de mes jambes me quitter peu à peu. Ma vision se brouille même si je tente de concentrer mon regard sur un point fixe. Je tangue alors je tends la main pour me soutenir à la grille présente devant moi mais je vois trouble et je manque ma cible ce qui provoque ma chute. Mes genoux s'écrasent douloureusement sur le bitume. Le bruit du moteur assourdissant se rapproche tout comme les images défilant en flash sous mes yeux. Je ne peux plus respirer et ma gorge se comprime. L'étau de fer se resserre autour de mon cou avec fureur. Quand le grondement mortel résonne derrière moi, un cri étranglé rugit de ma gorge irritée. Un son aigu mêlé à celui de la moto résonnent dans mes oreilles et je dois plaquer mes mains sur elles pour amenuiser le bruit. En vain. Le bruit qui me déchire n'est pas celui de la réalité mais celui de mon souvenir. Peu importe, je continue de serrer mes mains sur mes oreilles en hurlant, plaquant ma tête sur le l'asphalte.
VOUS LISEZ
La couleur que je hais
RomanceJe déteste le bleu. Pas le bleu du ciel, le bleu de l'eau ou le bleu que les gens peuvent faire porter à leur bébé. Je hais un bleu en particulier. Un bleu froid qui me brûle la peau. Un bleu calme et serein qui électrise mes sens. Un bleu aux écl...