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— Si je m'étais attendu à ça ! s'exclame enfin Thylan.

Pendant que les quelques spectateurs applaudissent, laissent quelques pièces au duo d'artistes, et les félicitent pour leur prestation, Naël tente de comprendre comment ils en sont arrivés là. S'il avait imaginé ce matin que sa journée se déroulerait ainsi... Thylan vient de bousculer son quotidien d'une manière bien inattendue. Thylan, lui, se remet de ses émotions. S'il avait su que le petit blond rencontré la veille, s'avèrerait être un musicien aussi talentueux.... Naël vient de faire une entrée fracassante dans sa vie.

Et alors que Naël dépose son violon, sous le regard émerveillé d'un petit garçon curieux, Thylan ferme les yeux une seconde, se sentant partir. Juste avant qu'il ne s'endorme, le jeune homme s'asseoit contre le mur. En un instant, il n'est plus là.

Heureusement pour lui, après plusieurs années à vivre en tant que narcoleptique, il sent venir les moments d'épuisement, les moments où son corps se met sous tension. En plus, avec ses médicaments, il gère mieux. Il a quelques secondes pour se poser correctement, avant que son corps ne lâche. Ces épisodes de sommeil peuvent durer de quelques secondes à une demi-heure. Et là, Thylan espère que la crise ne va pas durer.

— Je peux jouer ? demande le petit garçon en tirant sur le tee-shirt de sa mère.

Gêné, Naël préfère faire comme s'il n'avait pas entendu. Très conscient de l'enfant curieux qui s'approche de lui, ses épaules se contractent et il sent ses joues s'empourprer.

— Euh... Il est très fragile tu sais, répond–t–il sans regarder le garçon, un léger tremblement dans la voix.

Concentré sur son malaise et son envie de disparaître tout à coup, Naël ne voit pas Thylan recroquevillé dans son dos, la tête coincée entre ses bras.

— Quelle formation avez-vous fait ? s'enquiert la mère. Lucas cherchait un instrument à apprendre et je crois que vous l'avez convaincu.

La conversation occupe suffisamment Naël, qui se force à répondre une nouvelle fois et qui du coup n'a que le temps de jeter un coup d'œil furtif vers son camarade de musique. Au bout d'une bonne minute, Thylan émerge et se relève difficilement.

— Ça va bien ? lui demande Naël quand la mère et l'enfant partent, soudain plus serein.

Thylan semble un peu perdu mais sans doute pas autant que Naël qui ne comprend pas la situation.

— Oui, je vais bien, élude Thylan.

Peu de personnes savent pour sa narcolepsie : ses parents, sa sœur, Lanna bien sûr, et quelques personnes de l'administration de son école et de son travail. Thylan garde ce secret pour lui dès qu'il le peut, de peur d'être jugé... Un peu comme maintenant.

— J'ai juste eu une semaine rude et je n'ai pas beaucoup dormi la nuit dernière.

— Ce qui t'empêche de chanter plus souvent, se remémore Naël.

— Tu t'en souviens...

— Ça t'étonne ?

Un peu gêné, Thylan baisse légèrement les yeux tout en esquissant un sourire reconnaissant.

— C'est plutôt rare que les gens fassent attention à ce genre de détail. Surtout que ce n'était pas le coeur de notre discussion hier.

— Et je me souviens aussi ne pas t'avoir parlé de moi. Comment m'as-tu trouvé ? lance Naël, avec un soupçon de défi dans la voix.

Pris en flagrant délit, Thylan n'a pas réfléchi à cette question. Il pourrait balancer Lanna mais expliquer pourquoi il voulait venir le voir, c'est autre chose. Le jeune homme bafouille en imaginant la réponse la moins bizarre.

MelodyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant