Tout cet après midi à discuter de tout, et surtout de rien, leur fait du bien à chacun. Ils discutent de la rencontre entre Lanna et Thylan jusqu'à leur vie actuelle. Naël apprend qu'ils sont amis depuis le primaire, et inséparables depuis ; qu'ils n'ont même pas voulu étudier séparément et qu'ainsi, ils se sont retrouvés ensemble à l'ICD International Business School de Paris, contrant tous les pronostics ; qu'ils n'avaient aucun autre moyen que de trouver une colocation, sinon ils seraient devenus fous, selon les dires de Lanna. Ils racontent la vie ensemble, leurs engueulades, leurs soirées pyjama et pizza, et Naël sent une larme monter malgré lui.
Voyant une certaine désolation dans les yeux bruns du violoniste, Lanna décide de changer de conversation, mais malheureusement, ses lèvres ont été plus rapides que sa tête, et sa question n'a pas l'effet escompté.
— Ça fait longtemps que tu es à Paris ?
Thylan se fige, contractant la mâchoire, parce que la question est loin d'être anodine, et sous-entend qu'elle aimerait savoir pourquoi il est à la rue. Naël se doutait que le sujet arriverait à un moment ou un autre, et jamais il n'a eu honte de sa condition. Comme il l'a dit à Thylan quelques semaines plus tôt, il est sans-abri, et ce n'est pas un gros mot.
— Je n'ai pas de tabou Lanna. Soit honnête, ne t'arrête pas maintenant. Quelle est la question que tu te poses ? La vraie ?
Elle hésite une seconde, le temps de jeter un coup d'œil à Thylan, qui avec ses yeux, l'incite à ne pas poursuivre. Mais c'est plus fort qu'elle, elle veut savoir.
— Pourquoi tu es à la rue ?
— Pardon, chuchote Thylan, sachant que Naël a déjà eu du mal à se confier à lui.
Mais Naël ne se stoppe pas à cela, il se dit que raconter son histoire soulagera son esprit.
— Je suis venu pour le violon, commence-t-il, captant l'attention du groupe. J'ai toujours rêvé de rentrer au Conservatoire International de Paris. Un rêve de petit garçon. Pour mes parents, je devais assurer mes arrières, faire des études "classiques" avant de me lancer pleinement dans mon rêve. Je ne l'ai pas très bien pris et quand mon père a dit "On paye, on choisit." C'était la goutte d'eau. J'ai toujours suivi ma voie, refusant que quiconque me dicte mon avenir. Alors une nuit, je suis simplement parti. J'ai pris un billet de bus pour Paris.
Thylan et Lanna écoutent attentivement l'histoire de Naël, à la fois triste et si normale, si commune. Le chanteur sent les battements de son cœur s'affoler à entendre son ami raconter son courage. Lui qui n'aurait jamais pu prendre de tels risques, il admire Naël pour ce qu'il a fait.
— Arrivé ici, j'ai commencé mon second cycle de violon au Conservatoire, poursuit-il. À la fin de la première année, un de mes professeurs m'a poussé à tenter des auditions. Mais ça n'a pas marché. L'échec m'a démoralisé. J'étais descendu si bas... que je n'avais plus l'occasion de remonter la pente. J'avais mis toutes mes économies dans mes frais scolaires et mon loyer. Quand j'ai perdu mon job étudiant, je n'avais plus de quoi vivre. J'ai fini par tout perdre.
Lanna imagine sans mal ce qu'à pu vivre Naël. Seul, abandonné par ses parents. Thylan qui a déjà entendu une partie de l'histoire, sent ses yeux s'humidifier de chagrin. Il aurait tant voulu être présent pour son ami, pour ce garçon si fort, si intrépide, qui mérite bien plus que ce que la vie lui a offert jusque là.
— De ce que Thylan m'a raconté, intervient Lanna, tu es un violoniste de talent. Ils ont fait une erreur en te refusant, et tu leur montrera un jour ce qu'ils ont perdu !
— C'est déjà prévu, lâche Naël, un soupçon de fierté dans les yeux.
Mais avant qu'il n'est pu exprimer le fond de sa pensée et éclairer la lanterne de Thylan, Lanna enchaîne, en attrapant les deux garçons par les épaules.
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Melody
RomanceNaël et Thylan mènent des vies toutes tracées. Leurs études touchent à leur fin et une carrière les attends sagement. Cependant, Naël, talentueux violoniste, voit ses rêves s'effondrer lorsqu'il enchaîne les refus, jusqu'à perdre tout espoir et se r...