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Le printemps s'est enfui à une vitesse vertigineuse. En cette fin juillet, la chaleur devient étouffante à l'extérieur, le soleil transforme les rues parisiennes en fournaises, et Naël profite presque tous les jours de la colocation.

La première nuit passée dans ce canapé-lit, Naël a saisit que rester ne signifiait pas accepter la main tendue de Thylan ou Lanna, mais bien écouter son cœur qui lui indiquait que tout ce qu'il voulait se trouvait là, entre ces murs. Ça... plus le fait que Thylan ait éprouvé l'envie qu'il reste avec une sincérité que Naël a trouvé touchante. C'était le mois dernier. Alors Naël n'acceptait de venir que deux fois par semaine. Petit à petit, c'était dès que Thylan ne finissait pas trop tard, puis tous les soirs, et presque toutes les nuits.

Mais avec la canicule qui s'installe, le "presque" n'est plus d'actualité. Naël a risqué une forte insolation la semaine dernière, et il a rarement eu aussi peur pour sa vie et celle de son chien. Même sa "grotte" au bord de la Seine ne lui permet pas de profiter d'un peu de fraîcheur, ce qui est loin d'être le cas du petit appartement de Thylan et Lanna, en rez-de-chaussé, à l'ombre des arbres, et protégé par de nombreux immeubles. Là, le thermomètre dépasse rarement les 28 degrés. Juste ce qu'il faut pour Naël et Thylan, déjà trop pour Lanna.

— Sérieux Lanna, tu peux pas t'habiller correctement ? réclame le chanteur sans lever le nez de son carnet.

Cette dernière sort de sa chambre en short et brassière de sport, laissant apparaître au grand jour sa plastique déconcertante, et surtout la beauté de son bronzage.

— J'ai chaud. Et je suis habillé décemment. On est en intérieur quoi ! Si je voulais me balader à poil, je le ferais.

Naël n'entre pas dans la conversation. Non seulement Lanna fait bien ce qu'elle veut tant qu'elle ne lui impose rien d'irrespectueux, mais en plus, il sait très bien que quand Thylan et elle rentrent dans ce type de discussion, cela ne sert à rien d'ajouter quelque chose, car chacun campe sur ses positions.

— Avec moi oui, parce que je ne dis rien. Mais nous ne sommes pas seuls je te le rappelle.

— Comment je pourrais oublier Naël ? Il est le soleil de mes jours, les étoiles de mes nuits, une ode à la musique, un...

— Rien que ça ? s'étonne le concerné, tout sourire.

Lanna vient se placer derrière lui, le visage rieur, alors qu'il est assis sur un tabouret, et lui donne une accolade plutôt bourrue qui coupe presque le souffle à Naël. Il a appris à faire confiance à ses sautes d'humeurs et ses envies de contact physique. Lanna est comme ça, il l'a accepté, et maintenant, il apprécie même ces gestes amicaux, quitte à lui en rendre un peu. Comme à présent, où il attrape son avant-bras, de sa main libre, pour le serrer doucement.

— Je peux vous laisser seuls tous les deux si vous le souhaitez ? enchérit Thylan, visiblement dérangé.

— T'en fais pas mon p'tit moineau, tu resteras toujours mon préféré. Néanmoins, si je dois me marier avec l'un d'entre vous, je préfère ces yeux bruns.

— On se détend tous les deux, clame Naël, un peu moins à l'aise à chaque mot. Pas de pression, je n'ai pas l'intention de me marier avec qui que ce soit.

— J'te plais pas c'est ça ! J'suis trop vieille ! s'exclame Lanna avec une fausse absurdité, la main sur le cœur comme si Naël venait de lui arracher la flèche de Cupidon violemment.

Bien entendu, les deux garçons savent très bien qu'il s'agit là d'une des meilleures comédies de la jeune femme. Bras sur le front, main sur la poitrine, elle joue à merveille la fille reléguée hors du cœur de l'homme de ses rêves. Mais chacun dans cette pièce sait que c'est un jeu, une bêtise entre amis, un plaisir de Lanna pour taquiner Naël, et Thylan, par la même occasion. La demoiselle poursuit sa comédie devant les deux garçons hilares.

MelodyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant