Partie 3; Chapitre 1

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Je ne sais pas comment se terminent les Jeux. Je ne réalise pas que j'ai gagné, je ne vois pas venir l'hovercraft pour récupérer les cadavre de Thread et Odinah. Tout ce que je vois c'est le sang d'Hunter qui éclabousse mon visage, les cheveux de Laïley recouvrant son cadavre, le poison qui coule que les lèvres tremblantes de Joshua.

Pendant des jours et des semaines je tue Thread, Jaffery, Loraleen, le garçon du district neuf dont je ne connais même pas le nom...Les ours reviennent me torturer et je les supplie de me tuer, de me laisser mourir pour que ce cauchemar prenne fin. Je ne veux plus gagner. Je ne veux plus revenir dans un deux où il n'y aura plus d'Hunter. 

Je veux mourir. Je vous en prie laissez moi mourir.


Je me sens flotter, plus légère qu'un nuage. La douleur n'est plus qu'un lointain souvenir. Mes blessures disparaissent et je renais.


Quand j'ouvre les yeux je suis dans une chambre d'hôpital, entièrement blanche. Pas de fenêtre. Pas de porte. Je suis allongée sur un lit, et j'aperçois des liens sur les côtés. Je ne suis pas attachée cependant. Pas de vêtements à l'exception d'une fine chemise bleue pâle. Des fils me relient à une machine émettant un bip continu à l'avant du lit.

 Est ce cela un hôpital?  Où suis-je morte malgré les efforts des médecins du Capitole?

Je froisse mes cheveux propres, surprise de les voir aussi soyeux et brillants, agacée de l'espèce de torpeur qui engourdit mes membres, mes pensées. La peau de mon épaule est comme neuve, il ne semble plus y avoir une seule trace d'égratignure sur mon corps. Un peu tremblante, je soulève la chemise: une cicatrise argentée barre mon ventre, je sens des rayures boursouflées dans mon dos. Ainsi il y avait des limites à la magie de la médecine, même ici. Au moins je n'ai perdu aucun membre. Un peu perplexe je constate qu'on a limé et poli mes ongles. C'est bizarre de voir mes doigts blancs et propres.

Un pan du mur s'écarte avec un léger bruit, m'arrache à ma contemplation. C'est un muet, chargé d'un maigre plateau repas. Un bouillon vert clair et une compote de pomme. Hunter aurait fait un scandale.

J'essaie de me redresser mais mes coudes rouillés ne supportent pas mon poids et une douleur lancinante reprend mon ventre, m'arrachant malgré moi un gémissement. Le muet remonte le lit d'hôpital grâce à une petite télécommande sur la table de nuit que je ne pouvais pas atteindre. Puis ils se penche et me fait carrément manger à la petite cuillère, comme un bébé. Je comprends rapidement pourquoi je n'ai pas le droit à plus de nourriture: j'ai l'impression que mon estomac a rétréci aux dimensions d'une noisette.

-Combien...de jours? demandais-je d'une voix un peu rauque.

Le muet lève cinq doigts. Presque une semaine.

-Encore longtemps?

Il eut un espèce de rictus qui aurait pu passer pour un sourire et roula son doigt une fois vers l'avant. Demain. Plus qu'une journée avant de retrouver mes mentors...et les caméras. Je ne sais pas si je suis rassurée ou terrifiée. Qu'avait bien pu ressentir ma mère en sortant de l'arène? Mieux, pourquoi ne m'avait-elle pas empêchée d'y aller? Une bouffée de colère sourde me monte à la gorge, mon rythme cardiaque s'accélère sur la machine reliée à l'avant de mon lit, et une douce morphine se répand dans mes veines, me replonge dans le sommeil.

A mon réveil les fils qui me retiennent et la machine ont disparu. Je me lève lentement, courbaturée par le manque d'exercice. Bien que mes blessures se soient résorbées j'ai toujours l'impression d'avoir une lame dans mon abdomen et bouge lentement, avec précautions, comme si un faux mouvements allaient rouvrir toutes mes plaies. Il y a une tenue pliée dans un sac plastique sur la chaise. En  la dépliant je reconnais l'uniforme de l'arène, flambant neuf. Il me semble étranger sans les traces de sang, de terre, les déchirures...

Leven Dehlilah : les 85èmes Hunger GamesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant