Partie 2 ; Chapitre 1

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         L'air fouette mon visage alors que je me rue vers la Corne. Autour de moi, le chaos. L'herbe qui me griffe les chevilles, ma respiration saccadée. Plus que quinze mètres. Surtout ne pas tomber. Dix. Je freinais avant de m'écraser contre la paroi métallique.

Première arrivée. Première servie. J'escaladais l'amas d'armes jusqu'à atteindre le sabre que j'avais repéré pendant le décompte. Pommeau noir, fourreau assorti et lame de profil délicatement incurvée. J'entendis un cri derrière moi et sautais à terre pour voir Hunter retirer une épée de la poitrine de la fille du huit. Premier mort. Le garçon du neuf atteint la Corne à son tour, se rue sur un set de couteau. Avant d'avoir le temps de réfléchir, mon sabre décrit un arc de cercle, une gerbe de sang m'éclabousse le visage et il titube en arrière, la gorge largement ouverte. Son cri d'effroi s'achève dans un gargouillement et il s'effondre en travers d'une pile de couverture. Mort. Et c'est moi qui l'ai tué. Ses yeux qui fixent le plafond sans le voir. Seize ans sans doute. Pas davantage.

Des bruits de pas effrénés. Joshua arrache un épieu de son présentoir et me bouscule pour repartir à la charge. C'est le coup de fouet qui me fait revenir à la réalité. Le garçon du neuf est mort. Pas moi. Je range les six couteaux dans les poches latérales de ma ceinture à laquelle je fixe mon fourreau. Ni trop lourd, ni encombrant. Assez pour me procurer un meilleur appui. Sabre en avant, je m'élançais en dehors de la Corne. Deux objectifs s'offraient à moi. Garder les provisions ou tuer le maximum de tributs. Hunter Karism et Joshua s'occupent assez bien du second comme ça. Dehors c'est la panique. les tributs courent pour essayer de rafler quelque chose, détalent comme des lapins ou traînent dans la poussière d'un air perdu. Quelques corps rougissent déjà l'herbe verte. Karism plaque la fille du onze avec ses genoux et la lézarde de coups de couteaux. Osten fait un croche pied à Ivy pour lui voler son sac avant de s'enfuir, indemne. La jeune fille court dans l'autre direction mais prend un couteau qui traînait dans l'herbe au passage. Merde. Si la plupart des armes lourdes étaient à l'intérieur de la Corne d'autres sont éparpillées un peu partout autour. Quelqu'un doit les ramasser avant qu'il ne reste plus rien. Repérant un visage familier, je hurle pour dominer le boucan:

-Clancy! La Corne!

Le jeune homme change aussitôt de trajectoire, trop heureux d'échapper au massacre pour prendre ma place. Je me dépêche de rassembler les sacs. Au passage je remarque que sa lame est trempée de sang, mais ne pose pas de questions.

Un sac. Une bâche, une boite de médicaments, une paire de lunettes, deux couteaux. je lançais le tout à Clancy avant de repartir. je dû faire une embardée pour éviter Loraleen et une autre fille qui roulaient au sol. Un peu plus loin Hunter se battait férocement contre Thread. Aussitôt je lâchais tout ce que je tenais pour me jeter dans la mêlée. Mon uppercut au menton le laisse de marbre et Hunter me force à reculer pour éviter le revers du poignet qu'il effectue avec sa faucille. Bien une arme d'agriculteur. Soudain une voix perçante se met à brailler.

-Thread, Jaffery, amenez vous!

Éberluée, je regardais Odinah, la petite Odinah ,la gamine de douze ans, charger trois sacs aussi gros qu'elle sur ses frêles épaules d'une seule main, tenant en respect ses adversaires potentiels avec un couteau cranté. Elle n'a l'air ni perdue, ni terrifiée. Pire encore, Thread nous repousse aussitôt pour la suivre. Jaffery les rejoint. Ils percutent la fille du cinq au passage. Sans s'arrêter, Jaffery lui assène un énorme coup de poing et elle tombe, toute raide, sans se relever.

Je les regardais disparaître. Un énième cri me fait tourner la tête. Je manque de m'étaler lorsque le garçon du six profite de ma distraction pour essayer de m'arracher mon sabre. Je le frappe du tranchant de la main et il recule en crachotant, me permettant de libérer mon sabre de son emprise. La lame le touche à l'abdomen en longueur. Mais avant que je ne puisse l'achever il me frappe au visage, juste assez pour faire saigner mon nez. le temps que je me reprenne il est déjà à dix mètres. Je sors un couteau de lancer mais Karism bondit hors de la Corne, une main sur une flèche, et l'achève. Visiblement elle a trouvé son arc.

Leven Dehlilah : les 85èmes Hunger GamesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant