𝐋'𝐈𝐌𝐏𝐄𝐑𝐀𝐓𝐑𝐈𝐂𝐄 𝐃𝐄𝐒 𝐅𝐄𝐌𝐌𝐄𝐒

Chapitre 10 - P2

Plus je me rapproche de cette porte, plus je me sens bizarre, comme nerveuse. Mais je n'ai pas vraiment de raison de l'être. J'ai eu le temps de réfléchir à ce que je vais dire, mais maintenant que le moment est venu, je ne suis plus sûre de rien.

Peut-être qu'Ambre a raison et que je suis un peu dure avec lui parfois. J'ai du mal à accorder ma totale confiance aux hommes.

Me trouvera-t-on peut-être extrême ? Certainement, si l'on ignore les scènes atroces que j'ai pu vivre aux mains d'hommes sans conscience. En grandissant entourée de femmes formidables, et en connaissant l'histoire de l'humanité, j'ai observé que les plus grandes blessures de notre monde sont souvent infligées par des hommes. C'est comme cela que j'ai compris à travers mes expériences, de quoi certains d'entre eux sont capables.

Je ne suis pas extrême, comme tu le disais maman. Je suis une femme du vingt et unième siècle. Mais il est vrai que les cicatrices invisibles du passé influencent mes interactions présentes. Peut-être suis-je trop sur mes gardes, trop prompte à juger. Mais chaque fois que j'essaie de baisser ma garde, que je me dis que peut-être... Je finis toujours par regretter.

Je suis consciente que tous les hommes ne sont pas les mêmes. Mais je ne peux pas ignorer la réalité que ce monde me montre constamment. Ce monde qui, encore aujourd'hui, réserve trop souvent à ses filles des destins cruels.

Quelle fierté j'ai éprouvée en apprenant que le pays que je dirige est l'un des plus sûrs au monde, où les femmes sont traitées avec dignité et respect, où leurs droits sont protégés comme ils devraient l'être partout sur cette Terre. Chaque année, elles nous en remercient, et c'est ma plus grande récompense.

Mon "empire", comme le qualifient certains hommes d'État frustrés, serait la risée de cette planète ? C'est ce qui arrive lorsqu'on défie l'ego d'hommes incapables de gouverner humainement et efficacement leur population.

Ce royaume est une preuve vivante que les femmes, lorsqu'elles sont libres de diriger et de créer, peuvent accomplir des merveilles. Nous sommes une lumière dans un monde souvent obscurci par l'injustice, et nous continuerons à briller pour montrer qu'un autre monde est possible. Mon pays a longtemps affronté des défis que beaucoup pensaient insurmontables. Pourtant, par notre résilience et notre unité, nous avons non seulement survécu, mais prospéré.

Et parce que ce pays est le mien, je ne laisserai jamais les critiques d'autrui ébranler ma conviction en nos valeurs et nos principes. Au contraire, je continuerai à défendre avec fierté ce que nous avons accompli et à travailler pour un monde meilleur, pour mon peuple, pour les femmes. Et pour toutes celles et ceux qui aspirent à la justice et à la paix.

Alors que mon discours me submerge l'esprit, j'arrive devant lui, la porte est ouverte. Rick semble concentré sur son ordinateur.

Mon frère est différent. Élevé par ma mère et moi, il ne peut qu'être bienveillant. Malgré les réserves que je nourris à l'égard de nombreux hommes, Rick incarne l'exception qui confirme la règle. Il prend le temps d'écouter, de comprendre. Il partage nos opinions, nous encourage, et nous soutient. En lui, je vois une autre facette de l'humanité masculine, celle que je voudrais voir fleurir davantage. Je devrais lui laisser plus de place pour s'exprimer, lui accorder un peu plus de considération. Peut-être que je pourrais, grâce à lui, réapprendre à faire confiance, un pas à la fois.

- Rick. Toquai-je contre le mur. Je suis là, tu voulais me parler ?

- Oui, tu peux t'installer si tu veux. Dit-il en me faisant signe de s'asseoir en face de lui.

Il n'a aucune position de supériorité, mais plutôt une attitude calme dû à une flagrante fatigue.

Je m'assois, croisant mes bras, un regard neutre.