Chapitre 19

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Le sol était dur, froid. Sa main saignait. Cachée derrière ses cheveux noir corbeau, elle baissa la tête.

On aurait entendu une mouche voler. Les CS 3 étaient on ne peut plus silencieux. Tous les élèves avaient les yeux baissés sur leur copie. Tous étaient extrêmement concentrés.

Enfin, une cloche retentit. C'était l'heure de rendre leur contrôle. Et pas n'importe quel contrôle, celui du Certificat Fondamental !

Mëwenn sortit de l'École, rayonnante. Elle était sûre d'avoir réussi le Certificat Fondamental

haut la main. Elle avait hâte de l'annoncer à sa mère. Enfin, elle allait pouvoir passer à l'Institut, avec les grands et obtenir le statut de Certifiée !

Durant les deux heures interminables d'attente avec les autres CS 3, Mëwenn ne cessa de se ronger les ongles. Après le moment d'euphorie et la certitude d'avoir tout réussi durant l'épreuve, la jeune fille avait entrevu des milliers de possibilités d'avoir commis une erreur.

Pour finir, une femme assez âgée vint les chercher un par un toutes les cinq minutes par ordre alphabétique. Le tour de Mëwenn vint donc assez vite.

— Mademoiselle, annonça le directeur de l'Institut, un homme bedonnant et souriant, nous avons le plaisir et la plus grande fierté à vous accueillir à l'Institut ! Ce n'est pas tous les jours que quelqu'un réussit à avoir 101 sur 100 au Certificat Fondamental !

101 sur 100 ? Comment était-ce possible ? Mëwenn était forcément en plein rêve. Elle ne pouvait pas avoir obtenu non seulement le Certificat Fondamental mais aussi plus de points que prévu ! Puis, elle se rappela la question bonus, testant leur logique et leur vivacité d'esprit. C'était sûrement cela.

— Vous êtes une jeune fille vraiment très prometteuse Mademoiselle. Que souhaitez-vous faire plus tard ? reprit le directeur.

— Devenir la Rouge d'Or la plus célèbre de tous les temps. Enfin, certainement pas autant que la Générale Duyer, mais assez pour rester dans les mémoires de tous. Je l'apprécie tellement. Cette femme...c'est mon modèle de vie.

— Vous savez, avec l'enseignement que nous allons vous procurez, vous serez certainement en mesure d'égaler votre idôle. Maintenant Mademoiselle vous allez devoir partir. Mais nous nous retrouverons à la rentrée, après les vacances du Choix. En attendant, voici votre carte beige.

— Merci, Monsieur le Directeur. Au revoir, Monsieur le Directeur.

Mëwenn les laissa, lui et la directrice de l'ACEED, association qui avait ouvert l'École. Elle n'arrivait toujours pas à se rendre compte. Elle sortit, d'un pas enjoué de la salle. Elle quitta l'établissement en essayant de se déplacer avec une vitesse raisonnable.

Mais une fois dans la rue, Mëwenn courut à grandes enjambées. Elle traversa la moitié de la distance la séparant d'Erudycja, sans même avoir eu à entrer dans le métro.

Pourtant, maintenant qu'elle avait parcouru ces deux kilomètres, elle se résolut à emprunter le tramway. C'était une bonne occasion de tester sa carte beige, sa première carte !

Elle n'emprunta pas sa file habituelle, qui lui permettait de passer première. Sa mère n'étant pas avec elle, elle n'avait pas accès aux privilèges. Heureusement pour elle, il n' y avait que quatre autres personnes dans la file des Certifiés. Quant à la file des Examinés, où Sages, Savants et Rouges avaient l'habitude de se presser, elle était vide.

Les deux premiers hommes de la file empruntèrent les navettes qui ne tardèrent pas à s'arrêter. La jeune femme qui devait avoir moins d'une quinzaine d'années de plus que Mëwenn prit sa fille dans ses bras. L'enfant ne devait même pas avoir l'âge scolaire. Elles montèrent toutes deux dans une nouvelle navette.

Quand ce fut son tour, Mëwenn scanna sa nouvelle carte beige. La machine émit un bip sonore et une navette ne mit que quelques secondes à arriver. Mëwenn s'y hissa et attacha ses ceintures.

Arrivée Erudycja, sa carte beige brandie tel un trophée —ce qu'elle était en quelque sorte, Mëwenn se précipita chez elle.

— Maman ! Je l'ai eu ! J'ai eu mon Certificat Fondamental !

Seul le silence lui répondit. Sa mère devait être restée au boulot, malgré sa promesse de rentrer plus tôt pour l'occasion. 

Déçue, la fillette s'assit. Elle resta longtemps, sur la chaise qui trônait au centre du salon. Une heure passa, peut-être deux. Mëwennn se leva. 

Elle se rendit jusqu'à sa chambre et récupéra son livre sur sa table de chevet. Elle se plaça sur son lit, les jambes contre le mur, la tête sur une couverture. Elle pivota plusieurs fois. Elle pencha sa tête dans le vide, ses jambes pliées sur son lit. Elle n'arrivait pas à se concentrer. 

Le jour était en train de décliner. Mais où pouvait bien être sa mère ? Mëwenn ferma son livre et le posa sur sa table de chevet. 

Elle retourna dans le vestibule et enfila son manteau, puis ses chaussures. Elle verrouilla la porte de la villa derrière elle. 

Elle commença à avancer dans Erudycja. Alors qu'elle progressait dans les rues de sa ville, les cris des badauds étaient plus présents que d'habitude. Il y avait un attroupement aux Passerelles du tramway. 

Intriguée, Mëwenn tenta de se faufiler dans la foule. Malgré sa petite taille, il lui fut difficile de se frayer un chemin. Elle réussit tout de même à atteindre le premier rang de la foule. Sa curiosité était à son comble. 

Comme l'enfant l'avait compris ce qui intéressait les badauds se trouvait en bas de la passerelle principale. Mëwenn se pencha avec précaution. Par terre gisait une navette, sûrement dysfonctionnelle. À ses côtés se trouvait une femme, dont les jambes formaient un angle étrange. Mëwenn n'avait eu aucun mal à distinguer son visage malgré ses cheveux blonds cendrés qui le recouvrait.

— Maman, souffla-t-elle.

Mëwenn tomba à genoux.

NOVA [Nouvelle version]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant