Téa se réveilla en sursaut. Elle était hantée par trop de choses pour pouvoir dormir. Toutes ces histoires d'Élue, de secrets, de futur, de devoirs, elle n'en pouvait plus ! Il fallait vraiment qu'elle parlât à quelqu'un. Téa était abattue. Elle se sentait tellement seule. Elle fixa le plafond quelques instants. Ici, elle n'avait plus personne à qui aller parler, au milieu de la nuit, de ses problèmes existentiels de plus en plus compliqués. Elle fit défiler dans sa tête les seules personnes en qui elle avait confiance sur sa planète. Eloe, Asha, Iloan, Cordélia.
Elle ne pouvait pas considérer Ayden comme quelqu'un de confiance, il l'inquiétait bien trop. Il était étrange, mystérieux, cachotier. C'était vraiment étonnant, les seules personnes à qui elle accordait sa confiance étaient des personnes qu'elle ne connaissait que depuis quelques heures. Un jour tout au plus. Elle soupira de plus belle. Elle ne se voyait pas prendre le tramway au milieu de la nuit. De toute façon, elle n'avait pas de carte de statut social. Même pas de Certifiée, puisqu'elle ne l'était pas. D'après les cartes du Territoire Céleste que Téa avait vues, Erudycja, la ville des Savants et donc d'Eloe et Asha, se trouvait à l'opposé de Visdom. Les villes les plus proches étaient Vallás, Lakana et Célestial. Téa eut une illumination. L'ACEED se trouvait dans la capitale ! Elle pouvait largement s'y rendre à pied.
Téa songea au petit mot d'Iloan qu'elle avait lu quelques heures plus tôt. Elle ne pouvait pas attendre mardi !
Elle regarda le ciel. Il faisait nuit noire. Tant pis ! Elle se leva et posa ses pieds sur le sol froid. Elle avança rapidement vers la commode. Elle était remplie de vieux vêtements qu'Ayden avait récupérés ou qu'Asha lui avait donnés. Elle enfila un t-shirt noir et un pantalon assorti. Cela suffirait bien. Elle retroussa le bas du pantalon qui glissait sous ses pieds. Elle enfila un manteau et une paire de bottes. Elle ouvrit la porte avec précaution. Elle ne tenait pas à réveiller son hôte. Elle se glissa hors de la maison et commença à se diriger vers l'ACEED. La rue était bien moins éclairée que Téa aurait cru. Elle avait beaucoup de mal à retrouver son chemin. Elle finit pourtant par y arriver. La bâtisse blanche s'étalait devant elle. Téa ouvrit le portillon et traversa le jardin. Elle tenta d'abaisser la poignée. Comme elle s'y attendait, la porte était verrouillée. Elle resta assise, par terre, au centre de la cour. Comment avait-elle pu penser qu'elle allait pouvoir retrouver son ami ? Elle était encerclée par de grands bâtiments. Une lumière attira son regard. Une silhouette se dessinait derrière le rideau. Un garçon qui semblait très grand. Elle vit la porte s'ouvrir. Une autre silhouette se fit entrevoir. Elle était petite et avait de longs cheveux. Les deux restèrent à discuter un moment puis la petite fille s'en alla. C'est à cet instant que le garçon décida de tirer ses rideaux et de s'appuyer sur le rebord de la fenêtre. Téa l'observa avant de reconnaître sa chevelure flamboyante. Quel coup de chance ! Le jeune homme sembla tiquer lui aussi.
— Téa ? lança-t-il. Que fais-tu là ? Attends, j'arrive.
Le jeune garçon disparut et descendit rejoindre Téa quelques secondes plus tard.
— Qu'est-ce qui t'arrive ? demanda Iloan. C'est pas que je suis pas content de te voir mais tu admettras que quelqu'un qui se trouve à ta fenêtre au milieu de la nuit, c'est déroutant...
Téa ne répondit pas. Elle se contenta de fondre en larmes. Iloan se décomposa. Il avait l'air très mal à l'aise. Il la prit maladroitement dans ses bras. Il ne dit rien. Il se contenta d'être là. Téa l'en remercia intérieurement.
— Hé, finit-il par lancer doucement. Ça va aller.
Cela sonnait plus comme une interrogation que comme une affirmation. Pourtant, cette phrase apaisa Téa. Elle acquiesça.
— Désolée de venir comme ça sans prévenir, hoqueta-t-elle, mais j'avais besoin de me confier.
— T'inquiète, je ne dormais pas. Viens, on va prendre froid.
Iloan la prit par la main et l'emmena à l'intérieur du bâtiment. Celui-ci faisait penser à un hôpital avec ses murs blancs immaculés. Il lui donnait froid dans le dos. C'était censé être un établissement pour des enfants ! Comment être à l'aise dans ce genre d'endroit ? Comment y vivre ? Iloan la fit rentrer dans une pièce. Les murs y étaient toujours aussi froids. Mais l'ambiance en elle-même était chaleureuse. Un ronflement se fit entendre depuis l'un des deux lits superposés.
— Heureusement pour toi que tous les autres dormaient, même si Cordélia vient de se coucher, elle a fait un cauchemar la pauvre... chuchota Iloan
Un des enfants qui dormaient se retourna brutalement. Iloan grimaça. Le garçon emmena Téa dans une toute petite salle adjacente. C'était un bureau.
— On aurait pu les réveiller, expliqua-t-il. Alors qu'est-ce que tu voulais me dire ?
Téa ne sut que répondre. Elle n'allait quand même pas lui avouer qu'elle venait de la Terre si ? La jeune fille opta pour une option moins risquée.
— Je me sentais mal à l'aise chez Ayden. Il me fait peur. Alors, j'ai repensé à toi et Cordélia.
— D'accord... mais qu'est ce que tu comptes faire ? M'expliquer pourquoi vous nous avez menti, Asha et toi ?
— Si tu veux, soupira-t-elle.
Le cerveau de la jeune fille fonctionnait à mille à l'heure. Pouvait-elle vraiment faire confiance à ce garçon si hargneux ? Puis, elle repensa à sa douceur quand elle avait fondu en larmes. Il méritait des explications.
— Ecoute-moi bien. Ce que je vais te dire, seul Ayden en est au courant. Ce n'est pas vraiment un secret mais je préfère que tu ne le racontes pas à n'importe qui.
— Et Cordélia ? Je peux ?
Téa opina du chef avant de poursuivre.
— Asha non plus ne sait rien de moi. J'ignore pourquoi elle m'a couverte. Je ne vais plus à l'école parce que j'ai déjà tout terminé. Mais pas sur cette planète.
Iloan retint son souffle.
— Tu viens de Ligo ? Tu t'en es échappée ?
— Non, tu ne comprends pas. Je ne suis pas de ce système solaire.
— Un système solaire ? Qu'est-ce que c'est ?
— Le Complexe Novien si tu préfères !
Iloan en resta bouche bée.
— Mais alors... Tu es une extranovienne ?
Téa pouffa doucement. Une extranovienne ? Ça devait être l'équivalent de "extraterrestre" sur Nova.
— Ce serait plutôt vous les aliens là d'où je viens !
— Alors tu viens vraiment d'une autre planète ? s'exclama-t-il.
— Oui. Je viens de très loin. D'une planète connue sous le nom de "Terre". Là d'où viennent tous les astronautes qui fondèrent Nova.
— L'ère antique... Mais alors, il y a encore des personnes sur Terre ?
— Je n'en ai aucune idée. Ma mère était une astronaute devenue astrophysicienne...d'après Asha. Elle s'appelait Evelyne.
— J'en ai entendu parlé. Mais alors, quel âge as-tu ?
— 4711 ans. Je ne les fais pas hein ?
Iloan laissa échapper un rire nerveux.
— Tu me fais une farce là. Personne ne peut vivre aussi longtemps.
— Sauf si cette personne a été mise en état de cryogénisation. Je suppose que c'est ce qui m'est arrivé. Je me suis réveillée il y a quelques jours dans un lit d'hôpital. Ça prouve bien que la technologie fait des merveilles de nos jours. Sur Terre, il fallait que la personne soit plongée dans le zéro absolu et maintenant, il suffit d'un lit d'hôpital et probablement d'un médicament...
La jeune fille s'effondra, prise de soubresauts. Ses paupières convulsaient. Iloan s'assit près d'elle, inquiet.
Il répétait son nom en boucle. Il tenait sa main qui s'agitait.
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NOVA [Nouvelle version]
Science FictionEn l'an 6615, des astrohistoriens de la civilisation néo-terrienne de Nova découvrent la dernière relique de la vie terrienne "antique": un livre ! On l'estime datant du XXIe siècle et il est écrit en "paraglyphes". Cette découverte sera déterminant...