Chapitre 1 Ticket Pour La Liberté

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BILLIE

- Billie ! J'ai vu James, il a reçu la réponse que tu attends !!!

C'est Éloïse qui m'appelle depuis l'autre côté de la cour. Je la connais depuis toujours. Elle n' a quasiment jamais quitté cet endroit. Je m' suis toujours demandée pourquoi.

J'observe sa silhouette frêle et sa démarche peu assurée, s'approcher de moi. De quatre ans mon aînée, elle m'a toujours prise sous son aile. Une grande sœur en quelque sorte.

Un large sourire aux lèvres, elle se met à réaliser des petits sauts d'excitation. C'est rare de la voir sourire et réjouie. D'ordinaire son visage est toujours froid. Un air presque fermé. Un regard vide et une timidité maladive en permanence sur la retenue.

À vrai dire, ici, on a un peu tous la même expression.

Nous avons déjà passé la mi-Août. Il fait encore très chaud. Je suis assise sur l'herbe sous ce vieux châtaignier. Je m'y étais réfugiée dès mon arrivée ici. Pendant huit longues années, il m'a offert un semblant de paix que les murs gris de cet endroit, n'ont jamais pu m'apporter. C'est contre son écorce rêche, assise entre ses racines solides, que je m'appuie. C'est là que je lis, pense, écris, rêve, dessine et pleure. C'est mon repère et mon protecteur.

J'aurais dû m'tirer, il y a trois ans, mais sans argent où aurais-je pu aller ? J'ai donc " fêté " mon vingt et unième anniversaire ici, dans ce lieu froid, maudit, triste et cruel. Les murs gris de l'ensemble n'arrangent rien à cette sensation. Des pleurs d'enfants continuels qui agacent la plupart des gens, sont même devenus un bruit de fond pour nous. Sans envie, j'ai demandé à rester pour y travailler, afin d'accueillir ses petites âmes perdues et malheureuses, les oubliées du bonheur.

Quasiment tout l'argent gagné durant ces trois ans, je l'ai économisé. Gardant secrètement l'espoir de pouvoir faire mes études et d'intégrer la Fac de Portland. Seule Éloïse et deux éducateurs de confiance, connaissent mon projet.

Est-ce que j'allais enfin quitter l'Oregon du fin fond du sud-est où se trouve ma " prison refuge " comme je l'appelle ? Là, où ma vie n'a été que succession de cauchemars, de violence et désillusions.

Me sortant de mes pensées, Éloïse s'accroupit près de moi, me tendant l'enveloppe blanche. Comme ici, on ne reçoit jamais de courrier de personne. Il n'est donc pas compliqué de comprendre de quoi il s'agit.

Je reste pétrifiée et la laisse quelques longues secondes interminables pour elle, le bras tendu vers moi.

- Tu sais, Billie, y en a qui sont morts comme ça !! Regarde le cachet date de Juin, cette enveloppe a dû faire le tour de l'Oregon c'est pas possible autrement ! me lance-t-elle amusée et un brin sarcastique.

Je la fixe sans expression. Une boule dans mon estomac m'envahit. Joie et trouille se mélangent dans un tourbillon incontrôlable.

- Désolée, dis-je en prenant doucement le pli de ses mains, où l'entête de Portland State University y est imprimé.

Si cette lettre contient ce que j'espère... alors je partirais. Mais partir, c'est laisser Célia, laisser Éloïse. Elles comptent sur moi. Et moi je compte sur cette lettre pour enfin être libre.

- Tu comptes l'ouvrir ou tu essayes la divination, bordel ?

Mes yeux se portent sur l'enveloppe que je tiens serrée nerveusement entre mes doigts lorsque mon regard se trouble soudain. Je prends plusieurs grandes inspirations.

- Ouais allez. Il est temps de savoir !

Mon cœur bat la chamade, mes doigts tremblent encore sur l'enveloppe... Maladroitement, j'essaie de décoller le rabat mais celui-ci me résiste. J'allais y parvenir quand une petite main se glisse dans la mienne, douce et rassurante. Célia. 

Le Pacte Des Anges... Jamais L'Un Sans L'Autre Volume 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant