Chapitre 23

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Comme l'année dernière

Ainsi que les autres années

Je t'écris ce poème

Pour...

Et là, je bloque. Je n'ai jamais été très fort pour écrire des poèmes, et aujourd'hui n'est pas une exception. Assis dans mon lit, le casque sur les oreilles, j'essaye de trouver la suite de ce début de texte plutôt... atroce. Je n'ai jamais vraiment aimé ce que je produis et je trouve que même le texte que je lui ai offert l'année dernière est atroce. Je ne suis pas poète...

Je sais qu'Henry est dans la salle commune, avec tous les autres garçons. La saison des poèmes a commencé à Hillerska, et c'est là qu'on se rejoint normalement tous pour écrire un peu ensemble. Mais je veux laissé la surprise à Henry, alors je ne vais pas avec eux. Et je n'ai surtout pas envie de savoir ce qu'il va écrire pour je-ne-sais-qui.

Je décide de me fier à Google et tape "poème d'amour" dans la barre de recherche. Tout est trop... poétique. Pas assez personnel. 

Comme depuis un an

J'écris ces mots pour toi

Et pour...

Je râle et mon téléphone part à l'autre bout de mon lit. Putain... Pourquoi c'est si compliqué de faire quelque chose de beau ?  C'est ce moment là que choisis Henry pour revenir, et je récupère mon téléphone en vitesse avant qu'il ne puisse voir quelque chose.

- Tout va bien ?

Il pose ses affaires sur son bureau.

- Ouais, ouais, je finis par répondre. 

- T'es pas venu.

- Je devais finir un devoir.

Il hausse un sourcil, ne me croyant pas.

- On avait des devoirs ?

- Je... Euh, je crois.

- Tu crois ? Bah t'as fait quoi comme devoir, si t'es pas sûr ?

Il sait que je mens, mais il ne le dira pas. Comme je n'avouerais pas que je mens.

- Avec les gars, on va manger. Tu viens ou t'iras plus tard ?

- Vas y, vas y. Commence à y aller sans moi, je vous rejoins.

Je vois qu'il hésite à me demander autre chose, mais il ne le fait pas et sort de la chambre, allant rejoindre les autres. Moi, je me prends quelques dernières secondes pour moi, pour effacer le début de poème, avant d'y aller aussi.

~~~

Je fais comme chaque année

Ecrire ce que je voudrais te donner

Mais cette année ça a changé

Puisque, qui t'envoie cette lettre, tu le sais

J'avais fini par m'arrêter sur le premier couplet là. Je n'étais pas très fier, mais je n'avais rien fait de mieux. Je voulais en écrire au moins trois autres, et j'avais décidé de ne pas passer par quatre chemins. Je voulais écrire quelque chose de vraiment personnel, disant ce que je penses. Mais c'est plus facile à dire qu'à faire.

Assis avec les autres dans la salle commune, mon regard s'arrête sur Henry, à l'autre bout de la pièce. Il dispute une partie de jeu de carte avec un première année qu'il bat sans lui laisser de chance. A ma droite, Wilhelm est concentré sur son téléphone.

- Qu'est-ce qui rime avec boucle ? Il demande en relevant la tête.

- Poulpe ? Propose un gars.

- Souple, dit un autre.

- Couple, je lance.

- Look, dit Henry en posant une carte.

- Merci les gars.

Il retourne sur son téléphone, devant surement écrire un poème pour Simon. Je décide de faire comme lui. Non, pas écrire un poème pour Simon, mais retourner à mon poème pour Henry.

Je ne sais pas où on en est

Dans ce drame que nous avons créé

J'efface la deuxième phrase, pas fier de moi. Ce n'est pas un drame, c'est juste un tas d'incompréhension et de sentiment, parfois douloureux. 

Je n'en peux plus de t'aimer,

sans pouvoir le montrer

Et de mettre mes sentiments de côté

ça, c'est mieux. Deuxième couplet terminé.

- Y en a qui ont déjà posté leur lettre ? Demande un brun sur le fauteuil en face.

Certains relèvent la tête vers lui, dont moi. Un carnet sur ses genoux, il gribouille quelque chose.

- C'est trop compliqué de savoir ce qui plait aux meufs, râle quelqu'un. Elles sont difficiles, parfois !

- Alors prends toi un mec, lui répond quelqu'un. Tu verras, ça sera plus simple.

- C'est tout aussi compliqué, je rétorque. 

Je sens des regards sur moi mais je ne dis rien d'autre ni ne relève la tête de mon téléphone qui est d'un coup très intéressant. Putain, pourquoi j'ai dis ça ?

- Il a raison, continue Wilhelm. C'est compliqué aussi.

J'essaye de finir les deux derniers couplets que je veux écrire. Je dois encore mettre le poème sur une feuille au propre, après, durant un moment où Henry n'est pas là. Ces moments étant plutôt rare, j'aimerais vraiment le finir en vitesse pour pouvoir avoir plus de chance que ça arrive.

La partie d'Henry doit se terminer car je le vois se lever avant de s'installer à côté de moi sur le canapé. Je change en vitesse de page sur mon téléphone, démarrant un jeu.

- C'est pas ce soir la pièce de théâtre ? Il sort, d'un coup.

Je lève un sourcil en tournant ma tête vers lui, ne me souvenant pas avoir de pièce de prévu. Puis je me rappelle du cadeau et... Merde ! La pièce de théâtre !

- Mais si ! C'est ce soir !

Je me lève un vitesse du canapé et me dirige vers la chambre, Henry derrière moi car il m'accompagne. 

- T'es sûr que tu veux venir ? Je demande en mettant une veste.

- Bah oui, pourquoi ?

- Bah... Je sais que c'est pas trop ton truc. J'ai pas envie que tu t'obliges à venir.

- Mais non ! J'ai envie de venir.

Je n'insiste pas plus quand je le vois prendre une veste et la mettre. Je lui tends une des deux places que j'avais gardé avec moi et il la prend. Nous finissons par sortir d'Hillerska en courant, ne voulant pas louper le prochain bus. On a failli trébucher plusieurs fois, ne voyant pas grand chose dans l'obscurité extérieur, et ça nous a fait rire. Nous arrivons finalement à avoir le bus au moment où il allait démarrer.

Putain, j'ai failli louper une super pièce !

I don't wanna be your best friends (Walty story)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant