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Cécilia Cox

Lundi 4 août 2025, Londres

Je suis rentrée chez moi dès le lendemain de l'incident, car je ne voulais pas supporter plus que ça. Je savais qu'ils étaient bourrés, je savais qu'ils ne pensaient sûrement pas à mal, mais ils ne savaient absolument rien de moi, ils ne pouvaient pas savoir que derrière leurs mots se cachaient des souvenirs douloureux qui s'étaient ravivés l'espace d'un instant en moi.

Mais non, ce n'est pas le moment d'affronter le passé. Je suis encore trop faible, encore trop seule, encore trop impuissante pour oublier tout ce qui m'a forgé, mais aussi tout ce qui m'a traumatisé.

Quand je suis rentrée chez moi, il devait peut-être être vingt-et-une heures, car j'avais passé une dernière journée en Belgique seulement avec Margaux, qui s'était rendue compte de mon mal-être une fois sobre le lendemain du drame, et qui avait privatisé un centre commercial telle la star qu'elle est pour qu'on puisse faire du shopping rien que toutes les deux sans être dérangées par des fans ou des paparazzis.

J'ai fermé à clé la porte de mon appartement londonien derrière moi et je me suis effondrée sur mon lit sans même prendre la peine de défaire mes valises ou de baisser les volets. Et j'ai dormi, épuisée, fatiguée des derniers évènements. J'ai dormi jusqu'à treize heures le lendemain, comme si le sommeil me permettait d'échapper à la réalité, réveillée par les miaulements du vieux connard de matou de Patapouf qui voulait ses croquettes et qui avait encore chié sur le tapis pour me montrer à quel point il était en colère que je sois parti quelques jours en le laissant seul, comme si son emploi du temps n'était pas consacré à dormir et à manger.

Alors, pendant une semaine, j'ai écrit sur mon journal électronique, j'ai écrit sur mes carnets tout ce qui me passait un peu par la tête, je me suis engueulée avec une meuf au téléphone qui voulait que je souscrive à une assurance alors que mon numéro de téléphone était sur la liste rouge, j'ai regardé mes mille mails que m'avait envoyés mes contacts durant mes quelques petits jours de vacances, j'ai négocié avec un illustrateur sur quelques détails pour une édition collector d'un de mes livres, puis j'ai regardé FRIENDS illégalement en mangeant du pop corn salé avec Patapouf sur les genoux qui ronronnait tel un vieux tracteur qui rouillait.

J'ai regardé un reportage que la version anglaise de Brut (donc aucune chance que mes parents ne la regardent car elle n'était disponible qu'en Angleterre) avait fait sur moi pour lequel j'avais eu une interview quelques semaines plus tôt, et voir ma tête sur une chaîne d'information telle qu'elle m'a plutôt fait rire.

"Cécilia Cox, cette jeune autrice londonienne cumule plusieurs de ses livres en haut de plusieurs classements dans toutes les catégories des genres de ses romans. A seulement vingt-cinq ans, elle a écrit cinq romans à son actif, et publie des articles sur son journal électronique suivi par plus de dix-mille lecteurs comptés à ce jour... D'abord une découverte avec son premier roman You always have been qui parle d'une jeune femme torturée par la vie, puis un succès inattendu avec more than a summer fling, le fameux triangle amoureux entre Betty, James et Augustine, son deuxième roman qui a fait fureur. Ont suivi Summer love letters, qui traite des amours éphémères d'été lorsque nous sommes adolescents, un peu moins apprécié des lecteurs, mais elle est rapidement de nouveau au centre des conversations avec son quatrième roman, exile, et son cinquième et dernier roman (pour l'instant) : Midnight Rain. Que nous réserve-t-elle pour l'avenir ? Nous sommes directement aller lui poser la question, écoutez la suite..."

J'ai coupé à cet instant-là car je n'avais pas envie de me voir parler, puis je me suis levée, dans mon traditionnel T-shirt Nirvana oversize et juste une culotte en-dessous, pour aller chercher de la nourriture dans mon frigo et potentiellement une bière. Mais en ouvrant le précieux coffre à bouffe, quelle fut ma surprise quand je me suis rendue compte qu'il n'y avait absolument rien dedans. Puis je me suis souvenue que j'avais dû commander hier parce que ce jour-là déjà mon frigo était vide comme le cerveau de mon ex.

Lando Norris : The Story Of UsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant