Onzième lettre

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Comme chaque été, tu passes ton anniversaire dans le sud, et tu m'y as conviée. Je n'étais jamais partie de chez moi, et le trajet en train m'a émerveillée. Les montagnes et la vue de la mer au loin, tout devenait apaisant.

Tu m'avais donné rendez-vous à la plage, et de loin, je t'ai aperçu. Tu étais entouré de tes amis et d'un chien. Tu t'es retourné et m'as vue ; j'ai de suite sorti mon appareil pour capturer ce moment. Tu courais vers moi, et le chien te suivait, les rayons du soleil illuminant chacun de tes mouvements.

« Bienvenue chez moi », as-tu dit en entourant l'océan de tes bras. Puis tu m'as tirée par la main pour me présenter à tes proches, ainsi qu'au chien qui était le tien mais que tu as dû laisser chez tes grands-parents. J'adore son nom, très original d'ailleurs : « Oreo ».

Nous n'avons pas tardé à attendre le coucher du soleil. Tu m'as dit que nous avions encore une semaine pour le voir et que tu voulais me faire visiter ta ville. À 10 minutes à pied, nous sommes arrivés chez tes grands-parents, qui m'ont accueillie à bras ouverts. Je me suis immédiatement sentie bien. À peine mes bagages déposés, tu m'as poussée à la sortie et nous sommes partis découvrir tes souvenirs à travers les chemins, les murs et les lumières de ta ville.

Je te regardais avancer devant moi, me racontant chaque chose que tu avais vécue. Les lumières de la ville éclairaient ton dos parsemé d'étoiles brunes. Je ne me suis jamais sentie aussi bien que pendant cette semaine. C'était comme si rien ne pouvait nous arriver, aucune ombre ne pouvait nous encercler.

Nous passions toutes nos soirées au bord de la mer, courant pour attraper le soleil couchant. Parfois, nous nous réveillions pour le voir se lever. Et quand nous n'étions pas face à l'infini, nous discutions sur la balançoire du jardin ou nous nous promenions dans le calme de la ville.

Sur l'arrière de ta moto, tu m'as emmenée dans tes lieux secrets. Il y en avait un que j'aimais particulièrement, que tu avais découvert en courant pour fuir ce qu'il se passait. C'était cette forêt où un lac est installé. À un moment, tu m'as dit :

« Quand je souhaitais encore un peu vivre, je venais ici. Je me disais que s'il se passait quelque chose, on me trouverait rapidement. Mais quand je voulais que tout s'arrête, je pensais à traverser l'océan sans m'arrêter ; on n'aurait pas pu me trouver dans cet infini. »

Je n'ai pas su quoi dire après ta confession. Et quand nous étions à nouveau devant l'océan, je m'imaginais te perdre à travers tout ce bleu. J'ai découvert une autre facette de cet endroit ; mais quand nous étions deux sur le sable, riant de tout et de rien, je me suis dit qu'en profiter de cette manière pouvait changer ce côté triste que tu as associé à ce sublime océan.

Le jour de ton anniversaire, nous avons passé la journée à la fête foraine et nous avons couru jusqu'à la plage pour trinquer à ta santé dans l'eau avant que minuit ne sonne, comme si le sort devait s'arrêter. Nous étions tous là à nous jeter les uns sur les autres, et je souhaitais que le temps ne s'arrête jamais.

Tout le monde avait disparu, et nous avons pris le chemin de la maison.

« J'espère que la semaine que nous avons passée deviendra une habitude chaque été . Merci d'avoir accepté de venir et d'être là. Tu es vraiment devenu quelqu'un d'importante pour moi. Bonne nuit. »

C'est sur cette phrase que mon été s'est terminé, que toutes les semaines suivantes allaient être amères. Et c'est depuis chez moi que j'attends avec impatience l'été prochain, et tous les autres étés. C'est fou de dire qu'une rencontre peut chambouler le quotidien et le cœur de quelqu'un. Qu'une amitié aussi forte peut nous rendre si heureux par sa simple présence. Je me demande comment prendra la tournure de ce carnet, et si un jour je m'arrête d'écrire en t'évoquant, qu'en sera-t-il de nous ?

AnamnèseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant