Vingt-troisième lettre

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J'ai l'impression qu'enfin, j'ai le droit à un peu de repos. Tout va bien en ce moment, et c'est pour cela que je n'ai pas écrit, trop occupée à apprécier cette nouvelle étoile au-dessus de ma tête, en espérant qu'elle dure.

Ma mère est revenue quelques semaines après l'hiver. Elle essaie de tout faire pour recréer ce qu'elle avait laissé. Elle me parle beaucoup de son passé et, parfois, de papa, même si à travers sa voix, je peux entendre ses larmes.

Je ne peux pas entièrement lui en vouloir. Je pense même que j'aurais fait la même chose : fuir pour vivre. Elle est toujours restée pour nous, tout en absorbant le côté sombre de mon père. L'amour ne suffisait plus. Il était recouvert de bien trop de colère et d'incompréhension pour le garder au chaud sous un couvercle de verre. Celui-ci s'était depuis longtemps brisé.

Je n'étais que leur fille au milieu de leur relation qui existait bien avant moi, alors, au fond, je ne savais pas grand-chose. En tant qu'enfant, nous ne voyons qu'une façade de notre famille, de nos parents. Mais il y a tellement de choses que nous ignorons sur eux et eux aussi vivent pour la première fois, et comme tout être humain, ils apprennent.

Alors je ne peux pas être en colère éternellement ; cela serait une perte de temps dans cette vie qui est déjà bien courte. Parler avec eux est un fait, mais se comprendre change tout. La phrase « se perdre pour mieux se retrouver » concerne aussi la famille, du moins c'est ce que j'ai compris.

On grandit tellement plus vite quand des drames surviennent. On doit agir et vivre dans des situations pour lesquelles nous n'étions pas préparés. Personne n'est préparé à quoi que ce soit. On apprend à marcher, on apprend à courir, on apprend à tomber et à se relever.

C'est quand on voit la mort en face que la vie devient plus simple et plus belle. Encore une fois, il faut l'accepter, c'est ce que dit ma mère.

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