Vingt-et-unième lettre

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Je suis resté toutes les vacances de Noël chez moi, mon frère est resté là où il est, et malgré le fait que mon oncle ne voulait pas me laisser seule, je l'ai assuré que tout irait bien et que j'irais chez des amis.

Je n'ai pas mis un pied dehors. Je sais que je ne suis pas guérie de tout ce qui s'est passé, mais j'ai vraiment ressenti ce vide pendant ces vacances. Ce point dans mon cœur ne cesse de se resserrer sur lui-même.

Pour rajouter une couche, tu m'as laissée dans l'incompréhension. Tu es venu devant ma porte, je ne voulais pas t'ouvrir, mais tu es resté là toute la journée. Alors j'ai cédé.

À peine ton regard posé sur moi, les larmes ont commencé à couler. Tu m'as serrée si fort que je ne savais pas si c'était moi, toi ou nous que tu consolais.

Je manquais d'air et tu me disais que tout irait bien. Nous étions assis par terre, adossés à la porte, et tu me tenais la main. Je ressens encore ce toucher si délicat, comme si tu avais peur que je me brise encore.

Tu ne disais rien, tu es juste resté là. Puis je suis allée dans mon lit et tu m'as suivie.

Ta tête était contre mon front et je me suis vidée de mots qui ne voulaient pas sortir : des souvenirs de mon père, de ma famille, du message que ma mère m'a envoyé, de la solitude que je ressentais.

« Des fois, j'ai envie que tout s'arrête, et tu es bien plus courageux que moi. J'aurais depuis longtemps traversé l'océan. »

Tu me chuchotais combien j'étais forte, que de nombreuses choses heureuses m'attendaient sur cette terre, que je ne devais jamais faiblir et que tu serais toujours là.

Au moment où j'allais dire que je ne te croyais pas, tu m'as coupée avec tes lèvres. Mon cerveau s'était éteint à ce moment-là et mon corps réalisait tout seul. J'ai suivi tes mouvements et, quelques minutes plus tard, je ne voyais plus rien.

Pourquoi as-tu fait ça ?

À chaque fois que je te croise, j'ai envie de te poser la question. Mais c'est comme si tu avais effacé ce moment de cette soirée. Alors je continue à avancer à la même longueur que toi.

Mon frère est venu le lendemain. Il s'est excusé de m'avoir laissée, mais à aucun moment je n'ai pensé qu'il m'avait vraiment abandonnée. Nous faisons simplement notre deuil de différentes manières. Je lui ai dit ce que maman m'avait envoyé : qu'elle pense fort à nous et qu'elle regrette. Elle a l'impression d'avoir fait trop d'erreurs pour se retourner, et que si elle revient, nous ne pourrons pas nous en sortir. Je n'avais pas la force de lui répondre qu'on avait besoin d'elle pour guérir, qu'on lui pardonnerait parce que c'est notre mère.

Je lui ai juste dit qu'on l'attendra et Leo et moi avons passé les jours suivants ensemble.

Il m'a parlé de l'université, qu'il trouve ça difficile après avoir fait autant de pauses, mais qu'il a vraiment envie de réussir. Il fait des études de psychologie, il en rit en disant que c'est ironique, sachant d'où il vient, mais que ça pourrait être sa force.

Il m'a aussi parlé de filles, de combien elles étaient belles et qu'une d'elles avait piqué son attention. Mais il la trouvait trop « perché », même si elle correspondait à ce qu'il recherchait.

Et il m'a posé des questions sur toi et Maxence. J'ai évité le sujet, et nous avons fait de nombreux marathons de films.

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