Neuvième lettre

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C'est sur cette balançoire que tu t'es livré. Encore une fois, c'est le hasard qui a bien fait les choses. Nous étions les deux seuls sous une nuit de pluie à nous confesser sous le vol de la lune.

Tu m'as raconté ton histoire et les pièces manquantes. Ton dos était marqué par les colères, ton corps entier saignait, et la maladie prenait aussi tes proches. Ta voix était éraillée, et malgré toute la force que tu essayais de montrer, je n'avais pas besoin de te regarder pour voir tes larmes se mêler à la pluie.

Nous sommes restés longtemps dans le silence. Nous n'avions pas besoin de nous tenir pour nous consoler ; notre silence suffisait. Il y avait juste toi, moi, les étoiles et la lune. Puis nous nous balancions en rythme, échangeant des questions totalement banales. Tes pâtes préférées sont celles au pesto, et ta boisson favorite est celle à la pêche. Ta saison préférée est l'automne, tout comme ta chanson de jazz préférée, "Autumn Leaves".

Nous essayions d'oublier ce qui nous rendait tristes, même si au fond, nous savions éperdument que nous serions brisés jusqu'à la fin. Mais c'est en étant ensemble que les blessures saignent le moins. Nous avons scellé notre amitié cette nuit-là, comme une promesse silencieuse.

Dans les couloirs, nous nous sourions, comme pour dire "Courage, je suis là", un message que personne d'autre n'entendait. Nous faisions le chemin du retour et avons pris l'habitude de regarder un film chez toi avant que je ne rentre. Avant de nous coucher, nous tirions des conclusions, comme si nous ne voulions pas que la journée se termine. C'étaient des excuses pour nous parler et nous raconter des choses. J'adore filmer le début de ces soirées, revoyant chaque générique que nous avons eu et que nous aurons dans le futur.

Finalement, c'est comme si nous créions une autre réalité, une bulle indestructible où tout va mal à l'extérieur, mais à l'intérieur, tant que nous sommes deux, c'est le plus beau des royaumes.

L'année se termine bientôt, et j'ai l'impression que tout s'est passé en une fraction de seconde. J'essaye de me concentrer pour le concours. Ayant pris énormément de retard, j'ai même hésité à tout arrêter. Mais je ne peux pas me permettre de lâcher prise. Pour l'avenir, je n'ai pas d'autres perspectives de vie. Je ne suis même pas sûre d'avoir mon examen l'année prochaine, ni d'être acceptée dans des écoles. Mais je veux me donner la chance de réussir et d'être heureuse.

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