CHAPITRE 8 - Aurore

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— Heu, j... Heu, j...

Je subis une explosion digne de celle qu'a subi Hiroshima. C'est peu dire. Il y a encore plus de dégâts : je croule sous les ruines de mes organes et de mes os, partis en charpie en une fraction de seconde. Je me noie dans mon propre sang qui s'épaissit en bouchant mes artères. Je me nourris de ma propre salive qui s'imprègne de toutes les saveurs que me transmet son corps si beau. Mes muscles se rigidifient sans que je ne leur en donne l'autorisation. Je perds totalement le contrôle. Chose que je m'étais promis de ne plus faire. J'ai failli à mon devoir, hélas.

Toutefois, sans même attendre une réponse de ma part et comme si je n'étais qu'un pantin, l'inconnu se penche dans ma direction et m'offre sa joue. Je suis si courte par rapport à lui que cela ne m'étonnerait pas que d'entendre son dos craquer lorsqu'il se baisse. L'ombre qu'il crée tout autour de moi lorsqu'il s'abaisse dans ma direction me prouve encore à quel point il me domine sans même me toucher, ni même m'adresser un seul mot. Je me sens comme enfermée dans une bulle de passion. C'est étrange, quand on y pense. Malgré tout, je lui tends mon visage par réflexe, avec une lenteur à peine croyable, sans pouvoir contrôler mon corps irrésistiblement attiré vers lui comme un aimant.

Qu'est-ce qu'il est beau...

Seigneur, qu'il est séduisant...

Qu'il est sexy...

Un soupçon de culpabilité m'envahit. Noah ne me lâche pas des yeux et semble déjà avoir compris ce qu'il se passait dans mon esprit. À mon grand regret. Je déglutis à maintes reprises, mais cette impression n'a soudain plus aucune once d'importance, lorsque nos deux peaux, celle de l'inconnu et la mienne, s'entrechoquent, car d'un seul coup et comme pour m'achever, le fameux parfum envoûtant revient. Il envahit de nouveau mes narines avec une douceur à peine croyable. C'est comme si je plongeais le nez dans le cœur d'une fleur rare et protégée, sans en avoir le droit. Comme si l'interdit me tendait les bras. Et si d'ordinaire, les floraisons s'évaporent en un battement de cil, cette fragrance-là finit par parcourir mon corps de part en part, en passant même dans mes vaisseaux sanguins pour y circuler librement et remplacer mon hémoglobine. En remplaçant la moelle dans mes os. En enveloppant l'oxygène qui circule dans mes poumons d'une étreinte solennelle. Je sens comme une certaine impression de déjà-vu.

C'est comme si je le connaissais déjà.

Je ne comprends pas.

C'est la première fois que je le vois.

Je profite des émanations de son corps, qui me renvoient à mon innocence perdue et qui en même temps, me prouvent encore une fois que je ne suis qu'une femme, une esclave de mes désirs les plus enfouis. Ceci dit, cet instant ne dure pas assez longtemps à mon goût. L'homme finit par s'éloigner, au bout de quelques secondes à peine, me laissant seule dans mon propre esprit à me demander ce qui a bien pu se produire à l'intérieur de moi. Je m'égare de pensées en pensées, en cheminant parmi l'inconnu, parmi un monde éclairé par la ferveur de sa peau mate qui me laisse imaginer sans la moindre difficulté à quel point la température de son corps ferait exploser celle du mien.

Au feu !

Appelez les pompiers !

Je continue de fixer l'inconnu, le cœur tambourinant à l'intérieur de ma cage thoracique, sans être capable de parler ni même de bouger. Noah m'observe avec attention et, même si je le constate du coin de l'œil, je ne peux même plus me battre. Mes iris sont absorbées par cette beauté indécente. C'est une émotion que l'on ressent rarement. Et en même temps, on prie pour ne jamais s'y habituer.

Qui c'est, bon sang ?!

QU'ON ME RÉPONDE !!!

Ma mâchoire inférieure en vient à se décrocher pour pendouiller au niveau de ma gorge à mesure que le temps s'écoule. J'ai l'impression d'être le personnage d'un vieux cartoon dont toutes les mimiques sont exagérées. Son visage à un mètre à peine du mien me fait sentir vulnérable, aussi prends-je le temps de l'observer en détail, de son regard aussi profond que l'éternité, à sa mâchoire cisaillée, en passant par ses lèvres que je mourrais d'envie d'embrasser sans attendre. C'est la première fois que je ressens ça depuis que mon ex m'a quittée.

ECLIPSEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant