Les fragments de l'ombre

Chapitre 11 : Le Sakura

Le lendemain du combat contre les Chasseurs de Sorcières, Willow se réveilla avec un goût amer dans la bouche et une douleur lancinante dans les membres. Le feu dans l'âtre était éteint depuis longtemps, et la lumière terne de l'aube peinait à traverser les fenêtres. La maison semblait plus silencieuse que d'habitude, presque trop calme. Willow se redressa péniblement, les souvenirs de la veille encore vifs dans son esprit. Elle avait remporté la première bataille, mais elle savait que ce n'était que le début.

Fenrir, encore sous forme de chien, dormait paisiblement près de la porte, son souffle régulier marquant une courte pause dans leur vie tourmentée. Raven, quant à lui, avait disparu. Il partait souvent en exploration avant l'aube, mais cette fois, son absence lui parut anormalement longue.

Willow se leva avec précaution, s'étirant pour apaiser ses muscles endoloris. Ses pensées tournaient en boucle. Elle savait qu'elle devait se préparer pour la suite des événements. Les Chasseurs ne reviendraient pas seuls. Ils n'abandonnaient jamais leur proie. Pour se défendre, elle devait se tourner vers des forces plus grandes, des alliés qu'elle n'avait pas vus depuis longtemps.

Elle jeta un regard rapide à Fenrir avant de se diriger vers la porte. Elle devait se rendre dans la forêt, à un lieu sacré que seuls quelques sorciers connaissaient. Un endroit où les ancêtres pouvaient être invoqués pour obtenir conseil et protection. Le Sakura, l'arbre des ancêtres, se trouvait au cœur de cette forêt, caché derrière une épaisse barrière de magie et de ronces. Willow s'était juré de ne le visiter qu'en cas de dernier recours. Ce moment était venu.

Elle enfila rapidement un imperméable et prit son sac, y glissant quelques herbes et cristaux protecteurs. Puis, elle sortit sous le crachin discontinu. La forêt s'étendait devant elle, majestueuse et terrifiante à la fois. Les branches dénudées des arbres formaient un labyrinthe de bois sombre et tordu, et le vent glacial sifflait à travers les feuillages neufs, comme les murmures de vieux esprits oubliés.

Le chemin vers le Sakura était long et périlleux, mais Willow le connaissait par cœur. Ses ancêtres avaient eux-mêmes emprunté ce chemin, guidés par le désir de protéger leur lignée et d'honorer les esprits qui les précédaient. Alors qu'elle avançait, elle sentit une présence familière la suivre. Raven.

Le chat noir surgit soudainement d'un buisson, ses yeux verts brillants fixés sur elle. Il ne fit aucun bruit, se contentant de marcher à ses côtés. Ensemble, ils progressèrent dans la boue, franchissant les obstacles naturels de la forêt. Les heures passèrent lentement, et le paysage devint de plus en plus dense et menaçant. Les arbres semblaient se resserrer autour d'eux, formant des ombres grotesques sur le sol. Willow sentait le poids des âmes des sorcières déchues qui avaient tenté de trouver refuge dans ces bois. Mais elle devait rester concentrée. Le Sakura était tout près.

Finalement, ils atteignirent une clairière cachée, un endroit que le temps semblait avoir oublié. Au centre de cette clairière se dressait l'arbre des ancêtres, le Sakura. Majestueux, il déployait ses branches noueuses vers le ciel, couvertes de fleurs de cerisier d'un rose pâle éclatant en cette saison. L'air autour de l'arbre était doux, presque parfumé, contrastant étrangement avec l'odeur de boue et de mousse détrempée environnant.

Willow s'arrêta à l'orée de la clairière, inspirant profondément. Elle n'était pas seule. Des silhouettes éthérées, les esprits de ses ancêtres, semblaient flotter autour de l'arbre, leurs formes transparentes se fondant dans la lumière douce qui émanait des pétales du Sakura. Ces âmes veillaient sur leur lignée depuis des siècles, prêtes à offrir aide et protection à celles qui osaient les invoquer.

Elle s'avança lentement, consciente de la solennité de ce moment. Raven la suivit, se faufilant silencieusement entre les herbes hautes. Une fois au pied de l'arbre, Willow s'agenouilla, posant ses mains sur le sol gelé. Elle murmura une prière ancienne, une incantation transmise de génération en génération, et attendit.