En cette fin de soirée, alors que d'épais nuages sombres viennent masquer l'astre solaire mourant sur son lit d'horizon et que le ciel revêt sa robe de noirceur, l'homme, qui n'est plus qu'une ombre vorace dissimulée quelque part derrière l'angle d'un immeuble, attend la sortie de la jeune femme. De cette innocente qui, en ce moment même, se trouve dans un bar. Bar dans lequel elle s'est rendue pour y fêter les dix-sept ans de l'une de ses proches amies.
Sur cette jeune femme, il avait senti l'odeur de sa proie, celle de sa sueur, celui de son parfum entêtant. Cela s'était produit cet après-midi, quand il l'avait croisée dans un couloir de l'université. Intrigué et après un bref moment d'hésitation, il s'était finalement décidé à la suivre jusqu'à l'amphithéâtre, pour s'approcher d'elle à son insu. Il voulait s'assurer qu'il ne se trompait pas, que ses sens, que son imagination, ne lui jouait pas un tour.
Mais dès lors qu'il s'était assis près d'elle, il avait su, et cela en dépit des nombreuses douches qu'elle aurait pu prendre depuis tout ce temps ; il sent toujours son odeur sur elle. Et en un instant, il avait compris que cette jeune femme et sa proie—l'objet de son dévorant désir—s'étaient forcément rencontrées très récemment. Qu'elles avaient été très proches. Trop proches. Qu'elles avaient peut-être été ensemble le temps d'une nuit, ou de plusieurs.
Derrière ses rétines, il se les imagine, s'enlaçant, s'embrassant avec passion. Leurs mains se caressant ici et là. Le bout de leurs doigts glissant avec délicatesse, fluidité, effleurant avec douceur le bout de leurs seins, traçant mutuellement les courbes de leur anatomie, pour finalement aller se perdre dans leurs intimités.
Dans son esprit, il les voit avec clarté. Leurs corps pressés l'un contre l'autre, dans une ambiance tamisée et torride. Corps chauds et dévêtus, à la peau parfumée et humide de sueur. Dans sa tête, il entend leurs ébats, leurs gémissements, leurs cris d'extase.
Il revient à la réalité, se recentrant sur son objectif. Sa vision lui a tout de même laissé un arrière-goût dans la bouche.
Un goût de dégoût.
Maintenant, il ne pense plus qu'à elle. À cette femme qui a réussi à lui échapper. Femme qu'il se doit de retrouver pour atteindre son but et cela, quel qu'en soit le prix à payer. L'objet de ses pensées était si proche et pourtant, il se trouvait si loin. Il sait qu'elle est là, quelque part. Il le sent. Mais il ne sait pas pour autant avec exactitude où cette dernière se trouve. Il n'en a qu'une très vague impression. Si vague qu'il doit se résoudre à interroger cette fille, qui en ce moment, se trouve dans l'établissement. Après, ce qu'il fera d'elle une fois la question posée, il ne le sait pas.
Pas encore tout à fait.
Dans les cieux, au-dessus de lui, les premiers crépitements de lumière bleutée commencent à déchirer le linceul menaçant qui, lentement, assoit de toute son immensité son implacable emprise sur la région. Dans leurs habitations, les hommes bien au chaud chez eux se terrent à l'abri. Dans les forêts, les animaux se cachent, se protègent.
Alors que le vent se lève, forcit, les volets des maisons claquent en chœur dans de grands fracas, le ciel d'encre doucement se crève, déversant ses myriades de gouttes de pluie qui s'en vont assaillir les terres en contrebas. Au loin, le lourd roulement du tonnerre se fait entendre, annonçant l'arrivée prochaine de sa majesté Tempête, qui le temps d'une nuit vient imposer une nouvelle fois son règne de peur.
L'homme, toujours immobile, attend patiemment le moment propice pour demander à cette jeune fille où sa proie est partie se réfugier.
Les gouttes glacées lui tombent dessus, ruisselant sur son corps.
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- Schen ùndjé -- Le sang des innocents -
VampirosIl s'agit de mon 1er roman en cours d'écriture: Post face: Je m'appelle Lara Keeble. J'ai presque cent quatre-vingt-dix ans. Je suis ce qu'on appelle communément un vampire. Je ne suis pas celui tout à fait celui de vos histoires qui hante vos nuits...