- Schen ùndjé -- Le sang des innocents -

VINGT TROIS

Cela fait plus d'une dizaine minutes maintenant, qu'elle est partie à sa poursuite en sautant à travers la fenêtre, comme si de rien n'était. En temps ordinaire, je serais plus que surpris par la prouesse qu'elle a réalisé devant mes yeux, mais maintenant, je m'en n'étonne plus vraiment.

Je comprends maintenant pourquoi elle était la meilleure sur le terrain pour traquer les suspects. Avec ses capacités hors du commun, personne ou presque, ne pouvait lui échapper, ou lui montrer une quelconque résistance lors de leur interpellation. Elle maitrisait les divers malfrats toute seule sans aucun problème et à la vue de sa carrure et de ses résultats, certains collègues se posaient beaucoup de questions sur elle et rapidement les rumeurs n'ont pas tardé à circuler sur sa personne.

Ni les quolibets.

Certain disaient qu'elle se dopait aux amphètes, qu'elle avalait toutes sortes de substances plus ou moins illicites pour atteindre ses performances. Certain l'appelaient le monstre, la Faucheuse en raison de son apparence et d'autre le vampire et de ses besoins médicaux particulier. Dire que ces connards pour le coup, sur ce dernier point, étaient involontairement dans le vrai. Elle a toujours exécré et à juste titre, ces réflexions puérils sur sa personne, qui en disaient long sur leurs auteurs. Moi-même, je détestais ces remarques. Tout comme ceux qui les proféraient. Elle faisait très bien son boulot, respectait scrupuleusement les procédures et humainement, aussi étrange que cet adjectif puisse s'appliquer à elle, c'était vraiment une personne formidable avec qui travailler, tout comme côtoyer.

Maintenant, après avoir découvert son autre visage, la partie sombre de ce qu'elle est, le vampire qui tue, je me sens perdu. Si elle avait été humaine, après ce qu'elle a fait, je ne me serais posé à aucun moment quelques question sur la suite des évènements.

Il y a longtemps que je l'aurais déjà coffrée.

Mais là, je n'ai pas affaire à un être humain et avec elle, je me sens impuissant. En colère. Car elle défit les règles morales qui dictent ce en quoi je crois. Elle ébranle ma conception du bien, du mal et de la justice.

La justice imparfaite des Hommes.

Mais qu'elle genre de justice peut s'appliquer à Lara, Sandrine ou encore à notre assassin ? Ou bien encore, à cette surprenante femme au Carrousel, cette Sébile.

Dans la voiture, j'ai très bien vue qu'elle était profondément affectée par la mort du gamin. Qu'elle s'en voulait horriblement pour l'acte effroyable qu'elle a commis.

Mais paradoxalement, elle ne m'a pas montré un seul affect pour ceux qu'elle a massacré dans le restaurant. Comme si avoir ôté leur vie, ne représentait rien pour elle. Une mort de plus dans le cours de son existence. De sa très longue existence.

En revanche, il semble qu'elle soit en conflit incessant entre sa nature de prédatrice et son humanité, entre sa conception du bien et du mal, perçue à travers le prisme de sa nature vampirique. Pour elle, cela pourrait être un exercice constant d'équilibrisme.

Soudainement, je pense soudainement à la petite Eva et sa grosse peluche. Et étrangement, cette pensé me fait sourire.

Je regarde ma montre. Ça fait maintenant quinze foutus longues minutes qu'elle est partie sur ses traces et toujours rien.

Aucun signe d'elle ou de la gamine à l'horizon.

Elle tarde à revenir avec Justine et je commence vraiment à m'inquiéter pour la gamine. J'espère que qu'elle ne l'a pas tuée elle aussi par accident, comme le gamin l'autre soir.

Non, elle me la promit. Je chasse cette pensé de ma tête. Je sens qu'elle veut bien faire. Non, je sais qu'elle le veut, mais j'ai quand même peur pour la gamine.