Chapitre 52

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La nuit commençait à tomber quand je franchis la porte de chez Alexis. Le quartier, enveloppé d’une tranquillité étrange, semblait encore plus silencieux que d’habitude.

Alexis m’attendait à l’entrée, les mains dans les poches, avec une expression indéchiffrable. Il me sourit légèrement en me voyant arriver, mais ses yeux trahissaient une certaine gravité.

- Salut, dit-il simplement en m'invitant à entrer.

- Salut, répondis-je, un peu nerveuse.

Il referma la porte derrière moi, et je le suivis jusqu’au salon. L’atmosphère de sa maison avait quelque chose de réconfortant, mais aussi de pesant.

Chaque recoin semblait rempli d’un silence qui nous entourait, comme si même la maison savait que ce moment serait l’un de nos derniers.

- Je… je pensais qu’on pourrait passer un peu de temps ensemble, dit-il en évitant mon regard. Avant que tu partes.

Je lui adressai un sourire, touchée par sa sincérité.

- Oui, ça me fait plaisir.

La soirée avait une atmosphère douce-amère, empreinte de cette gravité légère qu’on trouve parfois dans les moments partagés, sachant qu’ils sont comptés.

J’observais Alexis en silence, notant la façon dont la lumière de la lampe caressait son visage, en capturant le détail de ses traits comme une photo mentale que je voulais garder intacte.

L’idée qu’il s’apprêtait, lui aussi, à partir, à quitter cette ville pour les États-Unis, planait comme une ombre discrète, un rappel constant de ce qui nous attendait tous les deux.

Assis sur le canapé, nous parlions d’abord avec légèreté, reprenant certains souvenirs, évoquant quelques instants drôles et des anecdotes absurdes.

C’était comme une danse de mots et de rires pour éviter les sujets trop sérieux. Mais inévitablement, la conversation glissa vers l’avenir.

- Alors… tu es prête pour ce départ ? demanda Alexis, feignant un détachement, mais sa voix trahissait une certaine mélancolie.

Je haussai les épaules, un sourire presque triste aux lèvres.

- Prête, oui… mais en même temps, pas du tout, murmurai-je. Quitter cette maison, quitter tout ce qui me rappelle mon père… c’est difficile, mais je le fais pour Lili, pour nous.

Il acquiesça en silence, regardant ses mains comme s’il cherchait les mots. Finalement, il reprit.

- Tu sais, partir, ça me fait peur aussi, admit-il. Même si j’ai toujours eu l’impression d’être un étranger ici sans ma mère et ma sœur, cet endroit, ça reste… tout ce que je connais. Et pourtant, je vais le faire. Parce que… parfois, on n’a pas vraiment le choix.

Il se tut un instant, puis reprit, comme s’il hésitait à laisser paraître cette vulnérabilité qu’il avait toujours eu du mal à exprimer.

- Mon père n’attend que ça, de m’emmener là-bas. Je sais que c’est sans doute la meilleure chose pour moi, même si… je me demande si je suis prêt. Et l’idée de ne plus te voir, de ne plus avoir ces moments comme maintenant, ça…

Sa voix s’éteignit. C’était rare de le voir si honnête, si ouvert. J’aurais voulu trouver les mots pour apaiser cette peur en lui, mais je savais que rien de ce que je dirais ne changerait la réalité.

Pour le taquiner, et peut-être alléger l’ambiance, je pris un coussin du canapé et lui lançai doucement en souriant.

- Tu devrais t’occuper l’esprit avec autre chose qu’avec ton piano et ta collection de vieux disques, lui dis-je d’un ton léger, cherchant à le distraire.

A twist of fateOù les histoires vivent. Découvrez maintenant