Une vie éteinte

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La forêt était silencieuse, comme si la nature elle-même retenait son souffle. Iamua, la guérisseuse, avançait lentement entre les arbres, son regard intense scrutant chaque plante, chaque racine. Elle murmurait des incantations, demandant aux esprits des forêts de lui accorder les plantes qu'elle cherchait. Elle savait que chaque minute comptait. La vie d'Eleanor et de l'enfant qu'elle portait dépendaient de son succès.

Les herbes, les racines et les baies qu'elle récoltait dans la forêt étaient ses alliées, mais même elle, pourtant maîtresse des savoirs anciens, n'était pas certaine que cela suffirait à inverser les effets du poison. Le destin des deux vies qu'elle tentait de sauver semblait scellé, et pourtant, elle refusait de laisser la fatalité l'emporter.

Raiatea était debout, son regard sombre scrutant les visages des conseillers et des anciens autour de lui. La grande salle du conseil était remplie de murmures. L'assemblée, d'abord prête à célébrer une bonne nouvelle, était désormais dans l'attente. Raiatea, pourtant, n'était pas là pour annoncer une joie, mais un malheur. Son cœur était lourd.

« La vahine arii est enceinte. » Il laissa les mots s'échapper, mais son ton trahit sa douleur. À cet instant, toute l'assemblée ressentit une onde d'émotion. Certains s'apprêtaient à se réjouir, mais Raiatea les arrêta d'un geste ferme de la main.

« Elle a été victime d'un empoisonnement. Celui qui a cherché à tuer la mère de notre futur héritier a porté atteinte à la vie de notre peuple, à l'avenir même de cette terre. » Sa voix était glaciale, ses yeux brûlant de colère et de douleur. « Nous devons retrouver cette personne, et elle sera exécutée sans discussion. Ses complices, qu'ils soient proches ou éloignés, subiront le même sort. Le peuple doit savoir qu'aucune trahison ne sera tolérée. »

Le silence qui suivit était lourd de compréhension, de peur et d'angoisse. La grandeur de Raiatea et son autorité ne laissaient place à aucune remise en question. Mais, parmi les conseillers, un seul homme sentit un frisson de terreur glisser le long de sa colonne vertébrale : Matui. Il savait, au fond de lui, que sa propre fille était la principale suspecte, celle qui avait le plus à gagner de la mort d'Eleanor et de l'enfant. Son visage, habituellement impassible, était maintenant marqué par la peur. Il savait que tout ce qu'il avait bâti pourrait s'effondrer si la vérité venait à éclater.

Après la réunion, le conseil dispersé, Matui s'élança hors de la salle. Sa respiration était précipitée, son cœur battait la chamade. Il se rendit à la case de sa fille, son pas lourd et rapide. Quand il arriva, il entra sans frapper, son regard perçant se posant immédiatement sur Naria.

« Naria, » dit-il, d'une voix grave, presque accusatrice, « qu'as-tu fait ? »

Elle leva les yeux vers lui, un mélange de peur et d'incertitude dans son regard. "Je... je ne voulais pas que cela se passe ainsi," murmura-t-elle, sa voix brisée. "Je pensais que si je la rendais stérile, elle ne pourrait pas avoir d'enfant avant moi. Mais je ne savais pas qu'elle était enceinte... Je... je ne savais pas."

Matui, tremblant de colère et de peur, s'approcha d'elle, la saisissant par les bras. "Tu es folle, Naria ! Ce que tu as fait est impardonnable. Si Raiatea découvre la vérité, tout est fini. Tout." Il lâcha un soupir lourd de regret. "Tu dois fuir, maintenant. Va-t'en avant qu'il ne soit trop tard."

Le regard de Naria se fixa sur lui, déchiré entre la colère et la tristesse. "Et toi ? Que feras-tu ?" demanda-t-elle, la voix tremblante d'émotion. "Pourquoi me rejeter maintenant ? C'était toi qui m'as poussée à tout ça. Je l'ai fait pour toi, pour que tu sois fier de moi, pour que tu me voies enfin digne."

Matui, évitant son regard, murmura d'une voix cassée : "Je ne peux pas perdre ma place, Naria. Pas maintenant. Tu as fait une erreur grave, et il est trop tard pour revenir en arrière."

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