« - ... Vous l'avez trouvée ?
Le garde qui face à Al'Aaric est droit comme i, le casque de son armure porté sous son bras, pince les lèvres tout en hochant négativement le menton. Ce qui ne fait que contrarier d'avantage l'homme chargé de diriger cette troupe et plus encore, qui soupire tout en se redressant. Dans l'Atrium principal, une longue table formant un U trône et s'impose avec force. Planté au sommet de la console de pierre, Alaric commence longuement et minutieusement à détailler le garde. Ce dernier semble en proie au doute et à la crainte, face à ce dirigeant imposant et nouvellement nommé. Si le père d'Al'Aaric avait une réputation terrible, celle du jeune homme reste encore à forger. Pourtant, l'influence de son géniteur perdure. A présent perché sur ses longues guibolles, le géant aux opales limpides frotte sa tête avec dépit. Tout est de sa faute, mais il n'avait plus le choix. Agir dans la précipitation était sa seule chance de ramener Abys ici ... saine et sauve.
-Disposez, ordonne Al'Aaric en achevant le garde d'un regard polaire, gardant les lèvres fermement closes jusqu'à son départ.
Ce n'est qu'après un long moment de silence, que ce dernier se voit brisé.
- Tu sais ... commence Xan'Dras, assise à côté de lui depuis le début, quoiqu'un peu trop silencieuse. Klyde est avec elle comme prévu, et elle est loin d'être inoffensive ...
- Je sais, grogne-t-il en fixant obstinément la table. Mais elle est perdue, je l'ai vue dans son regard, Xan ... quelque chose cloche. Elle n'était pas préparée comme elle l'aurait dû. Ed'GAard n'a pas fait son devoir. Il nous a ...
- Trahis ? Le mot est fort, gamin.
Soudain, les deux têtes rousses se lèvent de concert vers l'entrée de l'Atrium, scrutant le vieil homme juché dans l'encadrement immense. Al'Aaric se voit aussi surpris de le voir que d'aviser un jeune homme brun à ses côtés. Légèrement échevelé et perdu. Chacun portant l'uniforme nécessaire à la pratique militaire. Les prunelles d'Al'Aaric dansent d'un homme à l'autre, reconnaissant le vieillard sans pour autant mettre un nom sur l'homme à ses côtés. Il semble pourtant mal à l'aise et en décalage avec le reste. Paupières plissées, le chef réalise soudain qu'en face de lui, se tient l'acolyte d'Abys. Ses recherches n'ont pas été veines, mais il ne comprend pas ce que ce dernier fait ici. Ni comment Ed'GAard est parvenu à réintégrer Echos. Est-il entré par le Portail en même temps qu'eux ? Si c'est le cas, alors sa négligence vient de monter d'un cran.
- Ed ... souffle finalement le Chef en dépliant l'échine, Xan'Dras l'imitant timidement.
L'intéressé lève une main ferme dans l'air moite, les incitant au silence. Et Al'Aaric, tout dirigeant qu'il soit, obtempère immédiatement. Une légende se tient devant lui, qu'il n'avait plus vue depuis des années. Qui plus est un aîné d'une centaine d'années. Un vrai rock, une force de la nature. Un monstre aux apparences d'homme dont les femmes et les hommes usaient à outrance pour effrayer les enfants trop agités le soir dans leurs couches. Bien des histoires avaient été comptées à son sujet. Et jamais il n'avait été capable de démêler le vrai du faux. Ce qui avait rendu à ses yeux d'enfants le maître d'Arme Ed'GAard plus impressionnant et inquiétant encore.
- Tu as perdu ma petite fille ... note lentement le vieillard, dont les cheveux virent à présent aux gris. Tu devais veiller sur elle et la garder saine et sauve. On avait un marché ...
- Je sais, mais ...
- Non ! Ecoute-moi bien. Elle en sait des choses, la gosse. Se défendre, oui. Refaire le portrait à ceux qui l'emmerderont, aussi.
Al'Aaric ne peut s'empêcher de froncer les sourcils, certains mots lui paraissant parfois ... étrangers. Il lui semble que le dialecte du vieillard s'est légèrement aiguisé et familiarisé, avec le temps. A présent, Ed'GAard est tout près d'eux, seule la table sombre faisant office de barrage, mais permettant ainsi à l'homme de percevoir les rides qui creusent un visage fatigué par les vingt dernières années. Quant au garçon derrière, il semble vouloir rester en retrait tout en affichant le regard vague et trouble de celui qui ne comprend rien.
- Mais elle ne sait rien de ce monde parce que je ne le voulais pas ! Je t'avais dit de la laisser tranquille ! Je n'ai rien dit à Abys, pour son bien. Elle ne connaît ni la vérité sur ses parents, ni sur ce qui l'attend ici avec toi ! Et encore moins sur le fonctionnement de ce monde-ci. Forte et déterminée ou pas, elle a de gros problèmes là, dehors !
Ed'GAard fait à présent les cents pas dans l'espace confiné que forme la grande table en U, soufflant vivement avant de s'exclamer :
- Elle ignore tout, Al'Aaric. Ton père était un fou pédant, mais pas toi. Tu m'avais promis. Bon sang, elle ignore même que celui qui l'accompagne est en fait son frère !
Al'Aaric ne prend même pas la peine de demander à son aîné ce qu'il sait exactement, il était certainement là depuis le début à rôder dans l'ombre, écoutant aux portes de l'Atrium. Mais à cet aveu craché avec virulence, le brun discret réagit enfin, lâchant une exclamation surprise.
- Pas maintenant William, le coupe Ed'GAard, tournant soudainement le menton vers la console accrochée au mur.
Le petit appareil clignote soudainement, émettant plusieurs bips furieux. La sonnette d'alarme. Xan'Dras réagit aussitôt en bondissant de son siège avec souplesse, pour foncer vers l'appareil et plaquer sa petite main sur l'écran. L'immense bulle de verre qui les entoure s'éclaire alors soudainement, des milliers d'Hexagones s'éparpillant comme un nid d'insectes à l'infini vers l'extérieur de la bulle de verre. Laissant à chaque regard l'occasion d'admirer des milliers d'étoiles et de galaxies s'ouvrir à eux. Au-dessus de leurs têtes, un vaisseau immense aux couleurs pourpres progresse à grande vitesse vers la Citadelle. La rouquine lâche à nouveau un blasphème guttural, avant de s'écrier avec horreur :
- Armée du Sud, c'est leur estampille ! »
D'un commun accord, Al'Aaric et Ed'GAard décident de repousser la discussion à plus tard. Abys ne peut définitivement plus attendre.
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Voilà pour l'interlude. Oui, il est court, mais c'est bien le but d'un interlude. Devinez qui va être encore sacrément furax au prochain chapitre ? Oui, je suis sûre que vous avez deviné. Alors, vous vous doutiez de la nouvelle bombe que vient de lâcher Edgard ?
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ECHOS - La sentinelle pourpre. T.1 ( 1er jet )
Science FictionQu'est-ce qui peut changer votre vie ? Une relation ? Un espoir brisé ? Gagner au Loto ? Devenir votre propre patron ? Tout foutre en l'air et partir pour une autre vie sous un coup de Folie ? Ces choses en apparence dérisoires qui peuvent avoir une...