16. Paris

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Paris, √

17h25

C'était agréable de déambuler dans les rues parisiennes au bras de Dave Sherley. Emma remarqua que, durant leur promenade dans un petit parc, on les observait curieusement. Elle ne savait pas si les gens qu'elle rencontrait sur son chemin reconnaissaient Dave mais elle ne s'en préoccupait pas tant elle était au septième ciel. Son bras était coincé sous celui du jeune homme et bien que la pression qu'il exerçât soit assez forte pour la gêner, elle ne dit rien, trop heureuse d'être si près de lui. Leurs habits se touchaient, leurs corps se frôlaient pour le plus grand plaisir de la jeune femme qui avait l'impression d'être retournée quelques années auparavant, tant elle se sentait comme une adolescente dans les premiers temps où l'on découvre l'amour. Quand elle inspirait profondément, ce n'était pas l'odeur agréable de la pluie qui avait mouillé l'herbe la nuit dernière qui venait en premier lieu mais bien le parfum enivrant de l'entrepreneur. Elle aurait presque aimé nicher sa tête dans le cou du jeune homme. Elle trouva son comportement stupide mais cela ne l'empêcha pas de continuer à penser à ces gestes étranges qu'elle aimerait faire.

A côté, Dave était plus discret et arrivait mieux à taire ses désirs bizarres qui s'éveillaient quand Emma était à proximité. Il ne pensait plus à rien et c'était agréable de laisser son esprit dériver vers des pensées plus heureuses que l'opération de Daisy. Il comparait ce moment de calme à une vraie délivrance. Rien n'était plus agréable que de se sentir dans la peau d'un homme de son âge, ayant une vie des plus banales, à côté de sa tendre bien-aimée. Il se disait fou de penser à cette jeune femme de cette façon mais secrètement, il se demandait si elle ressentait la même chose. Avait-elle aussi de légers picotements dans son ventre ? Sentait-elle son cœur battre à tout rompre, presque en proie à un évanouissement ? Dissimulait-elle l'envie secrète de poser ses belles lèvres écarlates sur les siennes, dans un tendre et passionné baiser ?

Il rêvait, divaguait mais c'était à la fois étrange et plaisant de se laisser porter par ces douces pensées. Combien de temps s'était-il écoulé depuis qu'il n'avait pas ressenti de tels sentiments ? Le seul mot qui lui venait à l'esprit était 'Longtemps'. La dernière fois qu'il s'était cru amoureux, ça remontait au bal de fin d'année, celui qui clôture des années de dur labeur au lycée. Il avait invité une jeune fille à danser, bafouillant légèrement tandis qu'elle n'avait fait que rire. Mais quel rire ! Il semblait encore l'entendre... Mais il se rendit vite compte que ce n'était pas celui de la jeune fille du bal mais bien le rire cristallin d'Emma qui venait de se retrouver par terre sans qu'il puisse savoir comment.

Il l'observa tandis qu'elle riait aux éclats, son visage tâché par la boue qu'elle n'essayait pas de dissimuler. Elle avait dû tomber à la renverse et sa tête avait rencontré la terre molle du square sans qu'elle ne se blesse. Il se baissa à sa hauteur, admirant les fossettes qui se créaient au coin de ses joues rosies par le froid ou l'excitation, et lui demanda si tout allait bien. Elle répondit par un rire, toujours incapable de se contenir et, singulièrement, il se trouva captivé par la joie qui émanait de son visage. Les boucles rousses de ses cheveux frôlaient la terre sans jamais perdre de leur brillance, se mélangeaient au peu de feuilles qui parsemaient le parc au début de l'hiver tandis que les yeux d'Emma se perdaient dans les siens.

D'où elle se trouvait, elle avait une magnifique vue sur Dave. Il la surplombait de toute sa hauteur, la dominant. Quand il s'approcha d'elle, elle retint son souffle ce qui fut compliqué étant donné qu'elle n'avait fait que rire éperdument les dernières secondes. Les nuances de marron et de dorées des yeux de Dave étaient captivantes, presque hypnotisantes et si le souffle de Dave ne s'était pas avéré être si près d'elle qu'elle pouvait en discerner l'odeur, elle n'aurait certainement pas bougé ne fut-ce que d'un millimètre. Il était là, près d'elle, dans son élégant manteau noir déboutonné comme s'il affrontait le froid avec témérité, l'observant d'une manière si différente qu'elle fut tout d'abord bouleversée. Elle sentait couler sur elle les regards des passants mais qu'importe qu'elle ait de la terre sur le visage ou qu'elle soit trempée, Dave la regardait ! Une envie ardente de l'embrasser la titillait nerveusement et elle dut détourner le regard un instant. Le temps d'après, leurs lèvres bougeaient ensemble dans une danse effrénée, incontrôlable comme si tous les deux avaient pris conscience de l'absurdité qu'ils faisaient en dissimulant leurs sentiments. Elle était toujours à même la terre, Dave la surplombant, sa tête penchée vers elle, rien que vers elle. Elle pressa un peu plus ses lèvres vers lui (ou alors était-ce lui qui était à l'origine de ce geste) sans bouger, immobile comme si elle n'avait été dotée que de lèvres, des lèvres faîtes pour aimer, embrasser.

10 000 mètres au-dessus de l'Atlantique [terminée - correction]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant