Chapitre un – instructions
Dernier été 2499 de l'ère de Taligah
Les compteurs du temps sont remis à zéro à chaque symbiose. Ainsi, lorsqu'Araya et Taligah fusionnèrent, l'année se nomma première de l'ère Taligah.
Trois saisons chaudes et trois froides composent une année, une révolution de Zaïa, la planète de gaz, autour du soleil.
*
Juste avant les glaces éternelles, le territoire du roi arzac abritait un château à cinq tours coiffées de toits pointus qui s'élançaient si haut vers le ciel qu'au cours des veillées, on contait des histoires folles sur ces bâtisseurs. Les meilleurs architectes l'avaient érigé voilà cinq mille ans pour préserver la population des assauts miobés et, malgré son âge, il restait aussi fonctionnel qu'au moment de son inauguration.
De longs édifices et d'interminables passerelles jetées dans le vide à mi-hauteur reliaient les quatre tours extérieures entre elles. Des meurtrières trouaient la première muraille que l'on voyait en arrivant. Des créneaux la couronnaient. Les légendes racontaient qu'ils protégeaient les archers des guerriers miobés.
Non loin de l'entrée principale, une volée de marches bleues conduisait le visiteur sur un vaste perron qui soulignait une porte. Celle-ci s'ouvrait sur un large couloir qui menait vers la salle sacrée. Depuis Taligah, des carrés de fleurs aux parfums envoûtants remplaçaient les douves et le pont-levis, abaissé à jamais, invitait à passer librement sous cette arche profonde pour se rendre sur une place lumineuse, propre, conviviale. La cinquième tour, plantée au centre de ce château rectangulaire, séparait les commerces des dépendances seigneuriales.
En son sein logeaient la famille royale et ses serviteurs.
***
– Aujourd'hui, je vais vous parler de la création des livres qui nous lient à l'inexplicable, annonça le grand-mage aux deux jeunes Sharzacs sagement attablés.
Il faisait face à Comor, fils du roi Ossoto, et à Mori qu'Araya avait choisi comme promis. Son essence investirait l'enfant à sa maturité, Axiam, grand-mage en osmose avec l'entité, le savait.
Attentifs, les yeux pétillants d'intérêt, les garçons posèrent le menton sur leur poing dans un même geste.
– Tout a commencé par l'apparition du livre de Bahass : la Force. Avant-hier, je vous ai parlé de ses difficultés à communier avec les Miobés, vous vous souvenez ?
Ils opinèrent.
– Je vais vous lire un passage du testament de Râad, le premier grand-mage Araya. Cet écrit nous renvoie six mille ans en arrière, à l'époque de la grande évolution. C'est pourquoi il a titré son ouvrage : récit du renouveau. Grâce à lui, nous connaissons la genèse des livres sacrés et l'histoire de Gahila depuis ses débuts. Cet extrait précède l'invasion des Miobés. Écoutez bien : « Sur d'autres mondes aujourd'hui détruits, Bahass avait vu des hommes communiquer entre eux en écrivant sur la matière. Elle parvint à insuffler cette idée à son mage miobé qui se mit aussitôt au travail. Il bâtit un livre qu'il nomma "Force", car il en émanait un puissant désir de conquête. Bahass avait déjà écrit par le passé, elle savait donc former les mots sur ce genre de support. Par le biais des rêves, le mage apprit à lire les signes premiers ».
– La Force est née avant le Pacte, alors ! s'exclama Comor.
– Oui, Araya est arrivée après Bahass qui avait déjà commencé son œuvre de destruction à travers le peuple miobé. Mais Araya s'est montrée plus attentive à ce monde.
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Gahila
Science FictionAux confins de l'univers, deux entités se disputent les âmes des mortels. Leur faim insatiable et leurs duels incessants provoquent la destruction des mondes qu'elles enveloppent de leur essence, ce qui les oblige à l'éternel exil. En l'an 2499, sur...