Bonus : chapitre 12 : Evasion (1)

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Bonjour, ce chapitre est un bonus, car il n'apparaît sur aucun des liens qui proposent Gahila à la vente (comme amazon, koboo, etc). Je le propose en inédit ici afin de faire un peu connaître cette trilogie. Merci à ceux qui me suivront jusqu'au bout de ce dernier chapitre.


Chapitre douze – Evasion

Thora ferma les yeux plus longtemps que nécessaire. Il devait se calmer sinon il ne parviendrait pas à se connecter à l'esprit de sa mère. Il éprouvait tant de colère. Il s'en voulait d'avoir agi sans réfléchir et parce qu'il avait eu peur pour la première fois. Ce vieux l'avait énervé aussi. Arzi. Nom d'un lay putréfié ! Pourquoi ne l'avait-il pas écouté ?

Salia l'entendit, mais se tut sur son désarroi. À peine rassuré, l'adolescent s'étendit au sol et rumina ces derniers moments. Jamais on ne l'avait menacé comme l'avait osé Arzi. À cause de lui, il avait perdu la raison. Enfin quoi ? Il était plus posé d'ordinaire ! « N'allez pas dans le noir ! » Quoi ? Croyait-il posséder ce sous-sol ? En était-il le propriétaire ? Rien de mieux qu'un taulard ! Comme eux ! De quel droit lui interdisait-il l'endroit le plus précieux ? L'eau, la vie. Il avait si soif.

« Si tu y vas, tu ne reviendras jamais ! »

Thora, treize ans, avait fulminé de toute sa jeunesse. Il ira étancher sa soif ! Et en tant que chef de groupe, il se sacrifie et ne demande pas à ses soldats de le suivre. Il part en éclaireur et reviendra vainqueur. « Sois courageux, plus téméraire que les autres », lui disait sa mère. Pas besoin de ses encouragements pour briller, mais bon, il appréciait les mots à leur juste valeur.

Il s'était enfoncé dans l'obscurité.

***

L'eau clapota sur le bout de ses bottes de prince. Il l'entendit sans la voir, l'ombre l'avait happé d'un coup. Thora s'accroupit, immergea ses doigts dans ce liquide tant désiré puis les porta à sa bouche pour la goûter. Elle n'avait pas l'air avarié. Assoiffé, il y trempa les mains, lapa, retrempa. Enfin, il s'agenouilla et y plongea le visage. « C'est bon, personne ne me voit. Ils sont tous là, le souffle coupé à contempler ce néant qui me cache ». Les piqûres lui lacérèrent la peau si finement qu'il confondit cette sensation avec des frissons. Il vibrait de plaisir à boire cette eau enchanteresse si exaltante. Mais les incises se multiplièrent et il se roula en boule afin de s'y soustraire.

Point de hurlements, pas le plus petit gémissement de douleur. Il se concentra sur cette lutte interne et perdit connaissance. Son corps s'étala dans ce clapotis divin qui le lécha encore et encore.

Il reprit ses esprits dans des ténèbres immuables. Comment reconnut-il la présence des gorstoys, ces insectes légendaires disparus depuis près de trois mille ans ? Bahass vivait en lui, il la sentait tapie en son âme. Sa mère avait raison, seule la Force le sauverait. L'Arc-yal demeurait une bonne doctrine, certes, mais...

L'ouïe aux aguets, Thora releva d'abord la tête puis s'aida des mains pour se décoller du sol. Il n'entendait pas un bourdonnement de ziales, ces butineuses de la taille d'un pouce. Inoffensives. Non, ce son-là rendait plus fin à l'oreille, il hérissait la fourrure d'angoisse. Son cœur resta pourtant lent de battements.

« Réfléchis, réfléchis ». Inspirations et expirations s'espacèrent. Il prit conscience du danger. On veillait sur les œufs et sur lui, promu couveuse. L'essaim ne le laisserait pas sortir des ténèbres quitte à paralyser son corps et ça, il ne le voulait surtout pas.

Voyons, l'instruction de Salia... ce qu'elle lui enseignait depuis sa naissance. En vérité, sa mère n'avait fait que dispenser son cours jusqu'à présent. De l'amour, il n'en avait pas besoin puisqu'il connaissait le rôle qui lui était attribué sur Gahila. Lentement, il se redressa et l'air frémit autour de lui. D'accord, il s'était fourvoyé, il avait péché. Encore une fois, il s'obligea au calme du corps. Au tour de son cerveau de bouillonner, de trouver une solution pour sortir de là.

Il s'assit sur les talons et contempla les ténèbres, c'est-à-dire rien, mais peu importait, le tressaillement protecteur et menaçant s'estompa au fil de ses incantations. Thora se leva avec l'impression que des étoiles s'étendaient au sol, pétillantes et redoutables, des auras sans lumière. Il pivota d'un demi-tour et se mit en marche avec humilité, les épaules affaissées sur sa bêtise et le drame qu'elle avait entraîné, la douleur qui s'en suivrait. Il allait payer, bien sûr.

Hory s'exclama le premier, visiblement content. Ou alors, il avait parié. Malgré sa méfiance, Thora éprouva le besoin de se livrer.

***    

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