- Tu penses que ça va bien se passer ? demanda Nora.
Avachit sur la canapé brun, encore en pyjama, Nora tapotait sur son ordinateur. Elle avait absolument besoin de finir de remplir ces fichiers, ou l'éditeur ne lui pardonnerait jamais. Cependant, elle avait l'esprit ailleurs.
- Avec Robin, on ne sait jamais. Ça fait déjà six ans, je n'ai pas l'impression que ce bougre soit allé de l'avant, commenta Maxence.
Le jeune homme ajustait sa cravate devant la glace du salon. Il attrapa ses clés après avoir fini de se préparer, les mit dans sa mallette et s'approcha délicatement de Nora. Un genou sur le canapé, il déposa tendrement ses lèvres sur celle de sa compagne.
- Je me demande, souffla Nora.
Elle releva les yeux de l'écran pour inspecter Maxence.
- Ta cravate est vraiment moche, remarqua-t-elle.
- Ne me mets pas la pression, c'est ma toute première réunion.
Nora se mit à rire avant de déposer de nouveau un baiser sur les lèvres de Maxence.
- Va, champion, le repas va pas venir tout seul. Surtout qu'on va bientôt devoir revoir nos dépenses. Tu peux dire adieu à tes jeux, rit Nora.
Maxence caressa le ventre de sa compagne amoureusement.
- Mes deux princesses, murmura-t-il.
- Élie aura bientôt besoin de toi, pour changer ses couches.
- Beurk, traîtresse, rit Maxence. Je vais être à la bourre, à ce soir !
Le jeune homme quitta l'appartement, tandis que Nora continuait à s'ennuyer sur ces fichiers urgents. L'esprit toujours ailleurs, elle ferma l'ordinateur et se leva pour ranger un peu. En ramassant un film, les larmes montèrent. Elle les chassa rapidement, puis posa Sherlock Holmes sur une étagère. Le souvenir ne s'éteignait jamais réellement.
À l'autre bout de Paris, Robin était assis à la terrasse d'un café. Il tripotait sa chemise, se demandant quel genre de rendez-vous ce serait. Peu importe la femme qu'on lui présentait, il ne trouvait jamais celle qu'il voulait, parce qu'il savait pertinemment que ce qu'il voulait n'était plus.
Une jeune femme le sortit de ses pensées moroses en s'installant face à lui. Son allure était celle d'une femme pleine de vie, radieuse. Un sourire bienveillant couvrait son visage. Ce sourire rappela tout de suite les derniers instants qu'il avait vécu avec Isallys, et ce sourire majestueux qu'elle lui avait offert, alors que lui était misérable. Il sentit une larme couler malgré lui sur sa joue.
- Que vous arrive-t-il ? demanda la jeune femme, inquiète.
- Je vous demande pardon.
La jeune femme le regarda attentivement, puis elle porta son café à sa bouche et but délicatement. Lorsqu'elle reposa sa tasse, son regard était toujours posé sur Robin.
- "La tristesse vient de la solitude du cœur".
Robin releva le menton et fixa la femme en face de lui.
- Pardon ?
- C'est de Montesquieu.
- Je le sais.
- Vous avez perdu quelqu'un, n'est-ce-pas ? Pleurez autant que vous le pourrez, autant que vous le voudrez, je ne peux espérer remplacer une perte qui condamne notre être.
- Vous êtes poète.
La jeune femme sourit.
- J'aime la vie, et les belles choses qui l'accompagnent. Et je reconnais qu'aujourd'hui, j'ai l'intention d'aimer ce moment, ainsi que votre compagnie.
- Et je ne puis vous refuser cela. "La vie est une comédie pour ceux qui réfléchissent et une tragédie pour ceux qui sentent", n'est-ce-pas ?
- Walpole. Vous en avez sous le capot.
Pour la première fois depuis des années de solitude, des années où chaque seconde lui paraissait une éternité, où la vie avait perdu son sens, pour la première fois, Robin sourit. Un véritable sourire, qui s'étirait au fur et à mesure qu'il pensait à ce futur instant qu'il allait passer en compagnie de cette femme extraordinaire.
Lys serait toujours dans son cœur. Elle lui a fait promettre qu'il vivrait, elle lui a promis qu'elle l'attendrait. Il allait vivre pour elle, puisqu'elle était morte sans lui.
FIN
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Prêtresses T2 L'avènement de Mansyur
Teen FictionAprès avoir été libérée de l'hôpital psychiatrique dans lequel elle avait été enfermée, Isallys poursuit sa quête en tant que prêtresse. Une mission noble, une éternité toute tracée. Mais que serait sa vie si elle n'était pas un peu pimentée ? Un ê...