Je me réveille, les bras enveloppant le corps d'Aurose, allongée à coté de moi. J'ouvre un oeil et la contemple en souriant bêtement. Elle dort contre mon torse, ses paupières bougeant frénétiquement, sa bouche entrouverte et mon sourire s'élargit. Qui a la chance de s'endormir et de se réveiller a coté de la plus belle des choses à admirer ? Elle fronce les sourcils et se tourne, dégageant ainsi mon bras. Elle entrouvre un oeil et se redresse doucement, avant de se tourner vers moi. Elle me sourit, ce qui me rassure, puis elle se lève, passant sa main dans ses longs cheveux.
-Bien dormi ? Me demande-t-elle.
-Super, et toi ?
Elle sourit et me lance un regard enjoué.
-Très bien.
Elle attrape son paquet de clope et son briquet puis s'approche de la porte. Elle me lance un dernier sourire puis sort de ma chambre. Je croise mes mains derrière ma tête et une vague d'euphorie monte en moi. Je ris doucement et me mord la lèvre avant de me lever, moi aussi. Je regarde mon téléphone et écarquille les yeux en voyant l'heure tardive. Je descend et salue Jordan et Lyess qui sont dans la cuisine, ce qui m'étonne à première vue, puis je sors sur la terrasse rejoindre Ben et Léa.
-T'étais où hier soir ? Me demande Ben.
Je souris et lui lance un regard empli de sous-entendus. Il me fait les grands yeux et sourit comme un idiot, tandis que Chloé roule le regard.
-Vous avez déjà manger ? Demandais-je.
-Non, on a tous pris un petit déjeuner en se levant, on a plus trop faim du coup. Répond Léa.
Je hoche la tête et bois une gorgée de café.
-On fais quoi cette après-midi ? Demande Ben dans un soupire.
Léa et moi haussons tout les deux les épaules quand Aurose débarque avec son sourire légendaire.
-bon, ce soir, grosse soirée en perspective. Dit-elle en s'asseyant sur la table, faisant bouger ses jambes dans le vide.
Je fronce les sourcils et regarde Ben, qui est déjà entrain de sourire comme un idiot en pensant à la soirée qui s'annonce.
-On fait un soirée ici ? Demandais-je.
Elle hoche frénétiquement la tête et croque dans une pomme.
-Je vais rejoindre Marco, à tout à l'heure !
Elle dit ça et s'en va en nous tournant le dos.
-Jordan est au courant ? S'exclame Léa.
-Au courant de quoi ? Dit une voix dernière moi, que je devine être celle de Jordan.
-Pour la soirée de ce soir ? Rajoute-t-elle.
Il s'assoit à coté de Léa et sourit.
-Ah ouais, elle voulait faire une soirée, je sais pas pourquoi mais bon, j'ai accepté.
Je dois avouer que ça attise ma curiosité, sa soudaine envie de faire une soirée. Peut-être est-ce qu'elle voulait inviter quelqu'un en particulier. Un ami à elle, celui qu'elle voit souvent et dont même Marco n'en connait pas l'identité. Tant de mystères entourent cette fille, mais je compte bien les élucidés les uns après les autres.
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2h: je crois que je suis à mon cinquième shot de vodka. Ce concours improvisé avec Ben me mène dans le mal. Autour de nous les gens nous motive et nous hurle dessus pour que nous continuons. Ben en boît un sixième et en quelques secondes, je viens à me demander si je joue réellement à un jeu ou si c'est voulu. Est-ce que je veux ne plus être maître de moi même ? Perdre le contrôle et mettre la faute sur l'alcool, c'est ce que j'ai toujours fait pour expliquer mes débordements, même les plus gros. Alors je dis que ce n'est pas de ma faute, que c'est cette voix dans ma tête qui prend le contrôle. L'envie de me battre qui guide mes pas, mes mots qui dépassent mes pensées. Les soirées ruinées. Pris entre l'envie de rester sage et de foutre le bordel. Je bois alors mon sixième shot, qui brûle l'intérieur de mon être, chauffant ma gorge. Tout le monde m'applaudi, mais je ne me sens pas mieux. Je cherche simplement un sentiment de réconfort dans cette liqueur étouffante. Soudainement, mon regard se pose sur Aurose, de l'autre coté de la pièce. C'est la première fois que je la vois de la soirée. Je fronce les sourcils et quitte le cercle qui s'était formé autour de nous. Je m'approche d'elle. Elle est sur la table de la cuisine, entrain de boire une bouteille d'alcool au goulot. Elle rit et ne tient presque plus sur ses jambes.
-C'est l'anniversaire de la mort de mes parents ! Dit-elle en ricanant.
Tout s'éclaircit dans ma tête. Je ne l'ai pas vu de la soirée, elle a certainement voulu organiser cette fête pour se cacher et passer inaperçu. Elle est maligne. Elle boit à nouveau et termine la bouteille avant de la jeter par terre. J'écarquille les yeux en voyant les milliers de morceaux de verres brisés au sol. Aurose s'essuie la bouche avec sa main et me regarde sans sourciller.
-Tu veux pas qu'on sorte un peu ? Demandais-je.
Elle secoue sa tête et descend de la table en sautant. Elle manque de tomber, mais ça la fait plus rire qu'autre chose. Son regard jongle entre mes deux yeux et elle sourit.
-Ok, ça me va.
Nous quittons la villa et nous marchons quelques minutes pour nous éloigner de la villa. Il fait sombre, seul la lumière du ciel arrive à éclairer un peu son visage. L'air frais semble faire taire ce vacarme dans ma tête et je me sens mieux. Je suppose que c'est le cas pour elle aussi, puisqu'elle ferme les yeux en prenant de grande respirations. Nous nous asseyons sur un muret dans un long soupire puis je m'allume une cigarette, tandis qu'elle roule un joint de ses doigts agiles. Je souris en voyant son joint, il est long et fin. Elle plonge son regard dans le mien avant d'allumer son joint. Ses yeux sont injectés de sang, sans doute à cause de la grande quantité d'alcool qu'elle a déjà ingurgité. Elle est peut-être à la limite de l'overdose, et moi, c'est avec elle que je frôle l'overdose. Je détourne le regard et fixe le ciel étoilé, dont la lune ronde est suspendue au dessus de nos tête.
-T'as bu toi ? Demande-t-elle en expirant la fumée droit devant elle.
Je hausse les épaules.
-Un peu.
Elle souffle du nez et sourit en se pinçant l'arrête du nez.
-J'ai un mal de crâne horrible. C'est comme si tout l'enfer s'était déplacé dans ma tête.
Je ne dis rien et un lourd silence apparaît. Ce n'est pas un silence gênant et c'est dans ce genre de silence qu'on partage plus de choses qu'on ne le pense. Je soupire une énième fois et me rallume une cigarette.
-Tu ne voulais pas arrêter ? Demande-t-elle.
-De quoi ? De fumer ?
Elle hoche la tête.
-C'est vrai. Comme tu le vois, j'y arrive plutôt bien.
Elle rit doucement et pose sa tête sur mon épaule. Mon coeur ratte un battement et je ne peux m'empêcher de sourire.
-Ils me manquent. Dit-elle soudainement.
Un petit silence passe pendant lequel une légère brise nous frôle et nous fait frissonner.
-J'aurais aimé les perdre en même temps. Tu sais, ne souffrir qu'une fois. Et pas deux.
Je fronce les sourcils.
-Je croyais qu'ils étaient tous les deux morts dans un accident de voiture ?
Elle se redresse et renifle avant de soupirer.
-C'est le cas. J'ai d'abord perdue ma mère. J'ai prié des journées entières en faveur de mon père. J'ai déversé des torrents de larmes sur son corps jusqu'à en être dépourvue, pensant alors que ma dernière arme serait la chance. Puis, je l'ai finalement perdue. La chance s'existe pas, il n'y a que le destin. Elle se tourne vers moi et je croise son regard qui me perfore au plus profond de moi même. La mort n'aime pas qu'on la supplie. Elle prend tout.