Chapitre 54

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En découvrant les abords du motel le lendemain matin, je réalisai à quel point nous avions eu la chance de pouvoir dormir tranquillement. Un spectacle désolant s'offrit à nos yeux, celui d'une pelouse jonchée de débris, de capsules de fumigènes, des carcasses encore fumantes de voitures et des bacs à ordure dégueulant leur contenu sur le sol. Les chevaux avaient été renversés, massacrés, et des tags illisibles recouvraient certaines fenêtres des bâtiments de l'autre côté de la route.

J'avais été tellement focalisé sur Lolly que tout ceci m'avait paru lointain, iréel. A aucun moment nous ne nous étions inquiétés d'être interrompus, par une brique qui aurait traversé la vitre ou un départ d'incendie.

Par contre, si quelqu'un avait volé le Fossoyeur, nous nous en serions aperçus. Et cela aurait très bien pu se passer, puisque Lolly avait manifestement oublié de le verrouiller.

Je m'aidai d'une poignée pour me hisser à l'intérieur et fus accueilli par des hurlements effarouchés.

— Bâtard ! Dégage de là ! Me hurla une voix depuis l'arrière de la cabine.

Je jetai un oeil par-dessus le siège passager, la main sur mon arme. Là où je m'attendais à devoir la brandir, je découvris un spectacle plutôt amusant. Ou, du moins, qui n'avait absolument rien d'inquiétant.

Deux paires de seins nus me faisaient face, encadrant le torse d'un homme affreusement maigre dont les longs cheveux noirs tombaient jusqu'au nombril. Les deux femmes ne devaient pas avoir plus d'une vingtaine d'années, les cheveux relativement sales et plusieurs piercings sur le visage. L'une arborait même un anneau dans le nez, ce qui m'évoqua immédiatement le bétail qui avait failli avoir notre peau à la fête foraine. L'homme était entièrement nu, et l'état de sa virilité m'indiqua que je venais d'interrompre un moment intéressant. Je réprimai un sourire alors que Lolly me rejoignait, grimpant sur la banquette côté conducteur.

— Oh, mais qu'est-ce que ça pue là-dedans ! Commença-t-elle avant de découvrir les trois jeunes. Oh ! Bonjour. Nous, au moins, on a pris une chambre. Mais je suis plutôt contente de voir qu'il y a là toute la place nécessaire, gloussa-t-elle.

— Vas-y, putain, on était là avant !

— C'est moi qui ai volé ce truck sur une fête foraine hier, répondit Lolly d'une voix soudain cassante. Alors, sauf si tu souhaites que je lui ajoute ton pénis en guise d'ornement de capot, tu ferais bien de te barrer et d'emmener tes deux copines. Et vite, avant que je décide de garder vos vêtements.

Sans la quitter des yeux, l'homme se mit à fouiller dans la pile de vêtements à côté d'eux et en sortit un couteau qu'il brandit devant nous. Lolly et moi échangeâmes un sourire avant de dégainer nos armes à feu.

— Ok, putain, c'est bon ! Mugit l'homme en lâchant son couteau.

— Arrête, Shiah, on se barre d'ici ! S'exclama l'une des filles en attrapant ses habits.

Lolly riait encore lorsqu'ils claquèrent la porte du coffre sur eux, s'enfuyant à moitié nus sur la pelouse du motel.

— On va aérer, si ça ne t'embête pas. Et je vais jeter les couvertures qu'il y a là-derrière, je peux sentir qu'elles sont gluantes sans même les toucher, déclara Lolly en joignant le geste à la parole.

Je poussai le concept un peu plus loin en disparaissant à l'intérieur de la chambre du motel, avant d'en ressortir avec la couette. Je la jetai sur Lolly, à l'arrière du Fossoyeur, et elle la reçut avec un rire enjoué.

— Bonne idée ! Et ce n'est pas vraiment du vol, vu la somme en liquide que j'ai laissée sur la commode.

— Non, c'est un achat, confirmai-je. C'est juste que le gérant ne savait pas qu'il vendait ça.

Z - Où tout commenceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant