Chapitre 56

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A la sortie de la ceinture sanitaire, on s'assura que nous avions bien reçu les instructions avant d'enregistrer nos noms sur ordinateur. Je secouai vaguement le papier que nous avaient donné les militaires, puis d'autres soldats nous adressèrent un salut poli.

— J'ai besoin d'avoir des nouvelles de mon cousin, m'exclamai-je alors que l'on nous poussait doucement vers la sortie. Il est sûrement entré sur ce camp hier.

Un grand noir, Lieutenant d'après les galons sur sa manche, commença à réciter une phrase qu'il avait dû prononcer des dizaines de fois déjà.

— Monsieur, ces données sont confidentielles. Je ne suis pas en mesure de vous les c...

— De me les communiquer, j'ai compris, grommelai-je en haussant les épaules. Ecoutez. Je suis moi-même Lieutenant dans les Navy SEAL. Peter Jon Lucky, vous pouvez rechercher mon nom. J'ai vraiment besoin de savoir s'il est passé par ici.

Mal à l'aise, le soldat hésita, fuyant mon regard. Il me dominait d'une bonne tête et était si large d'épaules que j'aurais pu disparaître complètement derrière lui. Je choisis de rester silencieux quelques secondes de plus. Lolly regardait tout autour de nous, guettant sûrement les deux visages que nous espérions voir. De mon côté, je les cherchais aussi, mais je craignais surtout de revoir les deux silhouettes rectangulaires des hommes de ce matin.

— Je suis désolé, Lieutenant, finit par bredouiller le soldat. Je ne peux rien vous dire...

— Juste savoir s'il est passé. S'il vous plaît. Juste un nom.

Cette fois, il parvint à me regarder dans les yeux et je le vis céder dans un soupir.

— Son nom ? Grommela-t-il en s'asseyant.

— Tenenbaum.

Il pianota rapidement sur le PC portable dans lequel nous venions d'enregistrer notre sortie.

— J'en ai deux. Aubrey et Richard.

Je hochai la tête, reconnaissant. Rick était passé par ici. J'allais tenter ma chance avec Vincent lorsque Lolly intervint.

— Et Loppez ? Avec deux "p", jeta-t-elle avec brutalité.

Le militaire se ferma comme une huître et se releva.

— Madame, je suis désolé... Un nom, c'était déjà strictement interdit, je...

— Pardon ? Le coupa Lolly, cinglante.

Je reconnus aussitôt l'Eleanor Foster qui m'avait haï dans le bureau du directeur de la prison d'état en Floride. Sauf qu'ici, elle était clairement désavantagée. Un capitaine des Marines s'approcha de nous, et ce capitaine était une femme qui jeta à Lolly un regard au moins aussi dur.

— Est-ce qu'il y a un problème ? Demanda-t-elle, sa fine bouche s'étirant sur une dentition parfaite.

Sa mâchoire, relativement carrée, était soulignée par un haut chignon blond. Aussi impressionnante que Lolly fût, cette femme là l'était davantage. Et ma Némésis le reconnut sûrement, puisqu'elle répliqua aussitôt :

— Non. Laissez tomber.

— Ce n'est pas à vous que je parlais, trancha la militaire en se tournant vers son collègue.

Celui-ci ne savait plus où se mettre. Si elle apprenait qu'il nous avait divulgué un nom, il pourrait être rétrogradé, voire radié.

— Non, mon Capitaine, je... commença-t-il.

— Je lui demandais seulement où on peut déjeuner au-delà de ce poste frontière, cracha Lolly. J'ai comme un arrière-goût dégueulasse en bouche. Sûrement vos rations, railla-t-elle.

Z - Où tout commenceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant