Z - Où tout commence

Chapitre 50

Je repris la route à côté de Rick, confortablement assis sur la banquette poussiéreuse de son pick-up.

Peut-être était-ce à cause de ce baiser échangé dans le clocher, mais j'étais plus enclin à faire confiance à Lolly et n'eus pas de mal à la laisser prendre la route avec Vincent. Et s'ils avaient eu l'idée de nous fausser compagnie, j'avais de toutes façons sur moi assez de munitions pour déchiqueter cinq fois leurs pneus.

Avant de partir, nous avions confectionné des sandwichs avec du pain frais et du jambon trouvés dans l'église. Même s'il nous semblait répugnant de manger la même chose que ces gens, j'étais incapable de résister à la vue d'une baguette croustillante. Alors s'il s'y mêlait du bacon...

— J'ai souvent l'impression que c'est un putain de cauchemar, lança Rick, une main négligemment posée sur le volant.

Je pris une grande bouchée de mon sandwich et le mastiquai lentement, attendant qu'il poursuive.

— D'abord Ashley. Je suis toujours intimement persuadé qu'elle m'attend à la maison et qu'il suffit que j'y retourne pour que tout rentre dans l'ordre, poursuivit-il d'une voix étranglée. Puis je croise Liz et elle n'a même pas besoin de me parler pour me dire à quel point elle me hait pour tout ça. Peut-être qu'elle pense que c'est de ma faute. C'est moi qui avais insisté pour qu'elle emmène les filles.

— Tu n'y es pour rien, commentai-je après m'être battu avec un morceau de bacon.

— Va lui dire ça. C'est devenu une vraie peau de vache. Elle a été tellement malpolie avec Gerry ! Je ne la reconnaissais plus.

Je hochai la tête, ne pouvant partager davantage son avis. Dire qu'Elizabeth avait été odieuse était un doux euphémisme.

— Et Gerry, putain, poursuivit Rick dans un soupir. Tu te rends compte de ce qui s'est passé ? Elle a couru droit dans une église... Et une foutue balle plus tard, il n'y avait plus personne. Envolée. J'espère ne jamais avoir à croiser Edwin et lui annoncer la nouvelle.

— Nous sommes tombés sur ce que la race humaine fait de pire, commentai-je en toisant mon sandwich, réflechissant à la manière dont j'allais aborder ma prochaine bouchée. Il n'y avait rien d'autre à faire que ce que nous avons fait.

— Oh, nous aurions aussi pu appeler la police. Ils seraient allés là-bas et auraient enfermé tout le monde.

— Ou pas ! répliquai-je vivement. Le mec dans la supérette était aussi raciste qu'eux, et c'est lui qui a emmené les munitions et le lance roquettes. Je me méfie de ces petites bourgades... Rien ne nous dit qu'ils ne sont pas tous de mèche.

— Un peu comme dans Hot Fuzz, s'exclama Rick avec un sourire.

— Exactement ! Répondis-je avec le même enthousiasme, heureux de le voir se départir de sa voix triste et monotone.

— Ceci dit, ta Lolly a été particulièrement flippante, enchaîna-t-il après un silence. Je l'ai vue se battre avec l'autre femme, qui n'avait aucune chance. Elle l'a épinglée à la table comme une punaise à un mur. Je ne sais pas qui c'est, mais je me méfierais un peu si j'étais à ta place.

— Je me méfie, commentai-je en revoyant mentalement l'épisode du risotto.

Puis celui du baiser. Du sang séché sur son visage et de la violence de son étreinte.

— Je me méfie mais elle a un rapport avec toute cette épidémie et j'aimerais comprendre lequel, poursuivis-je, les yeux dans le vague. Pour l'instant j'ai l'impression qu'elle me fait confiance.

— Et toi ?

Je pris le temps de réfléchir à ma réponse.

— J'ai envie de lui faire confiance aussi. C'est une des personnes les plus étranges que j'ai jamais vu.