2ème Fragment

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Soudain, un marteau piqueur démarre et fait vibrer la table ; j'ai presque l'impression de voir le bol de fruits se déplacer. Il est accompagné d'une mélodie électronique, du genre qu'on n'entend que dans les séries qui n'ont apparemment pas le droit d'utiliser une vraie sonnerie de portable (les mêmes séries qui sonorisent les jeux vidéos avec blip blop, en 2016). Je jette un regard fatigué vers l'antiquité qui tente d'attirer mon attention, et j'hésite à décrocher.

Disons-le tout de suite, j'ai un très vieux téléphone portable. Il a un clavier, un vrai clavier, et il appartenait à ma sœur quand elle avait mon âge ! Ce n'est pas à cause de mes parents, même s'ils sont du genre à ne pas aimer les ados rivés à leur écran... Mais j'ai bêtement fichu le mien en l'air (un accident avec un coude, un bol de lait et une formidable héroïne pas assez réveillée) et je me retrouve avec celui-là, dégoté au fond d'un tiroir, dont la marque n'existe même plus. Ça vous dit quelque chose, Talisman ? Moi non plus, et rien sur internet. Une sous-marque moisie, voilà avec quoi je me trimbale ces temps-ci. Et pas question de pouvoir m'en racheter un avant un moment... Dure la vie.

"Tu compte décrocher ou bien ?" me demande papa par-dessus son épaule.

Oui, oui... C'est bon. Je sais qui c'est en plus.

"Coucou, Hayat" dis-je en prenant une bouchée de céréales.

"Diane ! The big D ! Phénix des hôtes de ces bois !" me répond ma meilleure amie, qui raconte n'importe quoi comme d'habitude. Là, c'est qu'elle veut quelque chose. "Tu sais, les devoirs d'histoire, pour demain ?"

Je soupire. Papa me jette un regard, j'agite la main dans sa direction et je laisse pendouiller ma cuillère au coin de ma bouche. Il rigole et retourne à la vaisselle.

"C'est bon, oui, je les amène, 'Yat." Je fronce des sourcils qu'elle ne peut pas voir. "Mais tu me les rends sans faute ! C'était vraiment pas cool la dernière fois !"

"TKT !" (elle prononce vraiment ça té-ka-té d'un ton traînant, elle sait que ça me fait sourire). Et elle raccroche. Bon. T'inquiète... Bien sûr, que je m'inquiète !

Un coup d'œil à l'heure et je vois qu'il faut que je sois partie il y a cinq minutes déjà ! Damien par terre, pas vraiment content de la précipitation ; bise à papa ; sac sur le dos, et je suis dehors !

Je n'ai vraiment pas idée de ce qui m'attend aujourd'hui.

Vraiment, vraiment pas.

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