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samedi 13 décembre 2015 – Los Angeles, CA

omniscient

« -ALLEZ LES AMOUREUX, ON SE RÉVEILLE !! » cria Olivia en riant et en tenant son téléphone dans ses mains. « La journée s'annonce mortelle ! »

« -Mauvais jeu de mots, si tu veux mon avis. » murmure Miles sans ouvrir les yeux.

Olivia se mordit la lèvre. Tom et Sean se placèrent de chaque côté du lit et, silencieusement, firent le décompte ''1,2,3'' ils vidèrent leurs verres d'eau sur le couple. ''1,2,3'' Adelyn se releva en sursaut et se mit à crier après les garçons qui se dépêchèrent de sortir de la pièce, sous les rires d'Olivia qui continuait de filmer. ''1,2,3'' Miles leva la tête, soupira et la replongea dans son oreiller imbibé d'eau.

''1,2,3'', le temps qui passe. Rien. Il va trop vite. Trop lentement. Il ne va jamais. Après tout, on n'est jamais contents. On ne voit pas les années passer et pourtant, chaque jour, on aimerait être le lendemain. ''1,2,3'', le compte à rebours pour votre premier anniversaire, votre première année d'école, vos premiers amis, vos premiers fous rires, vos premières punitions. Le temps est heureux. ''1,2,3'', vos premières sorties, votre entrée dans l'adolescence, vos premières embrouilles, vos coups de gueules avec vos parents. Le temps est chiant. ''1,2,3'', votre premier amour, vos premiers découragements, vos examens, vos résultats scolaires. Le temps est stressant. ''1,2,3'', votre diplôme, votre université, votre grande école, votre vie. Le temps est excitant. ''1,2,3'', votre premier boulot, votre appartement, vos factures, vos courses, votre couple. Le temps est stable. ''1,2,3'', votre enfant, votre maison, votre chien, votre mariage. Le temps est mâture. ''1,2,3'', vos enfants, votre couple, votre maison, votre chien, votre voiture, votre travaille. Le temps est monotone. ''1,2,3'', les premières années d'écoles, les premiers amis. Le temps est heureux. ''1,2,3'', comme le temps passe vite. Vous envoyez vos enfants à l'université et ils partent faire leur vie. Vos parents vieillissent, vous regrettez les mots que vous avez pu leur dire quand il est temps de dire au revoir. Puis, cercle vicieux du temps qui passe, vos enfants regrettent les leurs quand il faut vous dire au revoir.

''1,2,3'', retour en arrière. ''3,2,1'', vivez dans le présent. Miles, tu dois vivre dans le présent. On n'est jamais content, on se contente jamais de ce qu'on a ; du temps qu'on a, de ce que nous donne le temps. C'est dur, mais il faut apprendre à faire avec.

Alors, Miles se mit debout en souriant, ne pensant pas au temps qui passe et aux ''1,2,3'' répétitifs dans son esprit. Il se mit debout, enfila un tshirt et un jogging et ne pensa qu'à la journée qui l'attendait. Pas au temps qui passe, parce que le temps qui passe lui faisait peur. Une semaine. Court. Rien. On n'est jamais contents.

*

« -Regardez-moi les gars ! Je nage avec un dauphin ! » s'exclama Sanae en agitant un bras dans tous les sens tandis qu'elle se tenait avec l'autre.

Olivia et Miles regardaient leurs amis en riant et souriant, les filmant et se filmant aussi. Ils n'avaient pas vraiment parlé. Pas encore.

« -Ça va ? » demanda subitement Miles, se fichant pas mal qu'on l'entende sur la vidéo.

« -Je suis en Californie avec vous. Bien sûr que ça va. »

« -Oli ... »

« -Ok, et bien ... Je me prépare lentement mais sûrement à ton départ. Enfin, excuse-moi. A ton ... décès. Parce que t'es là, en ce moment, à côté de moi, on parle, on rit, on regarde nos amis nager avec des dauphins et j'arrive juste pas à m'imaginer sans toi. J'essaie. » elle ferma les yeux. « Si ... si je ferme les yeux, j'arrive à ne plus sentir ta présence. Je n'entends plus ta respiration. Je n'entends plus non plus les rires des autres, parce qu'ils ne peuvent plus rire. J'ai dû mal à respirer. Je me sens vide. » elle regarde fixement Miles. « Imaginer une vie sans toi, c'est trop dur. Je n'ai pas envie d'être ailleurs qu'avec toi, en ce moment, à Los Angeles, sur ce banc. J'ai froid, je vais bientôt perdre mes doigts et mon nez mais je m'en fiche. Parce que t'es là. Et bientôt ... bientôt, ça ne sera plus le cas. Je te verrais plus au lycée, tu ne seras plus là pour me rassurer. Tu ne seras tout simplement plus là. Et c'est horrible de me dire que bientôt, il faudra que je ferme les yeux pour imaginer ta présence. » elle essuya rapidement une larme qui roulant sur sa joue. « T'es mon meilleur ami Miles, comme Sean, Wael, Tom, Sanae et Addy. Je ne peux juste pas imaginer ma vie sans mes meilleurs amis. Pas sans toi. »

WELCOME TO MY FUNERALOù les histoires vivent. Découvrez maintenant