Son histoire (Nine)

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« D'accord. C'est ce que je vais faire : je vais vous raconter une histoire, l'histoire d'un homme né de la guerre. Il est né des feux, de la douleur, du sang, des cris et des larmes de son peuple disparu et a dû vivre avec leur mort, leurs cris résonnant dans sa tête, leurs visages tordus par la douleur hantant ses rêves, leur sang souillant ses mains. Il a dû vivre avec le poids de ses actions.

Il s'était bien amusé durant ses huit premières vies. Il était encore un jeune garçon. Tout ce qu'il voulait, c'était s'amuser et découvrir le monde en dehors de Gallifrey. Sa première incarnation avait volé un TARDIS et avait voyagé avec des gens, surtout des humains. Ça avait été une bonne expérience et la tradition avait continué. Il n'était pas supposé intervenir, mais ne pouvait s'empêcher de se retrouver mêlé aux situations fâcheuses. Il s'amusait et découvrait le monde. C'était tout ce qu'il voulait faire et tout allait bien, jusqu'à la guerre. Jusqu'à ce qu'il doive commettre un massacre de masse.

La guerre était terminée pour lui. Il avait tout brûlé et s'était enfui. Couvert de sang, de larmes, de suie et de brûlures, les oreilles sifflantes, il s'était écroulé dans la salle de contrôle et s'était réveillé dans la peau d'un nouvel homme. C'est ainsi que le neuvième Docteur est né de la guerre, du douloureux meurtre de son propre peuple pour remporter une guerre à laquelle il n'avait pas voulu participer.

Empli de honte, de douleur et de colère, il avait voyagé seul un long moment et laissé des messages au cas où quelqu'un aurait survécu. Mais il n'y avait jamais de réponse. Personne ne lui avait jamais répondu et il s'en était senti de plus en plus coupable, sachant qu'il était le seul à blâmer dans l'histoire. Sa culpabilité grandissait avec sa solitude. Il ne pouvait pas prendre de compagnons avec lui. Personne ne pourrait jamais guérir cette plaie, ou comprendre ce qu'il ressentait au fond de lui.

Il était empli autant de chagrin que de colère. Il ne pouvait plus être le Docteur parce qu'il était devenu un meurtrier. Pour évacuer sa colère, il avait pris part à de nombreux combats dont il n'aurait pas dû se mêler. Pour évacuer sa culpabilité, il avait pris la défense des faibles gens. Mais il n'avait jamais été capable d'oublier combien il était seul, combien il était coupable. Il n'avait jamais oublié qu'il aurait dû mourir ce jour-là.

Il avait combattu ses noires pensées, sa volonté de mourir, car il devait rester en vie, car il devait vivre avec ce qu'il avait fait. Il ne pouvait pas oublier, il ne pouvait pas mourir. Il devait payer le prix et c'était de plus en plus difficile à supporter, de supporter la douleur de sa perte. Et il se battait encore bien que ses cœurs saignent, bien que ses yeux brûlent, bien que son esprit explose. Il devait le faire pour honorer leur mémoire, pour ne jamais oublier.

Il était devenu le Docteur dépressif, le Docteur sans compagnons. Il méritait cette solitude depuis qu'il avait tué son peuple. Il ne s'autorisait pas à avoir des amis. Mais il ne pouvait plus le supporter. C'est alors que sa main en a rencontré une autre. C'est alors qu'il lui a dit de courir. C'est alors qu'elle est entrée dans sa vie et qu'elle lui a donné l'opportunité de devenir un homme meilleur.

Il n'était qu'un homme totalement brisé par les actes qu'il avait dû commettre pour gagner la Guerre du Temps. Il avait commis des monstruosités. Il avait détruit la race des Daleks mais il avait également détruit la sienne. Si ses ennemis ne cessaient de revenir le hanter, son peuple avait définitivement disparu à cause de lui. Cet acte avait irréversiblement noirci son âme.

Il n'avait jamais cherché le pardon, n'avait jamais cherché à se pardonner. Il était coupable sur toute la ligne d'avoir été un lâche et d'avoir conduit son peuple à la mort. La noirceur gagnait du terrain tous les jours. Elle ne le laissait jamais en paix. Il ne voulait pas oublier, mais il ne voulait pas non plus redevenir ce monstre. Pourtant, il se noyait peu à peu dans la noirceur de son âme et ça le terrifiait de plus en plus. Il était sur le point d'abandonner quand Rose Tyler était entrée dans sa vie. Son comportement avait pu lui paraître étrange, mais il ne comprenait pas comment quelqu'un comme elle, quelqu'un d'aussi lumineux qu'elle pouvait voyager avec un homme aussi sombre que lui. Elle lui montrait chaque jour, à chaque aventure, qu'il pouvait être un homme meilleur. Un jour, il avait découvert qu'elle avait brisé sa solitude, qu'elle lui avait redonné de l'espoir.

Elle avait vu la noirceur qui le dévorait et avait tout de même choisi de rester, de ne jamais le laisser tomber. Elle avait presque abandonné sa famille pour lui. Elle voulait l'aider. Elle voulait être là pour lui chaque fois qu'il en aurait besoin et elle l'avait fait. Même quand elle ne pouvait rien faire, sa présence était suffisante. Il n'était plus tout seul et sa noirceur disparaissait à son contact. Elle lui avait appris qui il était vraiment. Il n'était pas un monstre. Il n'était qu'un homme qui avait commis des erreurs, des erreurs qu'il ne pourrait jamais se pardonner. Elle avait su l'aimer quand il ne pouvait pas s'aimer lui-même, quand personne n'aurait pu aimer l'homme qu'il était.

Son histoire, comme toutes les autres, devait se terminer. Il avait choisi de mourir comme un lâche, d'être exterminé par les Daleks, plutôt que de commettre un autre massacre. Le lâche avait arrêté de s'enfuir et avait fait face à la mort, et avait fait face à son destin. Il n'aurait jamais pensé qu'elle pourrait revenir. Il n'aurait jamais pensé qu'elle était le Méchant Loup qu'ils recherchaient. Plutôt que de mourir comme un lâche, il avait choisi de mourir pour l'amour d'une petite humaine qui avait illuminé son monde. Il avait repoussé la douleur et affronté sa mort, en souriant, comme le héros qu'il avait choisi d'être le jour où elle lui avait dit qu'il ne serait plus seul.

C'était l'histoire du neuvième Docteur, le Docteur dépressif, qui était sarcastique pour cacher sa douleur, qui était très heureux parce que « pour une fois, tout le monde est en vie », le lâche qui est mort en héros. Mais tout va bien. Nous sommes tous des histoires au final. Il en a créé une fantastique, n'est-ce pas ? »

Brèves de TARDISOù les histoires vivent. Découvrez maintenant