Chapitre 15 (corrigé)

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Deux jeunes tigres se courraient après dans le jardin entouré de hauts sapins et autres arbres denses. Le plus massif d'un pelage orange strié de noir profond secoua vivement sa queue dans un mouvement de balancier hypnotisant tandis que le plus chétif mais non moins impressionnant détalait en sens inverse dans le but de fuir le prédateur. Le pelage de la proie s'éclaircit un peu plus sous l'effet des rayons du soleil estival. Sa robe d'un blanc pur rayé de noir s'ébouriffa quand son compagnon apparut comme par enchantement devant lui.

Aucun bruit ne vint déranger le jeu auquel se livrait depuis plusieurs heures les deux tigreaux.

Pourquoi n'ai-je aucun souvenir de ces moments ?

Ton père les a bloqués dans ta mémoire, lui répondit sa mère assise au bord de l'étang. Ils te reviendront petit à petit, maintenant que tu te trouves à ta place légitime.

Heilin soupira. Son père pensa vraiment à tous les détails avant de l'abandonner à Ned.

Tout est-il réellement écrit par la magie ?

Non ! Assura la plus âgée. Néanmoins les liens du Panthéon le sont, eux. Tu ne peux échapper à la magie qui entoure les Wastes.

La jeune femme commençait à saisir ce concept qui, jusque-là, lui apparaissait de manière trop abstraite. La Bifröst chantait sous sa peau. Jusque dans ses os. Elle la sentait les pousser les uns vers les autres pour panser leurs plaies ouvertes et raffermir leur force. C'était elle qui provoquait ses crises de démence intense comme si quelqu'un la possédait et exigeait d'elle sa reddition ou sa mort.

Bien ! la fit sursauter sa mère. Il est temps pour toi de partir.

Heilin fronça les sourcils et se leva à son tour.

Comment cela ?

Les deux tigreaux laissèrent place à une chambre dans la pénombre. Sur le lit se trouvaient deux corps étendus l'un contre l'autre. Elle déglutit en se voyant la tête sous le menton de Dageus dont les bras l'encerclaient.

Réveille-toi !

Heilin leva paresseusement les paupières. La chaleur qui l'entourait la maintenait dans un état semi conscient des plus agréables. Cela faisait tant d'années qu'elle n'avait pas dormi aussi bien. Elle se décala un peu sans le réveiller. Le calme qu'il affichait dans son sommeil contrastait tellement avec toutes les émotions qui traversaient constamment son visage. Ses cheveux noirs tombaient en petites mèches éparses sur son front. Elle dégagea celles qui reposaient sur ses yeux clos.

Sa mère certifiait que leur magie ne commettait aucune erreur. Elle en doutait malgré tout. Pourquoi ne parvenaient-ils pas à s'entendre ? Dès qu'il ouvrait la bouche, il la blessait. Et dès qu'elle décidait d'agir, il se vexait et la traitait telle une enfant trop idiote pour se rendre compte du danger. Ne pouvaient-ils pas trouver de terrain d'entente ? Un juste milieu entre leurs caractères trop affirmés ?

Ses doigts tracèrent le contour de sa mâchoire angulaire recouverte d'une légère barbe sombre qui naissait à peine. Ses fines lèvres tressaillirent légèrement. Elle recula la main en vitesse de peur de le réveiller et de devoir expliquer pourquoi elle se permettait autant de familiarité. Ses yeux parcoururent son corps. Il pouvait bien se pavaner et être sûr de lui : grand, bronzé et athlétique. Sans compter que, lui, le Prédateur ultime avec un grand « P » ne craignait rien ni personne.

Heilin tressaillit quand son corps se crispa au souvenir fantomatique des attaques subies plusieurs semaines plus tôt. Toute sa bonne volonté réunie ne parvenait pas à occulter cet instant de pure terreur. Sa gorge se serra et son corps tremblota imperceptiblement. Elle tenta d'éloigner les vestiges de ses souvenirs macabres, sans succès. Ses yeux s'écarquillèrent de surprise quand Dageus la pressa contre sa poitrine dont le rythme cardiaque n'avait pas changé une fraction de seconde.

Helldown #2 - Ville de glaceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant