III.

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Imagine there's no countries
It isn't hard to do
Nothing to kill or die for
And no religion, too
Imagine all the people
Living life in peace...

Voilà deux heures que j'écoutais cette même chanson en boucle. Les paroles résonnaient et se bousculaient encore et encore dans ma tête. La tête à l'envers, à moitié allongé sur mon lit, mes pieds pendaient dans le vide, et mes yeux toujours clos.
Je me remémorais ma folle escapade de la veille. Les paupières alourdies par la fatigue, j'ouvrai un oeil pour évaluer le temps qu'il faisait dehors. Nuit, l'arbre faisant face à la fenêtre de ma chambre se tordant dans tous les sens sous le poids du souffle du vent. Je refermai les yeux, repensant aux sentiments incertains qui m'avaient envahi lorsque j'avais accepté l'invitation de Joshua, à la longue route jusqu'au parc, à l'herbe lègèrement humide au toucher, aux murmures du vent dans les cheveux, à notre balades entre les murs de ruines avec Joshua, aux jardins de fleurs étincelantes et à l'écoulement furtif du petit ruisseau entre les racines....
Il faisait déjà bien nuit. Ma mère dormait encore. Je passai dans sa chambre pour voir comment elle se portait. Je ne l'y trouvai pas. La salle de bain. Je courrai dans la salle de bain en priant qu'il ne se soit rien passé mais trouvai la porte verrouillée. Me penchant sur la porte, l'oreille à celle-ci, seul le bruit de l'eau coulante était distingable. Je paniquai. Ni une ni deux, je donnai un gros coup de pied dedans. La porte céda, tanpis pour le verrou. Ma génitrice, avachie sur la cuvette des toilettes, assise par terre, gémissait et sanglotait à moitié endormie, et à peine habillée d'un peignoir et d'un vieux pyjama. Je soupirai devant sa position lamentable et l'aidai à se relever.

-Pardon, pardon...répétait-elle en s'appuyant sur moi.
-Ça va aller Maman... C'est pas ta faute.

Je l'installai dans son lit et lui laissai de quoi boire et grignoter, lui nettoyai le visage avec un gant chaud avant de m'eclipser de sa chambre.

-Je... Je sors... Si tu as besoin.... Appelle-moi, lui gliassai-je à l'entrebaillement de la porte.

Minuit sonnait sur la grande pendule de l'entrée. Son bruit était si fort que même avec mon casque, je pouvais encore l'entendre. Cette imposante pendule de bois massif et de fer m'avait toujours un peu effrayée. Elle avait un côté lugubre, sonnait quand elle voulait et elle semblait toujours sonner la mort ou quelque évènement malheureux. Trainant le pas , je rejoignais la cuisine le cœur lourd. Il n'y avait pas d'odeur de repas chaud ou de petits gâteaux dans l'air. Il n'y avait pas le sillon du parfum de ma mère. Il n'y avait ni de jolies fleurs dans le vase qui ornait tristement la table ni de confiseries ou de biscuits dans les bocaux de verres sur le petit comptoir. La maison était triste et vide, et il règnait une atmosphère presque oppressante où il n'y avait ni bruit ni vie. Dans la commode, des morceaux de verres et des bouteilles d'alcool vide servaient de décoration. Ma mère voulait les garder, elle en faisait la collection. Cette bonne femme avait beau m'avoir donné la vie mais ne pas m'avoir à charge, j'étais triste pour elle. Elle n'a jamais voulu m'expliquer d'où venait son chagrin destructeur et dévorant.
J'enfilai ma mytique paire de bottes et sortis de la maison. Sillonnant les rues, faisant du lèche vitrine et trainant parfois les pieds le long des trottoires de Livingston, j'en oubliais presque mon envie de manger qui me tenaillait le ventre. Je décidai pourtant de m'arrêter dans un snack ouvert 24h/24 pour prendre un sandwich. Le froid vent me poussait dans le dos et me glaçait, mais l'envie de manger était alors décuplée et insoutenable. Les rues étaient presque désertées et seules des pubs étaient encore animés par leurs bons et fidèles consommateurs de bière. Pourtant au loin,une silhouette me faisait de l'oeil. Elle ondulait sous la lumière d'un lampadaire de l'autre côté du trottoir, qui éclairait une chevelure bouclée de noir et de rouge. Elle fit volte-face et un regard sombre me défia du regard. Je fis mine de ne pas la regarder. Je continuais ma route, concentré sur mon encas, regardant la demoiselle du coin de l'oeil. Néanmoins je ne dus pas être très discret puisqu'elle finit par joindre la distance qui nous séparait. Ses cheveux virevoletaient autour d'elle et elle laissait une traînée de parfum fruité qui vint doucement emplir mes narines. Elle se posta devant moi, me barrant la route. Elle me regardait dans les yeux avec malice, mordillant ses lèvres charnues et délicates, teintées de rosé et osa enfin souffler avec douceur.

-Moi c'est Scampte...

Je la regardais attentivement, cherchant quelque chose qui aurai bien pu la pousser à venir m'aborder sans y avoir été invitée.

-Tu vas me répondre où je peux directement prendre ça pour un «Disparais»? me lança-t-elle en penchant la tête sur le côté en faisant la moue, toujours en face de moi.
-Ah euh ouais désolé, moi c'est Rex, répondis-je un peu perturbé. Mais pourquoi est-ce que tu...-

Scampte me regarda d'un air satisfait, les pupilles brillantes. Je clignai des yeux, mais quand ils se rouvrirent, Scampte n'était déjà plus là. Elle s'était...volatilisée.

REXOù les histoires vivent. Découvrez maintenant