Tout s'est passé comme je l'avais prévu. Le prof m'a demandé de me présenter. Je me suis levée.
《Je m'appelle Rei Alèphéïa.》
Je me suis aussitôt assise. Ils ont été surpris de ma déclaration brève et tranchante. Le silence a duré cinq petites secondes mais il a résonné bien fort comme le gong d'une cloche. Puis le prof a débuté son cours.J'ai eu de la chance. Le prof m'a placé à coté de la fenêtre tout au fond. À peine avait t-il commencé à parler, que je le l'écoutais plus. Occupée par ce qui se passait à la fenêtre, imperméable à ce qui se déroulait dans la pièce où je me trouvais.
Quand la sonnerie a sonné, certains ont vainement essayé de me questionner mais mon mutisme les a rapidement éloigné. Je serai tranquille pour les cinq derniers mois de l'année scolaire. Enfin, normalement...
*
La sonnerie de midi sonne et je me lève rapidement en rangeant mes cahiers vierges. Je sors de la salle ignorant les derniers récalcitrants à mon manque visible de sympathie.
Je dirais que le seul avantage de ce maudit tas de ciment est son toit plat. Il est normalement interdit mais je suis certaine que personne ne respecte cette interdiction. Je grimpe rapidement les escaliers et crochète rapidement la porte avec une épingle. Le toit est désert et risque de le rester pour longtemps, se situant juste au dessus des WC. Les effluves s'échappant des fenêtres repousseraient n'importe qui. Ce qui est parfait pour ma solitude. J'avais repéré cet endroit il y a quelques jours quand j'étais venu régler les derniers détails de mon transfert.Je m'assoie sur le garde-fou et comme ce matin observe la vue. Je tripote d'une main le pendentif de mon collier. Il est composé d'une simple perle. Sa couleur tend vers le bleu clair mais pourtant ne semble pas défini. Une si étrange perle héritage ancestral. Il ne faut pas s'y méprendre cet objet insignifiant est l'outil de ma vengeance, ma lame qui apportera la mort tant désirée.
Je me lève et me met en équilibre sur la barrière. Un léger vent envole mes cheveux en arrière.
J'aime la hauteur. Je ne connais pas le vertige. Le funambulisme serait un hobby si je pouvais le pratiquer. Quand j'étais petite je rêvais d'aller escalader les plus grandes falaises de ce monde et d'arpenter les plus grandes montagnes. C'était il y a si longtemps.
*
Tap tap tap. Des bruits de pas sur le toit. Je me retourne précipitamment. Une fille vient d'arriver sur le toit. Je ne l'avais pas entendu arriver perdue comme je l'étais dans mes pensées et le monde au loin. Elle me jette à peine un regard et s'assoie dans le coin du toit. Elle a des cheveux courts et noires et porte une longue jupe et une chemise bleue pâle. Je ne l'observe pas longtemps car je déteste quand les gens me regardent et retourne à ma contemplation. J'entends le crissement du plastique et les bruits discrets mais audible de quelqu'un mangeant. Ce sons fait grimacer mon estomac. Je n'ai rien emporté à manger. Je soupire.《Tu en veux ?》me demande t-elle soudainement de sa voix monocorde.
Elle me tend alors un morceau de la brioche qu'elle mangeait.
《Pourquoi? 》je réponds seulement.
-Ton soupire, répond-t-elle tout aussi brièvement.
-Mon soupire ?
-Il y a plusieurs types soupirs. Ceux des malheureux, ceux des déceptions, ceux des menteurs et ceux des affamés.
-Je ne savais pas qu'il y avait un soupir des affamés... Je veux bien de la brioche.》
Elle me tend un morceau. Je saute de mon perchoir et prend le morceau qu'elle me tend.
《Je peux te poser une question ? me demande-t-elle.
-Oui,》je répond car elle m'a passé un morceau de sa brioche.
Je n'aime pas les gens mais je possède quand même un sens de la politesse. De la brioche contre une réponse.
《La perle de ton collier, c'est quelle pierre?
-Du toc.
-Tu mens. Si un jour, tu veux bien me répondre, viens au club de géologie.》
Elle se lève ayant fini de manger et part sans un bruit.
Une apparition soudaine qui pourtant m'a apporté un sentiment familier.
Les gens ont tendance à dire que je suis bizarre mais sur l'échelle de l'excentricité cette fille est au moins deux échelons au dessus de moi.
Même si elle a raison. J'ai menti. Cette perle est toute sauf innocente.
*
Je suis retournée en classe. J'essaye de suivre un peu du cours sans grande réussite. La cloche annoçant la fin du calvaire sonne , quelqu'un s'approche de moi et traverse sans se soucier de mes frontières d'asociabilité.
《Salut, Rei n'est ce pas ?commence t-elle d'un air enjoué. Je suis Azalée la déléguée de classe. Bienvenue parmi nous !》Elle m'adresse ensuite un grand sourire. Je grommèle un merci sans la regarder ce qui ne semble pas la repousser car elle commence à me poser toutes les questions possibles pour essayer de me faire parler.
Je finis par lâcher un "France ".
《Vraiment! Alors c'est ta première fois en "Hexa" !》
Elle continue de parler ainsi pendant dix minutes. Puis elle me dit "au revoir" et s'en va..
*
La Hexa est un petit pays coincé entre la France et l'Italie. Il est le résultat ancestral des conquêtes et des guerres qui ont fini par donner naissance à cet État. Il a un peu près la taille des Pays-Bas mais possède une forme allongée.
Si je suis revenue ici, c'est uniquement pour ma vengeance et je compte bien accomplir mon but. Quel qu'en soit le prix.
*
Les cours sont finis depuis au moins trois heures. Je me suis assise sur ma table regardant toujours à la fenêtre, tripotant ostensiblement ma perle.Une personne entre. Une élève. Nous nous regardons. Elle fixe ma perle et me montre la sienne semblable à la mienne.
Je lui sourit. Elle me regarde d'un air dégoûté.
Nous sortons ensemble de la pièce.
Elle m'emmène dans une cour vide. Nous nous regardons en chiens de faïences.
Le combat peut commencer.
![](https://img.wattpad.com/cover/90166552-288-k221219.jpg)
VOUS LISEZ
L'âme des perles
FantasíaJ'ai crû en eux : les gens. Maintenant, en moi s'embrase un feu. Celui de la vengeance. Ces perles maudites sonneront le glas de leur vie. ........................................................................ J'espère que vous prendrez plaisir à...