Nafyssa: au carrefour des rêves brisés

Chapitre XIII

Il y'a eu un grand silence. Tonton Seydou ne disait rien. Les révélations de Nabou me faisaient l'effet d'une douche froide, je n'aurais jamais pensé qu'il pourrait jouer ce genre de tours à ma tante. J'étais dégoutée, je la comprenais tellement. L'attitude de son mari expliquait clairement sa perte d'appétit, de joie de vivre et sa susceptibilité.

- Nabou : Alors? Tu n'as rien à me dire? Tu défendais pourtant ta position avec véhémence Seydou. Qu'as-tu à me dire maintenant? Quel baratin vas-tu encore me sortir pour expliquer tes mensonges?

- Seydou : Je vais tout t'expliquer. Tu sais comment est ma mère. On ne peut pas lui dire non. Elle a commencé à me forcer à voir ces filles, et je ne t'en ai pas parlé car je ne voulais pas te blesser.

- Nabou : On ne se cache jamais rien Seydou. C'est justement le fait que tu ne m'en aies pas parlé qui me blesse. Tu as inventé des maladies, des problèmes de famille, vraiment tout, pour effacer mes soupçons. Je méritais la vérité Seydou.

- Seydou : Ces filles ne représentent rien ma chérie. Je le faisais juste pour éviter que ma mère ne s'en prenne à toi, la preuve je suis ici, aujourd'hui, avec toi.

- Nabou : M'as-tu défendue quand elle parlait de mes ovaires, de mon utérus ? Quand elle disait devant tout le monde à quel point j'étais vide et insignifiante? A quel point elle regrette de nous avoir présentés?

- Seydou : Elle ne le pensait pas, elle était juste déçue de ne pas te voir enceinte, alors que toutes mes sœurs et cousines avaient déjà enfanté. Je ne pouvais pas lui en parler devant tout le monde, mais je lui en fais part en privé. C'est ma mère, Nabou, je lui dois du respect.

- Nabou : Du respect? Est-ce qu'elle en a pour toi? Pour moi? Sais-tu qu'elle m'a interdit de venir aux cérémonies car je la mets tout le temps dans l'embarras?

- Seydou : Quoi? Ma mère ne ferait pas ça, elle sait que tu es de son sang.

- Nabou : Voilà!!! C'est ce que je te reproche en fait. Tu crois que ta mère est au-dessus de tout le monde, qu'elle peut me traiter comme de la merde et que je dois tout le temps courber l'échine, supporter ses insultes et humiliations. Je dis non. J'en ai assez. Épouse ces gamines, comme tu ne peux pas lui dire non, et répudies moi. J'en ai assez de ce mariage.

- Seydou : Nabou, écoutes moi. Sois patiente ma chérie. Tu sais que je n'épouserais personne.

- Nabou : Pour montrer à vos mères que vous portez le pantalon, vous êtes prêts à tout. Je n'attendrais pas que tu m'humilies Seydou. Je vais me remarier et avoir des enfants insha'Allah. J'ai perdu 12 ans de ma vie, par amour. J'ai tout supporté pour toi par amour, mais quand je vois que tu ne me soutiens pas, je me dis que ça ne vaut plus la peine que je me batte. Épargnons-nous des souffrances inutiles. Appelle ta mère, dis-lui qu'elle a gagné. Je m'en vais.

- Seydou : Comment peux-tu me dire ce genre de choses? Comment peux-tu penser te donner à un autre homme et faire des enfants? Comment peux-tu penser que je te laisserais? Tu m'as soutenue durant toutes les épreuves Nabou. J'ai besoin de toi, plus que jamais.

- Nabou : Tu n'as pas besoin de moi, mais de ta mère et de ses ordres.

- Seydou : Que me reproches tu ma chérie? Je ne peux pas te laisser, c'est hors de question. Dis-moi quoi faire?

- Nabou : c'est trop tard. Quand ma tante m'insultait devant tout le monde, tu n'as pas eu le courage de me défendre. C'est ta sœur qui s'était interposée et m'a amenée dans sa chambre pour me calmer et me réconforter. Je n'oublierais jamais ce jour. Tu es resté de marbre, pour ne pas froisser ta mère.